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vendredi 21 juillet 2017

Nous les Français, ne devons pas oublier comment accueillir un voisin en détresse


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Nous les Français, ne devons pas oublier comment accueillir un voisin en détresse

 21/07/2017 18:55 CEST

Laura SpinneyRomancière et journaliste scientifique

JORDEANGJELOVIK VIA GETTY IMAGES
"Nous les Français, ne devons pas oublier comment accueillir un voisin en détresse".
D'ici 2019, le gouvernement va créer 12.500 places pour les réfugiés et les demandeurs d'asile. "C'est une connerie", dit Michel Sitbon. "On en a besoin maintenant. Avons-nous oublié, nous les Français, comment accueillir un voisin en détresse?"
Lui, en tout cas, n'a pas oublié. Le jour où le Premier ministre a dévoilé le nouveau "plan migrants", le 12 juillet, il a reçu une famille de cinq personnes dans la librairie parisienne qui lui appartient. Chaque nuit le magasin se transforme en dortoir, accueillant les réfugiés du centre de la Porte de la Chapelle.
Lorsque, le soir tombé, l'association "Utopia 56" n'a pas trouvé de solution pour l'hébergement de nouveaux arrivés, elle fait appel au réseau citoyen dont Sitbon fait partie. Souvent il s'agit de femmes avec enfants, ou de familles entières, le centre n'acceptant que les hommes.
"Dès qu'ils arrivent on leur laisse la place. Ils sont chez eux. Ils ont la clef et ils ferment eux-mêmes. Ce sont des heures de sommeil qu'on leur donne, ou d'intimité."
"Lady Long Solo" –c'est son nom– est classifiée comme librairie anarchiste et, depuis 1995, sert de vitrine à Sitbon, éditeur engagé. L'étiquette ne le gêne pas, même s'il la rejette. "J'ai milité, oui, mais sur des questions précises", dit-il.
Chaque nuit le magasin se transforme en dortoir, accueillant les réfugiés du centre de la Porte de la Chapelle.
Parmi ces questions, le respect des droits humains des "sans-papiers", terme qu'il affirme avoir inventé dans une revue qu'il rédigeait dans les années 90, refusant de les appeler "clandestins".
Son engagement débute en 1992, quand un agent littéraire américain lui envoie un opuscule sur les abus contre les droits humains en Birmanie. Le livre le fait pleurer. Dès 1994, c'est le génocide rwandais qui l'obsède et qui le radicalise. Surtout parce qu'il est convaincu que les médias censurent tout ce qui concerne la responsabilité de l'armée française.
Certains échappés de ces atrocités sont parmi les 300 sans-papiers qui, en août 1996, s'enferment dans l'église Saint-Bernard, dans le 18ème arrondissement. "Un ami sénégalais vient me voir et me dit, les sans-papiers cherchent des européens pour se joindre à eux", explique Michel Sitbon. "Avec quelques amis on se précipite à Saint-Bernard". Ils y passeront le reste de l'été.
Depuis, il déplore un système politique qui, à droite comme à gauche, ne s'assume pas et sanctionne une perpétuelle chasse à l'homme sans jamais proposer de solution réelle. Et qui laisse penser qu'il n'est pas prêt à croire aux récits souvent effrayants des exilés.
Michel Sitbon a d'abord hébergé des Rom et des réfugiés dans la bibliothèque de sa propre maison puis, à partir de 2015, leur a consacré Lady Long Solo. Sa première hôte était une avocate éthiopienne surnommée "Baby", qui a fui la Jungle de Calais avec son amant et qui a conçu un enfant avant d'y retourner pour "combattre" aux cotés de ses camarades sans-papiers. Sitbon l'a perdue de vue, mais d'autres réfugiés ont pris sa place, et tant qu'ils viennent, il continuera à les recevoir. Il souhaiterait que ses compatriotes fassent de même. Sinon, dit-il, "C'est quoi, ce pays?".
LAURA SPINNEY
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