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La voie étroite de Collomb pour conserver Lyon
L’ancien ministre de l’intérieur a retrouvé lundi son siège de maire avec sept voix de moins qu’en 2014
En retrouvant son fauteuil de maire de Lyon, lundi 5 novembre, au terme d’un conseil municipal extraordinaire sans grand suspense, Gérard Collomb a immédiatement pu mesurer à quel point il lui faudra s’accrocher, et manœuvrer, pour se maintenir aux prochaines échéances municipales de 2020. L’ancien ministre de l’intérieur a été réélu à la tête de la deuxième ville de France avec 41 voix, sur les 73 que compte le conseil municipal. Son seul challenger, Denis Broliquier (Union des démocrates et indépendants), a obtenu les huit voix de son groupe.
Mais M. Collomb a perdu sept voix par rapport à son élection de mars 2014. En dehors des quatorze abstentions, issues principalement des rangs du groupe Les Républicains (LR) et d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), le scrutin a été marqué par dix votes blancs, dont certains issus de sa majorité. Un signal d’alarme qui conforte l’intuition du maire qu’il était plus que temps de reprendre la main, après dix-huit mois passés Place Beauvau.
L’appel du premier secrétaire de la fédération socialiste du Rhône à lui faire barrage n’a eu qu’une portée limitée au sein d’un conseil municipal où le jeu des appartenances tourne au casse-tête. Entre anciens du PS devenus membres de La République en marche (LRM), socialistes, centristes fidèles ou hésitants, écologistes fracturés, la ville de Guignol tient du théâtre d’ombres.
Dans ce contexte, Gérard Collomb veut capter la lumière sur son nom. L’ancien ministre de l’intérieur est déjà reparti en campagne, en annonçant qu’il ne se réclamerait d’aucune étiquette partisane, selon la stratégie qui lui avait réussi à la précédente élection. Persuadé que sa popularité est intacte, le maire de Lyon se délecte des selfies qu’on lui réclame à chacune de ses sorties. Dès son retour de Paris, il a multiplié les apparitions dans les manifestations publiques. « Dans les mois à venir, il ne va pas rater beaucoup d’inaugurations »,pronostique un proche conseiller.
Gauche en ordre dispersé
M. Collomb est crédité de 31 % d’intentions de vote au premier tour des prochaines municipales, selon le sondage IFOP-Fiducial pour le magazine Lyon Capitale, effectué début octobre. Un score encourageant – il est largement devant ses concurrents – mais tempéré par les 57 % d’électeurs qui souhaitent qu’il « passe la main à une autre personnalité ».
En deuxième position, le candidat de la droite ne dépasse pas les 18 %. La gauche totalise pour sa part 40 %, mais elle se présente en ordre dispersé, entre militants écologistes, partisans de La France insoumise (LFI) et socialistes.
Gérard Collomb va devoir conserver son avance, en évitant les écueils du mandat de trop. Et ses adversaires l’ont bien compris. Pour mettre en doute son dynamisme, le chef de file du groupe LR, Stéphane Guilland, rappelle malicieusement que l’âge de M. Collomb, 71 ans, évoquait celui de Raymond Barre lors de la campagne de 1995. « Que faut-il en déduire aujourd’hui ? », a-t-il ironisé lors de son intervention au conseil municipal extraordinaire.
Le centriste Denis Broliquier lui reproche la manière dont il a démissionné de son poste de ministre de l’intérieur « pour assouvir [ses] ambitions personnelles, sans aucun respect du devoir d’Etat ». A l’autre extrémité de l’échiquier politique, Nathalie Perrin-Gilbert (groupe Lyon citoyenne et solidaire) rappelle le discours du candidat Macron sur le renouvellement des hommes et des partis : « Le moment est venu d’honorer la promesse macroniste. »
« Je n’ai pas consacré toute ma vie à cette ville pour la conquérir, par goût immodéré du pouvoir, mais pour porter une vision », répond M. Collomb, visage crispé, dès son premier discours de maire réélu. Le maire de Lyon avait l’habitude de balayer la critique d’un revers de main, assurant que le public se souciait peu des états d’âme du microcosme. Cette fois, il prend soin de rendre hommage au « sens du dialogue » de son premier adjoint, Georges Képénékian, qui a assuré fidèlement l’intérim, pour en tirer une leçon : « Peut-être ai-je là pour l’avenir un sujet d’inspiration nouveau. »
Resserrer les rangs
Gérard Collomb entend mettre à profit les mois à venir pour resserrer les rangs. Lundi, tous les membres de sa majorité étaient debout pour applaudir son discours, dans l’hémicycle municipal. Excepté Thierry Philip (PS), ancien maire du 3earrondissement, qui garde ses distances, sans pour autant se déclarer opposant. A gauche, aucun leader n’émerge pour oser défier M. Collomb.
Si la gauche reste dispersée, à droite le brouillard n’est pas dissipé. Le maire (LR) de Divonne-les-Bains (Ain), Etienne Blanc, 64 ans, s’est officiellement déclaré. La droite lyonnaise a appelé de ses vœux l’arrivée du premier vice-président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, bras droit de Laurent Wauquiez.
Une cinquantaine d’élus de l’agglomération ont tenu une réunion commune pour soutenir la candidature de l’avocat natif de Givors (Rhône). Mais pas un seul des onze élus du groupe LR et apparentés du conseil municipal de Lyon n’était présent. Pire, Pascal Blache, 52 ans, membre de ce groupe, mais sans étiquette affichée, déclarait dès le lendemain sa propre candidature. « Je ne suis pas le candidat d’un parti, je ne cherche pas de poste, je cherche à additionner », a justifié le maire du 6e arrondissement.
« Quelqu’un qui part dans une aventure personnelle », se désole le président du groupe LR Stéphane Guilland, qui défend la candidature d’Etienne Blanc. « On attend toujours un homme providentiel, mais ça n’arrive qu’une fois tous les trente ans, ajoute-t-il. On a eu Nicolas Sarkozy sur le plan national, on a eu Michel Noir à Lyon. »
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