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samedi 30 juin 2018

Une nouvelle militante féministe arrêtée en Arabie saoudite


29 juin 2018

Une nouvelle militante féministe arrêtée en Arabie saoudite

Riyad a autorisé les femmes à conduire, mais accroît la pression sur les défenseuses des droits

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L'universitaire saoudienne Hatoon Al-Fassi est la nouvelle victime de la campagne menée par les autorités de Riyad pour bâillonner les défenseurs des droits des femmes dans le royaume. Plusieurs figures de ce mouvement ont annoncé, mercredi 27  juin, l'arrestation de cette quinquagénaire, à la pointe de la revendication féministe en Arabie saoudite.
L'annonce, qui survient trois jours après l'entrée en vigueur du décret autorisant les Saoudiennes à conduire, contredit à nouveau le message de modération et d'ouverture porté par le prince héritier, Mohammed Ben Salman, dit " MBS ", l'homme fort de la monarchie. A la mi-mai, six femmes et quatre hommes, très impliqués dans la lutte pour lever l'interdiction faite aux femmes de prendre le volant, avaient déjà été arrêtés, semant la consternation parmi les observateurs du royaume.
Pour la couronne saoudienne, le choix d'emprisonner ces militants, qualifiés de " traîtres " dans les médias locaux, au moment même où ils obtiennent gain de cause, répond à un double objectif : d'une part apaiser les milieux ultraconservateurs, qui voient d'un mauvais œil le programme de réformes de MBS ; et d'autre part dissuader les féministes saoudiennes de poursuivre leurs combats.
Dédain de l'abaya" Le pouvoir veut maintenir les militants dans un état de peur permanent, dit Yahya Assiri, membre de l'ONG de défense des droits de l'homme ALQST, basé à Londres.Aujourd'hui, Hatoon est arrêtée, demain, ce pourrait être eux. Tout est fait pour que l'on renonce à demander de nouveaux droits, comme l'abolition de la tutelle ", ce système qui fait des femmes d'éternelles mineures, soumises à l'autorité d'un tuteur masculin (père, mari ou frère).
Professeure d'histoire à l'université du roi Saoud, à Riyad, Hatoon Al-Fassi a été particulièrement active dans le mouvement pour autoriser les Saoudiennes à voter aux élections municipales, un droit qui leur a été accordé en  2015. Elle était apparue récemment dans une vidéo réalisée par Arab News, un quotidien saoudien progouvernemental, destinée à célébrer la journée " historique " du 24  juin, date du début de la conduite des femmes.
Hatoon Al-Fassi avait défrayé la chronique en  2008, en publiant une étude dans laquelle elle affirmait que sous le royaume nabatéen, un régime pré-islamique qui s'étendait sur l'actuelle Jordanie, le sud de la Syrie et le nord-ouest de l'Arabie saoudite, les femmes jouissaient de davantage de droits que dans le royaume saoudien d'aujourd'hui. Selon elle, les restrictions ultérieurement imposées aux femmes, au nom de la charia, proviennent d'adaptations de lois gréco-romaines antiques – et non de préceptes divins –, un point de vue sacrilège dans l'austère Arabie.
Autre audace, qui la rend immédiatement reconnaissable : son dédain de l'abaya, le voile noir dont sont recouvertes la quasi-totalité des Saoudiennes. En public, elle arbore généralement des tenues traditionnelles du Hedjaz, sa région natale, incluant une coiffe de tissu banc, qui masque partiellement sa chevelure.
Parmi les personnes arrêtées à la mi-mai, trois ont été relâchées peu après. Il s'agit de Madiha Al-Ajroush, une psychologue, d'Aïsha Al-Mana, une directrice d'hôpital, et de Hessa Al-Sheikh, une universitaire : trois femmes très réputées dans leur domaine, toutes âgées d'une soixantaine d'années. Mais début juin, avant Hatoon Al-Fassi, deux autres militantes ont été interpellées, Nouf Abdelaziz et Maya Al-Zahrani. Selon l'organisation ALQST, les prisons saoudiennes abritent aujourd'hui dix défenseurs des droits des femmes.
Benjamin Barthe
© Le Monde

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