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jeudi 27 mars 2025

Rue 89 avec L'OBS - Le rock est-il soluble dans la vie conjugale ? _ Jeudi 27 mars 2025

 


Jeudi 27 mars 2025

Le rock est-il soluble dans la vie conjugale ? « Avant, on dormait à l’hôtel ensemble, on se réveillait et on se mettait à jouer. » Les yeux humides, Paul McCartney s’épanche en attendant John Lennon, qui menace de planter la répétition que les Beatles ont prévue ce jour-là. Nous sommes en 1969, la scène est filmée dans les studios de Twickenham, près de Londres, et figure dans le formidable documentaire de Peter Jackson « The Beatles : Get Back ». Le film-fleuve capte ce moment charnière où le plus célèbre groupe au monde prépare son dernier concert, avant l’implosion.

Il montre aussi une autre transition : le passage séparant la vie entre « bros » (potes) de celle d’adulte. Alors que les « Fab Four » approchent la trentaine, ils doivent désormais composer, dans tous les sens du terme, avec leurs compagnes respectives. Et en premier lieu, avec celle de Lennon, l’artiste Yoko Ono, présente du matin au soir tandis que les musiciens s’arrachent les cheveux sur les accords de « Don’t let me down » ou « Dig a Pony ».

En mode passif-agressif, McCartney dit « comprendre que John ait besoin de passer du temps avec Yoko ». Lennon est le premier à avoir brisé la règle qui prévalait jusque-là : ne pas amener de femmes en studio. McCartney n’est pas en reste. La photographe Linda Eastman, future Mme McCartney, lui rend régulièrement visite avec sa fille née d’une première union. Au détour d’une conversation, on entend également le batteur Ringo Starr annoncer la grossesse de son épouse. Les « quatre garçons dans le vent », qui écumaient les clubs louches de Hambourg au début de leur carrière, sont désormais des pères ou des maris. Durant les séances de travail, Georges Harrison est le seul à ne pas beaucoup faire venir sa conjointe. Mais il impose aux autres un adorateur de Krishna en toge, qui reste accroupi à les fixer. Comme si le guitariste avait lui aussi besoin d’un tiers séparateur.

Alors qu’un membre de leur équipe insiste pour qu’ils se produisent dans un théâtre antique en Libye, au terme d’un périple en paquebot avec des fans, tous font la moue à l’idée de se retrouver à huis clos les uns avec les autres. Personne n’a envie de quitter l’Angleterre et ses proches. Le concert, mythique, aura finalement lieu sur le toit des studios Apple, dans la capitale britannique.

Bérénice Rocfort-Giovanni

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Bouillon d’os et « réconciliation avec son utérus » : la dérive sectaire de « l’endobusiness »
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Elodie, 42 ans, cadre dans la formation professionnelle, est atteinte d’endométriose, une maladie gynécologique longtemps méconnue qui touche une femme sur dix. Alors qu’elle souffre depuis ses premières règles, le diagnostic n’a été posé qu’à l’âge de 25 ans. Pour le « Nouvel Obs », elle relate son douloureux parcours médical.

« J’ai eu mes premières règles très tôt, à 9 ans. Tout de suite, elles ont été douloureuses, au point que je ne pouvais plus aller à l’école pendant plusieurs jours. Ma mère m’a emmenée voir sa gynécologue, qui n’a pas pratiqué d’examen interne car je n’avais pas encore eu de rapports sexuels. Aujourd’hui, on fait passer des IRM en cas de soupçon d’endométriose mais à l’époque, les gynécos n’étaient pas formés à cela. J’ai été mise assez rapidement sous pilule, à l’âge de 14 ans, pour limiter les douleurs. Je prenais du Duphaston, un contraceptif prescrit pour soigner l’endométriose, ce qui veut dire que ma gynéco avait sans doute déjà pensé à cette maladie, sans pour autant la nommer.

A 18 ans, un bilan sanguin a montré que mon taux de triglycérides et de cholestérol était trop élevé. J’étais à ce moment-là suivie par mon médecin de famille dans le Pas-de-Calais, où nous vivions avec mes parents. Il m’a fait arrêter la pilule. Mes douleurs dans le bas-ventre, jusque-là supportables, sont alors devenues très violentes. J’ai consulté une autre gynéco, qui était focalisée sur un adénofibrome, une petite boule bénigne que j’avais sur le sein. Quand je lui parlais de mes douleurs, elle me disait que j’étais douillette, que c’était normal d’avoir mal pendant ses règles… A l’époque, même un simple frottis était ultra-douloureux, cela aurait dû l’alerter mais au lieu de ça, elle répétait sans cesse : “Vous avez un tout petit utérus”. Sauf que je n’y peux rien si je mesure 1,50 mètre ! Elle m’a envoyé faire des examens mais le problème est que si on ne recherche pas spécifiquement l’endométriose, on ne la trouve pas. Pour cela, il faut aller dans des centres de radiologie spécialisés pour débusquer les adhérences entre les muqueuses, des lésions qui ont parfois la taille d’une tête d’épingle…

J’ai fini par souffrir en permanence, j’étais tout le temps gênée. En 2007, à l’âge de 25 ans, j’ai perdu ce qui ressemblait à des morceaux de peau. Je les ai ramassés, je les ai mis dans un pot que j’ai apporté à mon médecin traitant, en région parisienne, où j’avais déménagé. J’avais 38 ° de fièvre, il m’a envoyé aux urgences. Au bout de sept heures, un interne m’a fait passer une échographie endovaginale [une sonde est placée dans le vagin pour explorer l’utérus et les ovaires, NDLR] et là on m’a annoncé que j’avais “le cancer de la femme”, sans m’en dire plus. Puis une gynécologue m’a fait repasser une échographie. Pour elle, ce n’était pas un cancer, mais un fibrome. Je suis restée hospitalisée pendant cinq jours. Nouvelle échographie et là, le diagnostic est tombé : “c’est de l’endométriose. On vous opère dans quinze jours.” J’étais seule à l’hôpital au moment de l’annonce, sans mes parents ni ma compagne. Sur le coup, j’étais soulagée que ce ne soit pas un cancer. Ensuite, j’ai découvert que j’avais deux endométriomes sur les ovaires. Ces deux kystes étaient là depuis tellement longtemps qu’ils n’étaient même plus rouges, mais couleur chocolat.

“Vous êtes guérie”, m’a annoncé la gynéco après leur retrait. Un mois après, pourtant, j’avais toujours mal. Une gynéco en ville m’a orientée vers une radiologue spécialisée dans l’endométriose qui sait faire les échographies avec minutie. Elle a pratiqué une échographie endovaginale et là, à l’écran, toutes les lésions sont apparues. Elles étaient partout, s’étendaient du bord de l’estomac jusqu’aux ligaments qui tiennent la vessie en passant par le rectum. C’est ce jour de février 2007 que j’ai compris que je souffrais d’endométriose à un stade avancé, une pathologie grave et envahissante.

Quelque part, j’étais malgré tout soulagée parce que j’avais entendu pendant des années que j’étais limite folle et qu’il n’y avait rien d’autre à me donner que la pilule. J’ai pris du Lutéran pendant quatorze ans, un progestatif que j’ai dû stopper l’année dernière à cause du risque de tumeur des méninges qui persiste même cinq ans après l’arrêt.

Ma gynécologue m’a dirigée vers le professeur Emile Daraï [un gynécologue parisien spécialiste de l’endométriose mis en examen pour violences volontaires aggravées sur plus de trente patientes]. Il connaît bien l’endométriose mais était violent pendant les examens, il n’annonçait pas ce qu’il faisait, ne demandait pas mon consentement. Il me faisait mal et quand je le lui faisais remarquer, il m’expliquait qu’il n’avait pas le choix. Il m’a opérée quelques mois plus tard. A la suite de cette chirurgie, j’ai ressenti de vives douleurs dans la fesse. Pour mon généraliste, c’était une sciatique. Mais j’ai commencé à boiter. Je suis retournée voir le professeur Daraï. Il m’a soutenu que ça allait, que je n’avais plus d’endométriose. J’ai changé de médecin traitant et là, tout de suite, en me voyant, il m’a lancé : “Vous avez une jambe plus fine que l’autre.”

« A cause des suites de l’opération, je ne peux plus mettre de jean »

Après plusieurs examens, les médecins ont constaté que la chirurgie que j’avais subie, par laparotomie (ouverture de l’abdomen par incision), avait été tellement profonde que les nerfs pudendal (dans la région pelvienne) et crural (qui prend racine dans la moelle épinière) avaient été endommagés jusqu’à la sphère génitale. A cause des suites de l’opération, je ne peux plus mettre de jean. Je souffre aussi de rétention urinaire. Je peux très bien ne pas aller aux toilettes pendant vingt-quatre heures.

Cette opération, on ne la pratiquerait plus aujourd’hui car elle est trop invasive et porte atteinte à la fertilité. C’est pour cela que ma compagne a porté notre fille, qui est née il y a sept ans. J’ai dû m’arrêter de travailler en 2011, je n’ai repris qu’en 2014. J’ai consulté le professeur Jarraya, neurologue à l’hôpital Foch, à Suresnes (Hauts-de-Seine), qui a proposé de me poser un stimulateur médullaire [un dispositif qui stimule la moelle épinière pour réduire les douleurs des nerfs]. On vous place une électrode de quinze centimètres dans la colonne vertébrale alimentée par une pile placée dans la fesse. Le parcours dure neuf mois pour savoir si on est éligible, cela passe notamment par une rencontre avec un psychiatre, car il faut pouvoir tolérer de vivre avec un équipement pareil dans le corps. Puis l’opération se fait en deux temps. Après la première chirurgie, on vit trois-quatre jours avec tout le dispositif qui sort de la peau et qui est bandé sur l’abdomen, c’est impressionnant. On doit évaluer sur une grille sa douleur pour savoir si cela a un intérêt d’implanter le dispositif pour de bon. Heureusement pour moi, ça a fonctionné. Alors que je marchais avec une canne, je n’en ai plus eu besoin.

La stimulation médullaire a ses limites car l’endométriose continue de se propager sur le nerf sciatique. Je dois passer tous les ans une échographie pour faire le point. C’est une pathologie usante. Je ne peux plus lever les bras ni me tourner normalement. Mais parce que je remarche à peu près normalement, c’est comme si je n’étais plus malade aux yeux des gens. Le handicap invisible est très difficile à vivre car les douleurs et la fatigue sont bien présentes même si, nous, malades, on essaye de les cacher.

Mon entourage s’étonne quand je suis en crise d’endométriose, c’est atroce de devoir se justifier. Un jour, l’ascenseur de l’immeuble où je travaille était en panne alors que mon bureau se trouve au 4e étage. Quand j’ai demandé à pouvoir télétravailler, mon supérieur m’a demandé : “Comment ça, tu ne peux pas monter 4 étages ? Tu ne m’avais pas dit que tu étais malade à ce point”, alors qu’il connaît très bien mon statut de travailleuse handicapée. Certains amis ne comprennent pas non plus quand j’annule une soirée à la dernière minute parce que je me sens mal. La plus malheureuse dans l’histoire, c’est pourtant moi ! Toutefois, mes parents, qui jusqu’en 2006 ne connaissaient pas la maladie, sont aujourd’hui les premiers à s’y intéresser. J’ai aussi la chance d’avoir une compagne très patiente et bienveillante. Mais souvent, je me dis vivement la ménopause pour en finir avec cette maladie. »

temoignagesrue89@gmail.com

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