Qui a dit que Macron marquait des points?
Au contraire, l'ensemble de sa politique va provoquer un affrontement social. Il cumule les ordonnances anti travail, lesquelles ne sont pas encore ratifiées et vont mettre des mois à diffuser leur poison et l'adoption d'un budget d'austérité mortifère qui va casser toutes nos cotisations sociales, mettre fin à notre salaire brut en janvier. Et la destruction de l'ISF, des APL, des logements sociaux, des emplois aidés, la mise à mal des budgets des hôpitaux, des collectivités territoriales, la suppression du tiers payant, le blocage des salaires, le CIVCE prolongée avec 10 milliards de plus à rembourser aux multinationales, le fiasco complet sur les travailleurs détachés, les insultes contre les "fainéants", les grévistes, les choix d'une "France start up" contre une France industrielle et contre le salariat tel qu'il est, tout cela va progressivement assécher l'économie de notre pays, accroitre le chômage de masse et les inégalités, la misère, et susciter une lecture brutale de masse de la nature de ce pouvoir arrogant, entièrement dévoué à la finance.
Macron est irresponsable, au sens littéral du terme, il n'a pas de base sociale, ni à gauche, ni à droite, il n'y a pas de "centre", Macron, c'est Thatcher, brutal et féroce. Mais, mal élu, il repose sur une tête d'épingle, et bien mal lui en prend de s'attaquer à la société dans son ensemble.
Bien sur qu'il ne fallait pas s'attendre à une succession de manifestations montantes répétées 14 fois comme en 2016 contre la loi El Khomri. Les 3,5 millions de manifestants qui y ont participé au moins une fois, l'an passé, ont de la mémoire: nous avions 80 % de l'opinion pour nous et nous n'avons pas gagné, Hollande ayant pris la lourde responsabilité de refuser d'entendre cette majorité là, pourtant puissante.
Je l'ai dit dés juin, répété en juillet, redit en août et en septembre, les cortèges ne suffiront pas, et comme des millions de gens le sentent bien, ils n'y participent que modérément. D'abord parce qu'il y a division syndicale. Aussi parce qu'il y a division politique et aucune issue alternative suffisante et unitaire à gauche. Enfin parce que pour affronter Macron, élu de mai juin, c'est un mouvement d'ensemble bien plus grand et plus radical qui est nécessaire.
Mais ca ne veut pas dire que des millions de gens ne sont pas déjà conscients, pas en colère et qu'ils ne cherchent pas une issue radicale: mais ils cherchent l'occasion et les moyens de s'opposer efficacement à Macron. C'est explosif. Macron suscite une haine en profondeur, et dans tout le pays, ca va se sentir en même temps qu'il provoque des dégâts sociaux et le salariat, acculé à se défendre, qui n'a pas d'autre choix, sauf de tout perdre, se cherche les moyens de faire exploser la politique thatchérienne qui s'abat sur lui.
Je ne crois pas que notre ami Mélenchon comprend cela, il a un comportement erratique. Le voilà qui, dés juillet appelle solitairement, avec ses seuls amis, à une manifestation politique concurrente des syndicats le 23 septembre de facto contre la date du 12 septembre.
Puis il comprend, un peu, comme à regret, que les syndicats ont la main et essaie de participer avec eux, d'élargir les rangs de ses amis mais sans discuter, négocier, unifier. Puis il fait une charge contre les syndicats, exprimant sa déception à leur égard et donc les accusant d'échouer (ce qui tombe à contre sens alors que la division et l'unité syndicale si précieuse et nécessaire a du mal a se bâtir, avec FO, avec la CFDT...).
Puis, il
déclare que la bataille est perdue et que Macron a gagné. A qui ca sert de dire cela?
Aucun responsable ne devrait se comporter ainsi. La construction d'une mobilisation de masse unitaire ne dépend jamais des seules humeurs, pour le coup personnelles et versatiles, d'un responsable, semaine après semaine. Au contraire, espérons qu'il ne soit pas trop entendu, car de cette façon, il ne risque que de lui nuire.
Tout le travail militant syndical n'est pas encore fait contre les ordonnances anti travail. Il faut expliquer, expliquer, encore expliquer.
Aucune manifestation vraiment unitaire n'a encore eu lieu: FO a résisté, mais ne vient en tant que telle que le 16 novembre, la CFDT est travaillée au corps mais hésite.
La perception de l'attaque, tellement énorme, contre le salaire brut et notre système entier de protection sociale reste à venir (et le programme "AEC" de FI n'y aide pas du tout).
La jeunesse commence seulement à bouger, et les grèves ne font que commencer. Notons que les routiers et les dockers, eux, en menaçant de tout bloquer, sont les seuls à avoir gagné (comme les intermittents en avril 2016).
Quand on est militant politique à gauche, travaillons à faire les gestes indispensable qui unifient celle ci, il faut déclarer l'état d'urgence contre Macron et appeler sans réserves toutes les forces disponibles, à un grand collectif national permanent pour le vaincre. Que des millions de gens puissent voir qu'il y a une volonté politique, une issue alternative unie, forte et disponible.
Quand on est syndicalistes, (et sans syndicats indépendants et unis nous ne ferons rien, ne réussirons rien) il faut faire le travail d'explication et de mobilisation quotidien dans les entreprises, tracts, vidéos, réunions, assemblées générales, il faut emporter l'unité. Actuellement on a entre 70 et 80 % de mouvement syndical acquis contre Macron, il faudrait en emporter 100 %, lui enlever ses derniers soutiens hésitants.
Et alors, il faut diffuser l'idée que les manifestations sont nécessaires mais que la construction d'un mouvement d'ensemble l'est encore plus. Certes l'occupation des entreprises ne se décrète pas, cela ne dépend pas d'un seul mot d'ordre, ce ne fut le cas ni en mai 36 ni en mai 68. Mais quand c'est mûr, c'est mûr et cela se produit. C'est autre chose que "nuit debout" et l'occupation des places de la République, car l'occupation des entreprises, c'est la crainte majeure du patronat, c'est leur pognon, leurs biens, qui sont en jeu, dans ce cas-là ils négocient et sont capables, réalistes, de dire à leur créature Macron qu'il faut arrêter.
Il faut que le climat mûrisse en ce sens. Il faut donner confiance, confiance, confiance, dans la possibilité de lutte et de victoire. Il faut lever les doutes, les craintes, tracer les voies du mouvement d'ensemble. Finalement, dans l'histoire de France, c'est chaque fois ainsi qu'on a gagné. Nous sommes dans une circonstance et un affrontement historique exceptionnel, instinctivement le salariat le sait déjà et le comprend, il n'est pas temps de concéder des points à l'ennemi de classe. Ce n'est pas un jeu à points. C'est une guerre sociale, notre tâche à toutes et à tous, n'est donc pas de compter les points, c'est de rassembler, unifier et mobiliser notre camp.
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