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vendredi 23 février 2018

Les fusillades de masse ont cessé en Australie


23 février 2018

Les fusillades de masse ont cessé en Australie

En restreignant le port d'arme, Canberra a fait chuter le taux d'homicides par balle

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Le 28  avril 1996, Martin Bryant, un déséquilibré âgé de 28 ans, armé d'un semi-automatique, ouvre le feu dans un restaurant du village touristique de Port Arthur, en Tasmanie. En 90  secondes, il abat vingt personnes. En sortant, il en tue quinze autres. C'est le pire meurtre de masse de l'histoire de l'Australie et un électrochoc pour le pays, qui a immédiatement réagi en durcissant sa législation sur les armes à feu. Depuis, le taux d'homicides par balles a chuté et aucune nouvelle tuerie de masse n'est venue endeuiller l'île-continent.
Le National Firearms Agreement (NFA), approuvé le 10  mai 1996 par l'ensemble des Etats australiens et toujours en vigueur aujourd'hui, encadre strictement la détention d'arme à feu. Parmi les mesures adoptées : la vente de fusil semi-automatique et automatique est interdite, chaque arme doit être enregistrée par son propriétaire, qui doit posséder un permis, l'autodéfense n'est pas considérée comme un motif valable pour l'obtention de ce permis, celui-ci est délivré à l'issue d'un processus long et complexe au cours duquel les antécédents judiciaires du demandeur sont soigneusement examinés.
Soutien de l'opinion publiqueDès le 1er  octobre 1997, les contrevenants sont passibles d'une lourde amende et d'une peine de prison. Entre-temps, les autorités ont mis en place un programme, financé par une hausse d'impôts, pour racheter les armes devenues illégales aux particuliers. En quelques mois, elles ont collecté plus de 650 000 fusils à pompe, fusils de chasse et autres semi-automatiques.
Fin avril  1996, quand John Howard, le chef du gouvernement conservateur, annonce sa volonté de réformer en profondeur la législation, sa priorité est de " ne pas suivre la trajectoire américaine ". L'Australie venait de subir en dix-huit ans treize fusillades qui avaient fait 112 victimes. Malgré la mobilisation de dizaines de groupes et associations réclamant un durcissement des lois, plus ou moins laxistes selon les Etats, toutes les velléités d'amendement s'étaient heurtées à l'opposition du lobby des armes et aux réticences d'un monde rural où les fusils sont omniprésents depuis l'arrivée des premiers colons, à la fin du XVIIIe  siècle.
Le massacre de Port Arthur a changé la donne. Grâce au soutien massif de l'opinion publique, horrifiée par la tuerie, le chef de l'exécutif impose sa réforme et réalise un tour de force : obtenir l'accord de tous les gouvernements locaux en douze jours. Le NFA est " l'une des choses dont je suis le plus fier ", dira plus tard M. Howard.
Depuis l'adoption de ces mesures, et grâce à un nouveau programme de rachat de pistolets et de revolvers en  2003, les autorités ont récupéré et détruit plus d'un million d'armes à feu, soit environ un tiers de l'arsenal aux mains de la population. " Depuis l'adoption de ces lois, la première chose que nous pouvons remarquer est qu'il n'y a plus eu de fusillade de masse ", souligne Philip Alpers, professeur à l'université de Sydney et éditeur du site Gunpolicy. org.
" Mais surtout, grâce à elles, le risque pour un Australien de mourir d'une blessure par balle a diminué de plus de moitié depuis 1996. " Selon ce spécialiste, le taux d'homicides par arme à feu en Australie est aujourd'hui vingt-trois fois inférieur à celui des Etats-Unis. Plus surprenant, le nombre de suicides, l'une des principales causes de mortalité par arme à feu, a aussi chuté.
Isabelle Dellerba
© Le Monde

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