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mardi 24 octobre 2017

Benoît Hamon relance son mouvement, M1717, et explique qu'il veut travailler avec l'ensemble de la gauche

 
24 octobre 2017

" Construire une nouvelle synthèse politique "

Benoît Hamon relance son mouvement, M1717, et explique qu'il veut travailler avec l'ensemble de la gauche

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Benoît Hamon veut passer un cap. Plus de trois mois après avoir quitté le Parti socialiste, il -entend désormais structurer son Mouvement du 1er  juillet (ou M1717) – qui doit changer de nom. L'ancien candidat à la présidentielle a entamé un tour de France, plusieurs personnalités socialistes l'ont rejoint récemment et un questionnaire est mis en ligne lundi 23  octobre sur le site du M1717 pour en définir les objectifs politiques et son fonctionnement interne. M.  Hamon revendique une place centrale à gauche et veut poser des " actes de résistance communs ", notamment avec Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise).


Comment le Mouvement du 1er  juillet se porte-t-il ?

Le défi pour nous est moins de croître que de structurer. Nous grandissons déjà rapidement, mais si mille fleurs doivent s'épanouir, elles ne doivent pas faner trop vite. D'où mes déplacements nombreux en province, récemment Nantes, Grenoble et Toulouse. J'en ferai deux à trois par -semaine jusqu'à la fin de l'année.


Comment avez-vous été -accueilli ?

Nous avons un très bon accueil dans les universités. Quand je me déplace, les amphis sont pleins. Je rencontre aussi des militants associatifs, des acteurs de gauche départementaux, des communistes, des écologistes, des socialistes.


Des " insoumis " aussi ?

Oui, Manuel Bompard - dirigeant de La France insoumise - est venu à Toulouse. Nous l'avons invité, il a joué le jeu et a été abondamment applaudi. Notre stratégie repose sur deux pieds. Résister, et si possible ensemble. Nous devons le faire en posant des actes politiques. Ensuite, en menant une bataille culturelle de gauche pour faire évoluer des cadres conceptuels qui freinent parfois l'adhésion à notre projet.


Par exemple ?

Le rapport au travail. Nous proposons qu'à côté du travail salarié, il y ait d'autres formes de reconnaissance du rôle des individus dans la société, par le revenu universel. Comment changer de modèle de développement sans s'intéresser à l'entreprise. Nous croyons nécessaire de développer les modèles entrepreneuriaux qui s'intègrent dans la transition écologique et le progrès social.
Une consommation raisonnée, l'usage plutôt que la propriété, sont des voies que nous voulons proposer en guise d'alternative au consumérisme et au productivisme qui accélèrent le réchauffement climatique et détruisent la biodiversité. La persistance insupportable des discriminations et des inégalités femmes-hommes appelle également un combat résolu pour améliorer l'harmonie de la société française.


A ce propos, que pensez-vous de la libération de la parole sur le harcèlement sexuel avec le hashtag #balancetonporc, depuis les révélations sur -Harvey Weinstein ?

Le problème, ce sont les violences faites aux femmes, pas le nom du hashtag comme je l'ai lu ici ou là ! Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet, réfléchi à la manière de prévenir ces comportements en notre sein et créé un fonds de solidarité, à l'intérieur du mouvement, pour accompagner les femmes victimes. Nous prenons cela très au sérieux.


Combien d'adhérents et de groupes locaux revendiquez-vous ?

Nous revendiquons 30 000 mem--bres, inscrits depuis juillet sur le site Internet. Plus de 500  comités locaux se sont créés et beaucoup sont en cours de validation. D'où l'importance de la structuration pour accélérer les choses !


Vous publiez, lundi 23  octobre, un questionnaire sur le site de votre mouvement. Qu'en espérez-vous ?

Nous avons un double objectif. Une consultation de tous ceux qui souhaitent construire quelque chose de neuf à gauche, donc bien sûr nos membres, mais pas seulement. Il est accessible jusqu'au 20  novembre. Un questionnaire papier existera aussi, ce qui permettra une campagne " physique ", en porte-à-porte ou sur les marchés. Cela va aboutir à ce grand moment de fondation, le week-end du 2 et 3  décembre, où l'on fixera la charte qui définit nos principes ainsi que les éléments principaux de notre stratégie.
Deuxième élément, notre démocratie interne : quel sera notre fonctionnement, comment concilier l'horizontalité avec l'efficacité ? A nos yeux, seule une démocratie exemplaire le permet.


Ce ne sera donc pas un -mouvement " gazeux " comme M. Mélenchon qualifie La France insoumise ?

Différent. Ni " gazeux " ni un mouvement en T avec un puissant levier vertical pour tenir et contrôler la " base ". Il n'y aura pas de peur du vote. Notre culture politique part de la confiance que nous plaçons dans le citoyen et son intelligence. C'était déjà le sens de la méfiance que j'ai exprimée durant la présidentielle avec le principe de l'" homme providentiel " qui, à mes yeux, infantilise la politique. Un principe fort nous réunit, le désir de coopé-ration, de rassemblement, de -poser des actes de résistance -communs avec l'ensemble des formations progressistes.


Entretenez-vous de bonnes -relations avec M. Mélenchon ?

On se parle de dirigeant poli-tique à dirigeant politique. C'est un homme intelligent, que je respecte. Nos relations sont apaisées, sereines, normales.


Quel regard portez-vous sur le Parti socialiste ?

L'appareil du parti pourra survivre. Mais la social-démocratie, dans le rôle qui était le sien, celui d'une force politique qui organisait le compromis entre le capital et le travail et qui permettait aux travailleurs de bénéficier d'une partie des dividendes de la croissance, ce rôle-là s'est éteint. La loi El Khomri - loi travail - et le CICE - crédit d'impôt compétitivité emploi - illustrent l'extinction de ce courant politique et philosophique.


La social-démocratie à la française est morte ?

Le cycle historique de la social-démocratie européenne s'achève. C'est une invitation à repenser le progrès. Il faut construire une nouvelle synthèse politique entre une tradition socialiste, celle de l'écologie politique, une nouvelle approche de la croissance… Je ne crois plus à la fable selon laquelle le chômage se réduira en agrandissant le gâteau de la production. Nous pensons aussi que la société salariale est en crise, que le travail continuera à se raréfier sous l'impact de la révolution numérique et qu'il faut donc repenser la place du travail dans nos sociétés. Je pense que sur ce point, nos différences avec Jean-Luc Mélenchon sont substantielles.


Que dites-vous à vos amis qui restent au PS ?

Ils restent mes amis. Chacun doit prendre ses risques. Je ne suis pas un gourou. Certains veulent attendre le congrès en pariant sur des jours meilleurs à venir. J'ai connu ce supplice de l'espérance… Ce cadre-là n'est plus le bon, même si j'ai un immense respect pour le PS et pour ses -militants. Si j'ai décidé de quitter le Parti socialiste seul, c'est que je n'aurais eu aucune crédibilité si j'avais eu un pied dedans, un pied dehors. Je n'étais pas dans une -démarche de fraction.


N'êtes-vous pas isolé ?

En termes de popularité, ce n'est pas le cas ! La direction du Mouvement du 1er  juillet, une petite trentaine de personnes, est composée pour moitié de politiques chevronnés et pour l'autre moitié d'acteurs associatifs, politiques de terrain. Nous ne sommes pas obsédés par l'idée de faire des " prises " en ralliant telle ou tel. Nous voulons surtout faire émerger des personnalités nouvelles.


Quelles sont vos relations avec les écologistes ?

J'ai de très bonnes relations avec David Cormand - secrétaire national d'Europe Ecologie - Les Verts, EELV - . Je comprends que plusieurs lignes cœxistent sur l'at-titude à adopter vis-à-vis de nous. Leur congrès tranchera sans doute cette question.


Les prochaines échéances sont les élections européennes de 2019. Allez-vous présenter des listes ? Beaucoup parlent d'une alliance avec EELV et l'ancien ministre grec Yanis Varoufakis…

Aujourd'hui, il y a ceux qui disent, comme Emmanuel Macron, " Vive l'Europe ! ", mais sans faire de politique. En s'alignant sur l'austérité et en continuant le libre-échange qui a asséché l'Europe du Sud. Il y a aussi chez certains cette tentation de faire de la politique sans l'Europe. C'est le -discours très critique à gauche qui juge que c'est l'Europe qui est devenue le problème, pas le néolibéralisme en son sein et qu'il n'y aurait plus de solution européenne.
A contrario, d'autres pensent possible de réconcilier Europe et progrès. Je suis attentif aux pro-positions formulées par Yanis -Varoufakis, avec qui j'ai dîné à -Paris il y a quelques jours. Nous croyons nécessaire de proposer une stratégie européenne transnationale, anti-austéritaire et progressiste, avec un agenda politique commun aux Européens. J'ai envie de relever ce défi.


Serez-vous candidat aux élections européennes ?

Je ne réfléchis pas à ça. Je suis dans autre chose, la fondation du Mouvement du 1er  juillet et la régénération de la gauche m'occupent totalement.
Propos recueillis, par Abel Mestre
© Le Monde

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