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lundi 14 mai 2018

L'IFP, cette école laboratoire de l'union des droites......Génération identitaire passible de poursuites.....




13 mai 2018

L'IFP, cette école laboratoire de l'union des droites

Créé en 2004 à Paris, l'institut inspire l'académie politique que veut lancer Marion Maréchal-Le Pen à Lyon

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Un petit autocollant sur la porte d'entrée indique au visiteur qu'il est arrivé à destination : " Institut de formation politique " (IFP). Contrairement à certaines écoles privées qui affichent leur nom en grosses lettres pour mieux séduire le chaland, l'IFP mise sur la discrétion, comme pour ne pas déranger le voisinage dans ce quartier bourgeois qu'est le 16e  arrondissement de Paris. Dans certains milieux, la réussite se vit à l'abri des regards.
Fondée en  2004, cette institution connaît un essor inédit depuis quelques années, au point d'inspirer l'ancienne députée frontiste Marion Maréchal-Le Pen, qui entend lancer sa propre " académie de sciences politiques " à Lyon. Distincts, les deux projets ont en commun de vouloir former la jeunesse militante de droite et d'extrême droite, de lui offrir un cadre, un corpus idéologique, des références, des techniques de propagande, mais aussi de jeter des ponts entre les différentes sensibilités qui la composent, entre soldats d'une même bataille culturelle.
" Passage obligé "L'IFP " est en train de devenir un passage obligé pour tout mec de droite un peu sérieux ", assure Charles de Meyer, cofondateur de la controversée association SOS Chrétiens d'Orient. Assistant parlementaire de l'ancien député d'extrême droite Jacques Bompard, puis de sa successeure à l'Assemblée nationale, Marie-France Lorho, ce proche de l'Action française a été tour à tour auditeur puis intervenant à l'école. Outre des militants du groupuscule maurrassien, on trouve parmi les dizaines d'élèves qui se succèdent dans les locaux, séminaire après séminaire, des représentants du parti Les Républicains, du Front national, de Debout la France, quelques identitaires, d'anciens participants de La Manif pour tous mais aussi des jeunes dépourvus de tout engagement partisan.
Les prétendants doivent être âgés de 18 à 30 ans et se plier à un processus de sélection. En  2017, l'école affirme avoir reçu 420 candidatures pour 180 places. Les formations se déroulent le week-end, en complément des études classiques." C'est un lieu de rencontre, où se prépare la relève. L'IFP ne s'est jamais mise au service de tel ou tel, ce qui rassure les cadres d'en haut ", note Charles de Meyer. " C'est l'école des droites au sens large ", appuie le directeur de l'IFP, Alexandre Pesey.
A l'heure des balbutiements, il y a bientôt quinze ans, l'institution ne se voyait pourtant pas comme un laboratoire de la recomposition politique et de l'union des droites. Ses promoteurs tractaient plutôt à la sortie des écoles de commerce dans l'espoir d'attirer des jeunes désireux de porter haut le libéralisme économique, cet idéal célébré chez les Anglo-Saxons mais moins en cour en France.
Deux bonnes fées se sont penchées sur le berceau du nouveau-né : le groupe de pression Contribuables associés, qui lutte contre " l'oppression fiscale ", et la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (Ifrap), farouche lobbyiste en faveur de la baisse de la dépense publique. Le journal d'extrême droite Les 4 Vérités a aussi apporté son soutien au projet. Trois entités qui s'avèrent de redoutables spécialistes de la levée de fonds auprès des particuliers, soit le gros des ressources de l'IFP. Une technique importée des Etats-Unis, notamment des sphères républicaines et libertariennes.
Militants plus structurésPar la grâce d'amitiés bien placées, les premiers séminaires se sont organisés au château de Vaux-le-Vicomte (Seine-et-Marne). " Les promotions étaient assez différentes, peu de gens faisaient la synthèse. C'était soit des souverainistes, soit des libéraux, qui venaient avec leurs bouquins de Frédéric Bastiat - penseur libéral du XIXe  siècle - ", se souvient le président de l'Union nationale -interuniversitaire (UNI, syndicat étudiant de droite), Olivier Vial, qui a participé comme intervenant aux travaux de l'IFP. " Aujourd'hui, les militants ancrent davantage leur engagement sur une thématique en particulier que sur la fidélité à une famille de pensée, ajoute-t-il. Ils se définissent comme étant de droite, mais se montrent préoccupés par la famille, l'immigration, l'islam… "
La Manif pour tous, qui a éveillé de nombreux jeunes conservateurs à l'engagement politique, à partir de 2013, a représenté un -virage important dans l'histoire de l'école." Nous sommes passés de 100 candidats par an à 300 ", affirme Alexandre Pesey. La " crise migratoire " de 2015, dit-il, a aussi mobilisé tout un courant identitaire contre ce qu'il appelle " le grand effacement ".
L'IFP est devenu depuis un laboratoire du " libéral-conservatisme " et draine des militants des grandes écoles de plus en plus structurés idéologiquement. On leur apprend à s'exprimer dans les médias, à mobiliser des réseaux, à s'outiller pour débattre. Les stars du combat identitaire et anti-islam Eric Zemmour et Philippe de Villiers sont accueillis à bras ouverts comme " grands témoins ". Mais c'est la venue comme simple étudiante de l'ex-députée FN du Vaucluse Marion Maréchal-Le Pen, en  2015, qui braque vraiment les projecteurs sur l'école.
L'égérie de l'union des droites devient alors un argument promotionnel : des bannières sont créées avec son image, comme avec celles d'autres intervenants, tel le député du Loir-et-Cher Guillaume Peltier, vice-président de LR, venu en  2016. Lui ne partage pas l'objectif d'unir les droites, mais il assume de porter la bonne parole de son parti. " J'y suis intervenu avec la fierté de mes convictions, avec la ferme intention de leur donner envie de s'engager chez LR, plaide-t-il aujourd'hui. Cela ne me choque pas qu'on y retrouve des sensibilités différentes. Mon ambition, c'est d'aller recruter partout. " Invité lui aussi, le président des Républicains, Laurent Wauquiez, n'a pour l'heure jamais fait le déplacement, et ne devrait pas le faire, assure son entourage.
A sa manière, l'institution est venue pallier le déficit de structures dans les partis politiques pour former les cadres et militants. Les jeunes LR se dispersent en différents campus chaque année, et la direction du parti commence tout juste à lancer un projet d'école des cadres ; le FN, lui, n'a jamais vraiment investi ce chantier.
Très proche de LR, l'UNI – où le directeur de l'IFP, Alexandre Pesey, a milité – est plus avancée dans ce domaine, mais le syndicat étudiant a fortement incité ses troupes à toquer à la porte de l'IFP. Toujours avec la même logique : planter des graines pour le futur. Un ancien militant de La Manif pour tous veut croire que le temps joue en leur faveur : " Nous en sommes à la deuxième étape, en floraison printanière. On voit les fleurs, pas encore les fruits. " Les jardiniers seront en tout cas à pied d'œuvre.
Olivier Faye
© Le Monde



13 mai 2018

Génération identitaire passible de poursuites

La chancellerie a rappelé l'existence d'infractions visant les comportements hostiles à la circulation des migrants

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C'est un rappel de la loi qui a relancé la polémique. Le procureur de Gap, Raphaël Balland, a dû révéler, vendredi 11  mai, l'existence de plusieurs procédures à l'encontre du groupe Génération identitaire (GI) après la publication d'une circulaire du ministère de la justice, révélée par Mediapart mercrediet que Le Monde a pu consulter. Publié le 4  mai, le texte rappelle à tous les procureurs du pays l'existence d'infractions " visant les comportements hostiles à la circulation des migrants ".
Une semaine plus tôt, M.  Balland avait classé sans suite une enquête (la seule connue jusqu'alors) ouverte après que des militants liés au groupe d'extrême droite s'étaient enorgueillis d'avoir " raccompagné " des migrants à la frontière franco-italienne dans la nuit du 26 au 27  avril. Ils faisaient parler d'eux depuis le 21  avril, date à laquelle ils avaient bloqué un col des Hautes-Alpes à l'aide de grillage en plastique pour empêcher des migrants d'entrer sur le sol français. Le parquet n'avait pas précisé les faits qui auraient pu apparaître comme délictueux, et avait déclaré qu'" aucune infraction "n'avait été constatée.
Il en existe pourtant, selon le ministère, qui se défend toutefois d'avoir voulu intervenir dans cette affaire. " A la suite de plusieurs incidents en lien avec des passages à la frontière de migrants, plusieurs procureurs avaient interrogé la chancellerie par l'intermédiaire des procureurs généraux, a expliqué au Monde Rémy Heitz, auteur de la circulaire et directeur des affaires criminelles et des grâces au ministère. Ces textes sont rarement appliqués, notre objectif était de rappeler l'Etat du droit afin que l'Etat puisse apporter une réponse coordonnée. "
Présence de militantsLa circulaire – qui rappelle également les délits dont sont passibles les personnes qui viennent en aide aux migrants et les immunités dont elles peuvent bénéficier – fait référence à deux infractions du chapitre usurpation de fonction du code pénal qui -permettraient de poursuivre les militants identitaires.
La première," l'immixtion dans une fonction publique ",est passible de trois ans d'emprisonnement et de 45 000  euros d'amende. " Le contrôle du respect des frontières, par la surveillance visuelle, ou l'édification d'obstacles, par des personnes hostiles à la circulation des migrants (notamment des militants se revendiquant de la mouvance identitaire) " sont susceptibles de caractériser ce -délit, tout comme " la reconduite à la frontière des migrants (…), y compris sans violence ".
Aux militants identitaires, qui estiment que le code pénal les autorise à " appréhender l'auteur d'une infraction flagrante punie d'une peine d'emprisonnement " (article  73),ce qui est le cas de l'entrée irrégulière sur le territoirela circulaire répond que l'action doit pour cela être " isolée ". " Dès qu'une opération de contrôle ou de surveillance est organisée, on est dans de l'immixtion de fonction publique, et l'Etat ne peut pas le tolérer ", nous précise M.  Heitz.
Le document mentionne une seconde possibilité de poursuites, au titre de " l'exercice d'une activité ou l'usage de document créant la confusion avec une fonction publique ", passible d'un an de prison et de 15 000  euros d'amende.
Mais pour l'heure, Génération identitaire, dont aucun militant n'a été interpellé, dit poursuivre sa " surveillance " dans les Alpes, et les associations d'aide aux -migrants confirment la présence de militants.
Pour se défendre d'être " inactif " dans ce dossier, le procureur de Gap a décidé de " lever le -secret des enquêtes ". Dans un -communiqué, vendredi, il a précisé que l'enquête classée le 27  avril n'avait pour but que de vérifier si les militants identitaires" avaient commis des violences ou proféré des menaces ou tenu des propos racistes ",ce qui a rapidement été écarté.
Mais le procureur a affirmé ne pas s'en être tenu là. Le parquet a aussi demandé aux forces de l'ordre " d'ouvrir des enquêtes du chef d'usurpation de fonctions ". A ce jour," aucune infraction n'a été -relevée du chef d'activité créant une confusion avec une activité publique ", selon le communiqué. M.  Balland a également révélé avoir demandé l'ouverture d'une enquête préliminaire du chef d'immixtion dans une fonction publique, dont les investigations sont en cours. Il décidera ensuite si " le délit d'usurpation dans une fonction publique est suffisamment caractérisé pour en poursuivre les auteurs identifiés ".
Ces éléments n'ont qu'à moitié rassuré les associations. " Nous avions déjà connaissance de ces textes et nous travaillons depuis des semaines à la collecte de témoignages, en lien avec d'autres associations et des avocats, explique Agnès Antoine, du pôle juridique du collectif Tous Migrants. Nous nous préparons à un nouveau classement sans suite. Nous étudions la possibilité de porter plainte et de nous constituer partie civile, mais nous voulons pour cela les éléments les plus solides possible. "
Malgré le communiqué du -procureur, le collectif s'insurge -contre le " deux poids deux mesures " du parquet, qui a engagé le 23  avril des poursuites contre des militants venus en aide aux migrants. Ils seront jugés fin mai pour " aide à l'entrée d'étrangers en situation irrégulière et en bande organisée ".
Éléa Pommiers
© Le Monde

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