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samedi 5 mai 2018

Macron an I, une recomposition loin d'être finie


4 mai 2018

Macron an I, une recomposition loin d'être finie

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 Un an après une présidentielle et des législatives victorieuses, La République en marche espère fracturer définitivement la gauche et la droite à la faveur des élections européennes et municipales
" Libérer " l'économie a, ces douze premiers mois, pris le pas sur " protéger " les salariés, dans le diptyque de son slogan de campagne
 Les réformes de la première année du quinquennat parlent aux anciens électeurs de François Fillon
Pages 8-9
© Le Monde


4 mai 2018

Un an après, la recomposition continue

Le chef de l'Etat espère fracturer définitivement la gauche et la droite lors des européennes et des municipales

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En chantier : le panneau est accroché depuis un an sur la façade de la vie politique française. Un an que les uns se mettent " en marche ", quand les autres se placent " en congé " ; qu'untel (ou unetelle) arrête de payer la cotisation de son parti, quand unetelle (ou untel) en claque carrément la porte. Un an que les plus pressés guettent la mort du clivage droite-gauche, quand certains nostalgiques veillent sur le moindre souffle du malade.
L'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République, le 7  mai 2017, puis la victoire de son mouvement La République en marche (LRM) aux élections législatives, un mois plus tard, ont provoqué des transhumances qui dépassent le rythme des saisons. Un conseiller d'Edouard Philippe s'étonne encore : " Changer de parti n'a jamais été autant banalisé. " Ce que le premier ministre, issu de la droite, résume d'une métaphore menuisière : " La poutre travaille encore. " En clair, le paysage politique, percuté il y a un an par la victoire inattendue de M. Macron, qui a attiré à lui une cohorte hétéroclite de personnalités issues de la droite, de la gauche et du centre, n'a pas fini de se recomposer.
2017, première étapeAux yeux de l'exécutif, 2017 ne représente d'ailleurs qu'une première étape. " Dans leur tête, les européennes, puis les -municipales, doivent permettre de finir le travail, de fracturer -définitivement la gauche et la droite ", -assure ainsi un parlementaire LRM.
Un proche d'Edouard Philippe dessine le paysage tel que le voit – et l'imagine – le " nouveau monde " : " Il y a un bloc central et pas centriste, qui prend à gauche et à droite. Il y a des oppositions radicales. Et il y a des interstices où il est difficile de se positionner en matière de doctrine. La gauche sociale-démocrate ? Il est difficile pour elle de s'opposer au gou-vernement. La droite républicaine ? Elle n'a plus que les territoires, les racines, ce qui représente un tout petit espace. "
A gauche, le travail de décomposition a été sérieusement engagé. Comme un symbole, les deux finalistes de la primaire du Parti socialiste, Manuel Valls et Benoît Hamon, ont décidé de quitter la formation de François Mitterrand, à l'issue des législatives de 2017 : l'un pour rejoindre les bancs de LRM, l'autre pour fonder un mouvement à la gauche du parti, Génération.s.
Ce qui n'empêche pas le nouveau premier secrétaire du PS, Olivier Faure, d'espérer que la baraka change de camp et d'attirer certains marcheurs échaudés par les aspects trop droitiers de la -politique d'Emmanuel Macron. " Certains primo-députés me -croisent et m'appellent “le patron”, ils me disent “à bientôt, on arrive !” C'est sur le ton de la plaisanterie, mais ça en dit long, -estime M. Faure. D'autres me -disent qu'ils espèrent un second temps plus social dans le quinquennat. Ce qui est sûr, c'est que la facture est salée pour ceux qui viennent de la gauche et qui -découvrent jour après jour les -décisions de l'exécutif. "
En Macronie, certains espèrent surtout attirer à eux la droite modérée, notamment dans la perspective des élections européennes de 2019. Avec l'objectif de repousser Laurent Wauquiez et le parti Les Républicains (LR) vers l'extrême droite. Malgré de nombreux départs – à commencer par Edouard Philippe, Bruno Le Maire ou Gérald Darmanin –, le parti de la rue de Vaugirard, qui compte 103 députés, se porte pour l'instant mieux que le PS, réduit à un groupe de 30 élus.
Le 28  février, Emmanuel -Macron a donc " travaillé " la poutre en recevant à déjeuner à l'Elysée des LR ou ex-LR " constructifs " pour leur signifier qu'ils étaient les bienvenus dans une grande liste centrale pro-européenne. Le 18  avril, Edouard Philippe a invité les parlementaires normands, dont ceux de LR, à le rejoindre dans le jardin de -Matignon autour de petits fours et de deux ministres issus des -Républicains, Bruno Le Maire et Sébastien Lecornu.
Devant des proches, le maire de Bordeaux, Alain Juppé, acteur clé de cette recomposition, a récemment fait ce constat : " Avec Macron, on est en phase sur l'Europe. Sur les réformes économiques et sociales, on est bien en ligne. Mais il pourrait muscler davantage sur la sécurité. " " Le pragmatisme n'est pas un projet de société, c'est un outil de travail, mais ce n'est pas suffisant ", tance pour sa part le secrétaire général délégué de LR, Geoffroy Didier.
Il n'empêche, l'action d'Emmanuel Macron est approuvée par 54  % des électeurs de François Fillon lors de la dernière présidentielle, selon un sondage IFOP publié le 2  mai par Paris Match et Sud Radio. " Les européennes ne vont pas forcément être si propices à la recomposition : la droite peut y aller sous ses propres couleurs, c'est une élection à la proportionnelle, nuance un observateur avisé de la droite. Par contre, il va se passer des choses aux municipales, ça commence à travailler les maires LR : est-ce qu'il faut intégrer ou pas des candidats LRM ? " Question que des maires socialistes sortants pourraient eux aussi se poser.
Déporté vers sa droite par Emmanuel Macron, le président de LR, Laurent Wauquiez, se trouve quoi qu'il en soit en butte à la concurrence du Front national. Un parti qui ambitionne de -réduire le clivage politique à une opposition entre " nationaux " et " mondialistes ". " En marche !, c'est le nouveau nom de l'UMPS ", se réjouit Marine Le Pen, s'octroyant dans ce schéma le rôle de première opposante. Son conseiller spécial Philippe Olivier prédit : " Normalement, les européennes achèvent le travail de recomposition, et la séquence suivante des municipales, nous la lançons avec des Républicains plus que divisés. "
Le FN veut agréger des soutiensPour arriver à cette fin, le FN, qui entend prendre le nom de " Rassemblement national ", doit parvenir à agréger des soutiens, mais ces derniers ne pointent pas le bout du nez. Il y a quelques semaines, Marine Le Pen jugeait pourtant le rendez-vous européen " crucial " : " Macron est devenu le chef de file des mondialistes, il arrive à rassembler. Si nous, on rate le coche, on aura pour le moins des regrets. "
De l'autre côté du spectre, Jean-Luc Mélenchon entend lui aussi redessiner une nouvelle ligne de fracture. " Nous ne nous occupons pas de rassembler des étiquettes, nous voulons fédérer le peuple ", lance régulièrement le chef de file de La France insoumise. L'ancien sénateur socialiste ne veut plus entendre parler du clivage droite-gauche, estimant que le quinquennat de François Hollande a vidé le terme " gauche " de son sens. L'opposition se résumerait donc aux " élites " contre le " peuple ", les premières étant selon LFI parfaitement incarnées par le duo Macron-Philippe. -L'objectif final de Jean-Luc -Mélenchon consiste à faire de La France insoumise un mouvement politico-social, creuset de toutes les contestations, pour s'installer dans un duel à distance avec le chef de l'Etat.
En attendant, au moment de donner un grand coup de balai en  2017, comme il le rêvait, le député des Bouches-du-Rhône s'est fait doubler par l'ancien banquier. " Un jeune mec qui symbolise le dégagisme en costard cravate ", comme le résume un dirigeant de la droite.
Olivier Faye, Alexandre Lemarié, Abel Mestre, Cédric Pietralunga, Lucie Soullier et Astrid de Villaines
© Le Monde

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