Trump. Le nom le plus ressassé partout sur la planète, des milliards et des milliards de fois, le bruissement planétaire d’un film d’horreur. Ton paniqué, dégoûté, révolté mais aussi ébloui, ravi, réjoui. Trump. 47e président des États-Unis élu le 5 novembre 2024 « haut la main ». Une expression qu’un mauvais esprit pourrait rapprocher d’un salut nazi.
Trump, qui est dans l’outrance, suscite l’outrance. C’est sa combine, plus c’est gros, plus ça choque, plus ça marche. Les Haïtiens de Springfield (Ohio) « mangent les animaux de compagnie des gens qui vivent là-bas », ou bien c’est les enfants qui peuvent subir des chirurgies de transition de genre pendant leur journée à l’école. Votre fille revient de l’école transformée en garçon.
Au cours de la campagne, son adversaire démocrate Kamala Harris l’a qualifié de « fasciste ». Le mot est si usé qu’il n’a plus guère de sens sauf si on revoit l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021.
L’historien Robert Paxton y voit les ingrédients du fascisme : autorité, ordre, peur du déclin et de l’autre.
Aujourd’hui, c’est un cabotin revanchard avec tous les pouvoirs qui est à la tête de la première puissance militaire mondiale.
Mais qui a voté pour Trump et pourquoi ?
Chiffres et commentaires circulent à gros bouillon. En dehors du nouveau flop des sondages et des médias, on peut déjà retenir que les classes populaires « invisibilisées », en difficulté économique et sociale, constituent la majorité de son électorat, surtout les « sans diplômes » et plus seulement les électeurs blancs. Il progresse notamment chez les Latinos.
Les migrants des premières et deuxièmes générations s’inquiètent en effet de l’immigration clandestine, d’où sa promesse d’expulser 13 millions de clandestins, une déportation historique. Selon un sondage, 50 % des Américains y seraient favorables.
En bon démagogue, Trump sait canaliser les griefs sociaux contre l’arrogance des progressistes « wokistes » déconnectés des réalités, ces diplômés urbains pour qui les électeurs de Trump sont des beaufs racistes, homophobes, virilistes et amateurs d’armes. Il canalise aussi la colère sociale contre le parti de Wall Street et de l’impérialisme économique qui est pourtant son propre monde. Et en même temps, il reprend des thèmes délaissés par la gauche, comme le souverainisme économique. Le milliardaire en col bleu récupère l’opposition working class contre l’idéologie du libre-échange.
Il ne faut pas croire que la gauche est inimaginable pour ces Américains. En 2016, Bernie Sanders a eu un grand succès populaire avec un programme « démocrate socialiste » qui portait sur la santé et l’éducation. Concurrent d’Hillary Clinton, c’est elle qui lui a été préférée par le Parti démocrate et qui a été battue par Trump en novembre 2016.
Aujourd’hui, huit ans plus tard, c’est le sénateur Bernie Sanders qui résume : « il ne devrait pas être surprenant qu’un Parti démocrate qui a abandonné la classe ouvrière se rende compte que la classe ouvrière l’a abandonné ».
Un message qui sonne juste pour beaucoup et qui a été vu des millions de fois sur les réseaux. Notre Mélenchon hexagonal ne dit pas autre chose, « les USA ne pouvaient pas choisir la gauche : il n’y en avait pas ».
Et Bernie Sanders poursuit : « les grands intérêts financiers et les consultants bien payés qui contrôlent le Parti démocrate tireront-ils les véritables leçons de cette campagne désastreuse ? Comprendront-ils la douleur et l’aliénation politique que vivent des dizaines de millions d’Américains ? (…) Probablement pas. »
On comprend que tout ça ressemble beaucoup à ce qui se passe de ce côté-ci de l’Atlantique, vraiment beaucoup. C’est une lente et profonde séparation entre la classe populaire et la bourgeoisie urbaine instruite et « de gauche » qui ignore « ces gens-là » ou qui parle en leur nom avec une vertueuse commisération. C’est ce qui se passe en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie, etc. entre les « minorités civilisées » et les catégories populaires depuis des années, ce qui contribue grandement à l’adhésion populaire aux partis d’extrême droite.
Pourquoi les pauvres votent à droite. Pourquoi les riches votent à gauche. Avec ces deux livres fameux, le journaliste américain Thomas Frank a montré ces puissants phénomènes d’abandon et de mépris de la classe populaire par la bourgeoisie culturelle de gauche ou d’extrême gauche. Nous l’avions reçu en 2018 avec Serge Halimi et Benoît Bréville. Une excellente façon de comprendre comment Donald Trump en est arrivé là et de commencer à mettre au point la meilleure façon d’en soulager cette planète sans tarder.
Accompagné par ceux pour qui être de gauche est une façon très agréable d’être de droite.
Daniel Mermet
Pour à peine le prix d’une bière par mois…
C’est clair, les médias jouent un rôle capital dans la montée de l’extrême droite. Capital, c’est le mot. En France, neuf milliardaires contrôlent 80 % des médias. Contre ces influenceurs de plus en plus puissants, les médias indépendants résistent difficilement. C’est pourtant un rempart important qu’il vous appartient de faire vivre et de développer.
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Pourquoi les riches votent à gauche
Pourquoi les pauvres ont (encore) voté pour Donald Trump ? Une émission de 2018 avec le journaliste américain Thomas Frank, Serge Halimi et Benoît Bréville du Monde diplomatique : la-bas.org/la-bas-magazine/entretiens/Pourquoi-les-riches-votent-a-gauche
En France, qui a peur du grand méchant Trump ?
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Mort de Madeleine Riffaud, sentinelle d’un siècle de tempêtes
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De Lénine à Lennon, « Working Class Hero » !
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Merci Quincy Jones !
Le musicien Quincy Jones a replié sa trompette. Hommage en musique avec Henri Salvador et Miles Davis : la-bas.org/la-bas-magazine/la-musique-de-la-bas/merci-quincy-jones
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