Chirac soutient Juppé: la compétition à droite a bien commencé
Par Baptiste PACE | AFP
La compétition semble vraiment lancée à droite pour la présidentielle de 2017, avec le spectaculaire soutien de Jacques Chirac à Alain Juppé, qui semble marquer des points face à ses adversaires, Nicolas Sarkozy en tête, à 30 mois de l'échéance.
Le soutien de l'ancien président à son ex-Premier ministre n'est un secret pour personne. Son appréciation sur "le meilleur d'entre nous" appartient déjà à la postérité politique. Et quand en 2011 le successeur de François Mitterrand avait dit qu'il "voterait Hollande" face à M. Sarkozy, avant que son entourage ne tente d'attribuer cette sortie à son "humour corrézien", c'était - déjà - pour ajouter: "Sauf si Juppé est là".
Bien plus surprenant est le fait que M. Chirac l'ait annoncé par voie de presse alors que, affaibli, il ne s'exprime plus publiquement et n'a, hormis son coup de pouce à Hollande, pas porté la moindre appréciation politique depuis son départ de l'Elysée en 2007.
"J'ai toujours su qu'Alain Juppé serait au rendez-vous de son destin et de celui de la France. Peu de choses pouvaient me faire plus plaisir, pour moi-même, pour lui et surtout pour notre pays", a-t-il dit au Figaro, ajoutant même, enthousiaste: "Si j'en avais l'énergie, j'aurais déjà réservé ma place, même petite, à son QG" de campagne.
Impossible de ne pas établir un lien avec la sortie assassine de son épouse Bernadette Chirac, fervente supportrice de Nicolas Sarkozy, deux jours auparavant: "Qu'est ce qu'Alain Juppé a à voir avec Nicolas Sarkozy ? (...) Il est très, très froid et il n'attire pas les gens".
La critique était sans doute trop acerbe pour M. Chirac. Le maire de Bordeaux n'a-t-il pas, en 2004, endossé la responsabilité, jusqu'à la prison avec sursis et l'inéligibilité, des affaires judiciaires de la mairie de Paris ? Et Jacques Chirac, selon plusieurs analystes de l'époque, n'avait-il pas préféré dissoudre l'Assemblée en 1997 plutôt que de renvoyer son très impopulaire Premier ministre et appeler Philippe Séguin à Matignon ?
- Juppé rend coup pour coup -
Selon Le Canard Enchaîné, Nicolas Sarkozy aimerait que Bernadette Chirac lui organise une rencontre avec son époux. Il "veut absolument se réconcilier avec mon mari. Il fait le forcing (...) Il m'a même dit qu'il était prêt à le voir en cachette n'importe où", aurait-elle dit. Sans succès en raison du veto de leur fille Claude, selon l'hebdomadaire satirique.
Ce soutien tombe à point nommé pour Alain Juppé, invité jeudi soir sur France 2. Le maire de Bordeaux, qui a pris ses rivaux de court en annonçant sa candidature au mois d'août, rend coup pour coup au camp sarkozyste ("En matière d'ennuis judiciaires, vaut mieux pas se livrer à un match, hein") sans épargner François Fillon.
M. Juppé, qui peut compter sur des appuis au centre dont François Bayrou, peaufine son profil "apaisant" et "rassurant" quand ses rivaux Sarkozy, Fillon, voire Xavier Bertrand multiplient les propositions choc sur la fonction publique, la législation du travail et l'immigration.
Dans un entretien au Figaro Magazine à paraître vendredi, M. Sarkozy prône par exemple "un nouveau contrat de cinq ans dans la fonction publique", un "nouveau code du travail" et l'interdiction de la PMA pour les couples homosexuels dans la Constitution.
Premier sarkozyste à avoir réagi aux déclarations de M. Chirac, le co-fondateur du courant la droite forte Geoffroy Didier n'a pu dissimuler son agacement: "Si je me fie à l'humour corrézien dont (M. Chirac) a su faire preuve afin, dit-on, de faire élire François Hollande, je me dis que ce n'est pas une bonne chose".
Même agacement chez Bruno Le Maire, lui aussi en campagne pour le parti: "Tout ça donne le sentiment de tourner en rond (...) On se fiche de savoir qui aime qui et qui est avec qui".
François Fillon s'est montré plus mesuré: "Jacques Chirac a toujours considéré Alain Juppé comme son fils. Il n'y a rien d'anormal à cela, au contraire", a dit celui qui se prépare à défier MM. Juppé et Sarkozy, entre autres, lors des primaires de 2016.
"La fidélité, c'est important en politique", a également déclaré, en forme d'hommage, Hervé Mariton, lui aussi en campagne pour l'UMP.
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