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7.novembre.2018
Comment le FBI réduit au silence les lanceurs d’alerte, par John Kiriakou
Source : Consortium News, John Kiriakou, 16-10-2018
16 octobre 2018
Dire la vérité au pouvoir a ruiné Darin Jones, un ancien spécialiste des contrats du FBI qui a rapporté des preuves de graves malversations en matière de passations de marchés. Il est probablement la dernière victime en tant que lanceur d’alerte fédéral, écrit John Kiriakou.
L’idée de « lancement d’alerte » a fait beaucoup parler d’elle dans les médias.
L’auteur anonyme d’un éditorial récent du New York Times étripant le président est-il un lanceur d’alerte ?
La victime d’une agression sexuelle présumée par Brett Kavanaugh, candidat à la Cour suprême, est-elle une lanceuse d’alerte ?
J’ai la chance d’avoir accès aux médias pour parler de torture après avoir dénoncé le programme de la CIA. Je pense qu’Ed Snowden, Tom Drake et d’autres diraient la même chose au sujet des conséquences de leur propre divulgation.
Le coût de faire ce qu’il convient de faire
Le problème, c’est que nous sommes l’exception à la règle. La plupart des lanceurs d’alerte souffrent dans l’anonymat ou sont personnellement, professionnellement, socialement et financièrement ruinés pour avoir dit la vérité au pouvoir. Darin Jones est l’une de ces personnes. C’est l’un de ceux qui ont été réduits au silence dans la guerre de Barack Obama contre les lanceurs d’alerte. Et il continue à souffrir sous Donald Trump.
Jones était un spécialiste des supervisions de contrats du FBI qui, en 2012, avait signalé à son supérieur la preuve de graves malversations en matière de passation de marchés. Jones a soutenu que la Computer Sciences Corporation (CSC) s’était vue attribuer un contrat de 40 millions de dollars de façon frauduleuse parce qu’un ancien fonctionnaire du FBI chargé d’octroyer le contrat avait alors été engagé comme consultant au CSC. Jones a dit, à juste titre, qu’il s’agissait d’une violation de la Loi sur l’intégrité dans la passation des marchés. Il a fait sept autres divulgations alléguant des irrégularités financières au FBI, et il a été rapidement congédié pour ces problèmes.
N’oubliez pas que les États-Unis ont une loi sur la protection des lanceurs d’alerte. Tout fonctionnaire fédéral qui met au jour des preuves de gaspillage, de fraude, d’abus, d’illégalité ou de menaces à la santé publique ou à la sécurité publique est protégé en vertu d’une loi fédérale.
Mais le FBI s’en fichait. Jones était un fauteur de troubles. Il parlait de ses collègues du FBI. Et il a dû être réduit au silence.
Immédiatement après son licenciement, Jones a fait appel. Il n’a toutefois pas été réintégré parce qu’il avait fait sa révélation à son superviseur et non à l’une des neuf personnes figurant sur la liste approuvée par la direction du FBI, qui pouvait entendre une plainte de lanceur d’alerte. Jones a fait appel encore une fois, entamant une odyssée de plus de quatre ans.
Le sénateur Chuck Grassley (Républicain – Iowa) est le champion des lanceurs d’alerte au Capitole, que vous aimiez sa politique ou non. Jones a contacté Grassley et lui a demandé de l’aide. Son licenciement était clairement des représailles pour ses révélations et était illégal, selon la loi sur la protection des lanceurs d’alerte. M. Grassley a accepté et a écrit trois lettres distinctes à James Comey, alors directeur du FBI, et à Sally Yates, alors sous-procureure générale. Aucune n’a reçu de réponse.
M. Grassley a exhorté le ministère de la Justice à réintégrer M. Jones, affirmant que son limogeage constituait une violation du Whistleblower Protection Enhancement Act de 2016, qui a renforcé la loi initiale de protection des lanceurs d’alerte. Il a ajouté que lorsque Mme Yates a comparu devant la Commission judiciaire du Sénat pour ses audiences de confirmation des charges plus tôt dans l’année, elle a promis « d’améliorer le processus de règlement des demandes de représailles, notamment en élargissant la liste des personnes à qui une divulgation protégée pourra être accordée ».
Elle n’a jamais fait ça. En fait, Mme Yates a ordonné au directeur de l’Unité d’examen des cas d’inconduite professionnelle du ministère de la Justice d’écrire à M. Jones et de lui dire : « L’examen du sous-procureur général est terminé et sa décision est définitive. Votre affaire n’est plus en instance. Vous ne devriez pas vous attendre à recevoir d’autres communications que vous ou toute autre organisation ou personne pourrait soumettre relativement à votre cas de représailles à l’égard d’un lanceur d’alerte ». En d’autres termes, la politique officielle du ministère de la Justice était d’ignorer la loi et de fournir un statu quo entre le président du comité judiciaire du Sénat et le lanceur d’alerte lui-même.
La réponse du FBI a été tout aussi mauvaise, quoique prévisible. Le bureau de l’avocat général du FBI a écrit à Jones : « Le FBI vous a informé qu’il ne mènera pas d’enquête plus approfondie sur vos allégations selon lesquelles le FBI vous a congédié parce que vous avez signalé un problème de conformité et que des représailles ont été exercées contre vous en violation des règlements applicables en matière de protection des lanceurs d’alerte. Le FBI s’est acquitté de ses obligations légales et considère que cette affaire est close sans qu’il y ait lieu de la réexaminer ou de la rouvrir. Veuillez noter que le FBI ne répondra à aucune correspondance ou courriels supplémentaires liés ou découlant de la cessation de votre emploi. »
C’est un autre doigt d’honneur.
Notez aussi que le FBI fait référence à la « réglementation sur les lanceurs d’alerte ». Ce n’est pas un règlement. C’est une loi. Et le FBI aussi doit respecter et suivre la loi même quand il ne le veut pas.
Mettre fin aux brimades à l’encontre des lanceurs d’alerte
Le vrai problème c’est que Darin Jones a fait ce qu’il convenait de faire. Il a fait une chose honorable. Il a fait ce qu’il fallait sur les plans éthique, juridique et moral. Et il l’a payé avec sa carrière. Comme les autres lanceurs d’alerte fédéraux, il est ruiné financièrement. Des amis et des membres de sa famille se sont éloignés de lui. Il ne trouve pas de travail. Je peux vous dire de par ma propre expérience que le poids psychologique des retombées de la dénonciation est parfois trop lourd à supporter.
Les amis et sympathisants de Jones sont en train de créer une campagne GoFundMe pour l’aider à traverser cette horrible période.
Nous devons également maintenir la pression sur le FBI, la CIA, la NSA, la TSA et toutes les autres organisations gouvernementales qui s’en prennent aux lanceurs d’alerte.
Nous devons appuyer Chuck Grassley et les autres députés du Capitole qui tentent de protéger les lanceurs d’alerte.
Nous devons forcer nos propres représentants élus à faire de même. Après tout, ils travaillent pour nous.
Notre objectif devrait être simple.Travailler d’arrache-pied pour s’assurer que Darin Jones est le dernier lanceur d’alerte fédéral à être traité de cette façon.
John Kiriakou est un ancien agent antiterroriste de la CIA et un ancien enquêteur principal du Comité sénatorial des relations étrangères. John est devenu le sixième lanceur d’alerte inculpé par le gouvernement Obama en vertu de la loi sur l’espionnage – une loi conçue pour punir les espions. Il a passé 23 mois en prison pour avoir tenté de s’opposer au programme de torture de l’administration Bush.
Source : Consortium News, John Kiriakou, 16-10-2018
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
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Fabrice // 07.11.2018 à 07h14
Il est clair que le système neoliberal en cours est un système de copinage et que l’intégrité d’un lanceur d’alerte est une menace pour le système donc il se défend contre l’élément qui le menace c’est logique, c’est moins violent que la mafia mais à terme cela vous détruit l’individu qui a crié “Basta”.