LEONARDA - Faute de mieux, dernier recours, seul espoir possible: Leonarda a fait le choix de médiatiser son affaire depuis le Kosovo où elle se trouve. Mercredi dans Le Petit Journal de Canal+, au 20 heures de France 2 et sur presque toutes les chaînes d'info en continu, mais aussi jeudi matin sur France Inter et d'autres radios, l'adolescente a publiquement interpellé le gouvernement sur son sort et celui de sa famille.
Un choix qui lui vaut le soutien des lycéens mais qui la place sous le feu des projecteurs. Derniers rebondissements en date, plusieurs révélations sur le passé de son père accusé de mensonges, "violences" et autres "petits larcins".
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Plus que jamais, le sort de l'adolescente est en suspend. Une chose est sûre, il n'aura pas fallu plus d'une journée à cette collégienne de 15 ans pour devenir le symbole de toutes les injustices. Mais au-delà de ce symbole, c'est bien toute une vie qui a basculé. "Tous les espoirs de cette jeune femme sont déchirés," s'insurge le psychiatre Dan Véléa, interrogé par Le HuffPost. "Sa tentative de suicide en témoigne, cette expulsion constitue un effondrement total de l''ensemble de ses plans d'avenir."
Traumatisme
Et des plans d'avenirs, Leonarda en avait. "Le traumatisme ne peut être que d'autant plus fort qu'elle était manifestement très impliquée dans un processus scolaire. Il semble qu'elle ait été très appréciée par son entourage, son relationnel était bon. Si elle savait qu'elle se trouvait dans une situation risquée, qu'il y avait un couperet au-dessus de sa tête, je ne suis pas sûr qu'elle s'attendait à ce qu'il tombe avec autant de brutalité," continue-t-il.
La plupart des témoignages s'accordent sur une arrestation sans violence policière particulière, mais l'absence de traumatisme physique n'exclut pas un traumatisme psychique. Au sentiment d'abandonner sa vie, s'est immédiatement ajouté la honte. "Qu'est-ce que t'as fait, t'as volé?" l'interrogent ses camarades. Leonarda ne pourra pas leur fournir d'explication. S'il n'y a donc pas eu violence physique de la part des policiers, l'expulsion présente une dimension physique indéniable.
Coupée de ses amis, de ses professeurs, à bien des égards, l'événement aura été traumatique pour l'adolescente. "Elle est complètement déracinée. Alors qu'elle a voulu construire quelque chose, cela lui est refusé d'un coup. En fonction de ce qu'il adviendra, les conséquences pourraient être terrible quant à la confiance qu'elle placera dans les adultes et dans leur monde. C'est une victime qui mettra du temps à se reconstituer."
Si les dernières affirmations du père de Leonarda sèment le trouble quant au passé de la famille Dobrani, cela faisait bien quatre ans qu'elle était scolarisée au collège André-Malraux de Pontarlier dans le Doubs. Sixième, cinquième, quatrième, troisième, quatre ans au cours desquels Leonarda crée des amitiés, y rencontre son "copain", si bien que pour l'adolescente, la rupture est brutale. "Il faut prendre en compte cet aspect affectif, émotionnel et peut-être amoureux de son histoire, à 15 ans cette dimension est primordiale".
Une médiatisation à double tranchant
"Je n'ai aucune chance ici, je ne connais personne, je n'ai pas de maison et si Dieu existe nous serons dans le premier avion à destination de la France," a déclaréLeonarda lors d'une de ses nombreuses déclarations médiatique. Pour Dan Véléa, c'est une prise de risque. "Cette popularité là, elle n'en a pas besoin. D'une semaine à l'autre, elle risque de tomber dans l'oubli, et cela risque pourrait être très violent," continue-t-il.
Ni Kosovare ni Française, et peut-être maintenant italienne, comme l'affirme son père, le sort de Leonarda reste en suspend. Seule certitude? L'incertitude. "Si l'on apprend qu'elle est vraiment italienne et qu'elle rentre en France, alors tout pourra rentrer dans l'ordre assez rapidement. Mais elle devra se faire accompagner, aider, car elle sera épiée de toute part. Certains la mettront sur un piédestal, d'autres la jalouseront, ce sera difficile pour elle de faire face à tout cela en même temps," suppose Dan Véléa.
Mais il y a aussi un autre risque à la médiatisation, celle de voir sa vie privée déballée sur la place publique. Leonarda en a déjà fait l'expérience jeudi 17 octobre. Alors que plusieurs sources ont décrit son père comme un homme "irascible", "violent" et contre lequel Leonarda et sa soeur avaient porté plainte, la jeune femme fut obligée de botter en touche, quitte à absoudre son père de tout soupçon. "S'il était violent, je ne serais pas là. Il m'a frappée que deux fois", a-t-elle reconnu sur BFM-TV. La première parce qu'elle était rentrée trop tard à la maison, la seconde parce qu'elle n'avait pas fait ses devoirs.
Qu'adviendra-t-il de Leonarda? Impossible à dire pour l'instant. "Pour son équilibre psychologique, la meilleure chose qu'elle puisse faire est de continuer à se dire victime, de parler d'injustice et de faire preuve d'une résilience active en se convainquant de la nécessité de se battre, ne pas s'avouer vaincu," explique le thérapeute. "S'il y a des solidarités, cela va l'aider, sinon ça va durer longtemps et il y aura des conséquences psychiques" conclut-il.
Expulsions et évacuations : les affaires polémiques
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AFP
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