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lundi 30 septembre 2019

HISTOIRE et MÉMOIRE - MUNICH...LE 29 SEPTEMBRE 1938

HISTOIRE et MÉMOIRE



         MUNICH...LE 29 SEPTEMBRE 1938

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Robert Clément
MUNICH...LE 29 SEPTEMBRE 1938

LE 29 septembre 1938, Arthur Chamberlain, premier ministre de Grande-Bretagne, et Edouard Daladier, président du Conseil français, rencontraient Hitler et Mussolini à Munich. Ensemble, ils signaient un accord qui amputait la Tchécoslovaquie du territoire des Sudètes, cédé à l'Allemagne nazie. Cette capitulation des dirigeants français et britannique face aux exigences d’Hitler, cet acquiescement au "dépècement d'un peuple libre", allaient être décisifs dans le mouvement vers le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Six jours plus tard, le 4 octobre 1938, la Chambre des députés approuvait cet accord par 535 voix contre 75 (les 73 députés communistes, le député socialiste Jean BOUHEY et le député "indépendant" de Neuilly Henri de KÉRILIS). A cette occasion, Gabriel PÉRI, député d'Argenteuil et chef du service étranger de "l'Humanité" (fusillé en 1941 par les nazis), prononçait un discours demeuré à juste titre célèbre pour sa terrible lucidité, dont nous reproduisons ici quelques extraits :
« Pour nous, dont la raison d'être est la lutte contre la guerre, et contre le régime qui l'engendre, une seule question domine: après la lourde rançon déposée sur la table du Führerhaus, la paix est-elle plus efficacement garantie? Grâce au formidable tribut que vous avez payé au chantage à la guerre, les peuples peuvent-ils se sentir mieux protégés contre les aventures sanglantes? C'est parce qu'en conscience nous ne le croyons pas, que nous voterons tout à l'heure contre l'ajournement du débat. Notre pensée se reporte, dans le moment présent, vers le peuple dont on a disposé du destin sans lui, à qui on a imposé le verdict de la force. Nous voudrions que l'on n'oublie pas trop vite, dans ces journées d'apothéose, qu’on vient d'immoler une victime, et que cette victime a été sacrifiée parce qu'elle était l'amie de la France, et qu'elle avait cru à la parole française.
Nous ne croyons pas que ce sacrifice ait acheté la paix. Dans l'Europe inquiète où nous vivons, il y avait deux obstacles à la guerre. Nous pouvions dire jusqu'ici: l'Allemagne hitlérienne ne réalisera pas contre nous ses desseins de conquête, tant que là-bas, à la frontière tchécoslovaque, trente divisions allemandes seront retenues. (...) Et nous disions, en outre: la guerre menacerait si l'Allemagne pouvait se pousser vers la conquête du pétrole de cette Roumanie où vivent 700.000 hommes de langue allemande, vers les produits agricoles de cette Yougoslavie où vivent 500.000 hommes de langue allemande. (...) Cette barrière-là, vous l'avez renversée en trois conférences. (...) Vous avez accompli quelque chose de plus grave, vous avez tué cet élément de la force des démocraties, la confiance des peuples. Vous venez de démontrer au monde qu'il était imprudent et dangereux d'être l'ami de la France. (...)
On nous affirme qu'il fallait accepter cela ou se battre: la capitulation ou la guerre. Nous n'acceptons pas d'être enfermés dans ce dilemme. Nous ne voulons pas choisir entre la capitulation et la guerre. Nous disons non à l'une, et non à l'autre. Nous n'admettons pas que l'Europe pacifique ait été contrainte à ce choix. (...) Après l'accord de Munich, un télégramme est parti de Paris à Berlin, pour féliciter le chancelier Hitler. Si le Führer avait le sens des convenances, c'est lui qui, le premier, aurait à exprimer sa gratitude aux hommes de la cinquième colonne qui avaient si bien servi ses desseins. Et maintenant, quelles sont les directions de votre politique extérieure? L'Allemagne vous annonce déjà que le champ des revendications coloniales Ä pour ne parler que de celles-là Ä est largement ouvert. (...) Et ces revendications, où seront-elles formulées désormais? Dans une Europe où vous aurez encore des alliances et des amis? Non pas, depuis Munich, cette Europe n'existe plus. Elles seront formulées dans le club des "quatre" (d'où vous avez exclu l'URSS) aux applaudissements chaleureux de l'Allemagne hitlérienne et des ennemis du pacte franco-soviétique qui vous conseillent de revenir à la politique du fil de fer barbelé. (...)
On se demandera demain avec stupeur comment une bourgeoisie qui a occupé la Rhur à l'époque de l'Allemagne républicaine, abandonne à l'Allemagne de Hitler, la Rhénanie, l'Autriche et la Tchécoslovaquie. Et l'on arrivera à cette conclusion, que dans ces attitudes contradictoires en apparence, harmoniques en réalité, l'amour de la paix et l'intérêt national ne tenaient pas un grand rôle. Il s'agissait, en 1923, de mater une jeune république allemande où s'affirmait l'ascension de la classe ouvrière. Il s'agit, quinze ans après, en accumulant les concessions devant lui, d'empêcher l'effondrement d'un régime de servitude où les classes nanties de notre pays voient le rempart solide contre les aspirations ouvrières. Ne baptisez pas cela du nom de paix.
La paix n'a rien à voir avec ce triomphe de l'égoïsme de classe. La paix, il faut la regagner. La regagner, cela ne veut pas forcément se lancer dans cette politique de surarmement dont votre capitulation récente vient de démontrer l'absurdité. La paix, cela veut dire faire oublier la page sombre que vous venez d'écrire, arrêter le glissement, desserrer l'étreinte sur l'Europe centrale et sur les Pyrénées, rendre aux peuples qui l'ont perdue la confiance dans la signature de la France. (...) Vous avez signé la défaite sur le corps mutilé d'un peuple libre. C'est contre vous que nous gagnerons la bataille de la paix

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