Au terme de quatre jours de garde à vue, huit hommes âgés de 17 à 29 ans, dont trois mineurs, ont été mis en examen samedi 21 octobre, dans l'enquête sur l'organisation fondée par Logan N., ce jeune militant d'extrême droite dont Le Monde a reconstitué le parcours. Ils doivent répondre du chef " d'association de malfaiteurs terroriste criminelle ". Deux d'entre eux ont également été mis en examen pour vol de véhicule en relation avec une entreprise terroriste.
Conformément aux réquisitions du parquet de Paris, six ont été placés sous mandat de dépôt, un a été incarcéré provisoirement à la suite de sa demande de délai pour préparer sa défense et un mineur a été placé sous contrôle judiciaire.
Logan N. avait été interpellé fin juin, à Vitrolles (Bouches-du-Rhône), car soupçonné d'avoir des projets d'actions violentes contre des migrants ou des hommes politiques. L'enquête avait débuté, mi-mai, par un simple -signalement pour apologie du terrorisme après la découverte d'une page Facebook administrée par ses soins à la gloire du tueur norvégien Anders Breivik.
Mais les investigations ont mis au jour, depuis, des ambitions violentes plus élaborées. Selon nos informations, la plupart des jeunes hommes mis en examen ont reconnu, lors de leurs auditions, avoir songé à en venir aux armes pour défendre leurs idées nationalistes, et plus particulièrement au sein du groupuscule que Logan N. était en train de monter. Les contours de leurs actions éventuelles étaient toutefois
" imprécis ", précise-t-on de source judiciaire.
Le groupe dont ils se sont réclamés était baptisé " OAS ", en référence à l'Organisation de l'armée secrète, responsable d'une cam-pagne sanglante contre l'indépendance de l'Algérie au début des années 1960. L'OAS avait des statuts, un organigramme, même une " raison sociale " :
" enclencher la remigration " de la France. Selon des informations du
Monde, Logan N. s'en voulait le " régent ". Des uniformes avaient été imaginés : des tenues militaires avec béret.
Détention légale d'armesLes cibles potentielles de " l'OAS " étaient diverses : le marché aux puces de Marseille, un restaurant indien d'Aix-en-Provence ou des personnalités politiques telles que le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, et le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner. Certains membres du groupuscule ont reconnu que des militants d'extrême gauche " antifascistes " auraient pu faire aussi partie de leurs cibles. Mais sans toutefois fournir de nom.
Selon une source proche du dossier, l'enquête a permis d'établir que Logan N. et deux autres individus interpellés avaient volé un véhicule, le 21 juin, dans l'idée de racketter des chefs d'entreprise afin de financer leur organisation et d'acheter des armes. Un réquisitoire supplétif a ainsi été pris aux fins de leur mise en examen du chef de
" vol en relation avec une entreprise terroriste ". Parmi les dix personnes interpellées, deux ont toutefois été remises en liberté sans poursuite, dont la mère de Logan N.
Selon nos informations, les perquisitions ont permis de retrouver des armes chez plusieurs des hommes arrêtés. Des armes toutefois toujours détenues légalement, nombre d'entre eux étant des pratiquants de tir sportif ou des amateurs d'airsoft (jeu d'équipes en plein air avec des répliques d'armes à feu). Un des interpellés, domicilié à Forcalquier, bourgade du Luberon dont M. Castaner était maire jusqu'en juillet, avait plusieurs fusils et armes de poing chez lui. Des armes qui appartenaient cependant administrativement à son frère, amateur de ces disciplines. Du matériel informatique a aussi été saisi.
Dans le cadre d'une affaire de destruction de radar remontant à 2013 – mais non encore jugée –, le profil de Logan N. avait déjà inquiété la justice. A l'époque, le jeune homme était mineur et avait participé, avec d'autres militants d'extrême droite appartenant aux Jeunesses nationalistes, à la destruction par incendie d'un radar automatique aux Pennes-Mirabeau (Bouches-du-Rhône). L'examen de sa personnalité avait révélé un enfant
" introverti ", souffrant beaucoup de ses
" per-sécutions " à l'école primaire, au point de songer au
" suicide ". Ce qui avait alerté ses parents et ses enseignants.
A cette période-là, il déclarait ne fréquenter que des personnes
" plus âgées " et
" passer la plupart de son temps devant l'ordinateur ". L'éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse avait toutefois fini par conclure que les faits reprochés étaient un
" acte isolé " et que
" l'adolescent tenait un discours cohérent, semblant présenter de sincères regrets ".
Luc Leroux (à Marseille), et Elise Vincent
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