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vendredi 3 février 2017

Monsieur Fillon, ce ne sont pas les médias que vous insultez mais les citoyens !

                                       
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Monsieur Fillon, ce ne sont pas les médias que vous insultez mais les citoyens !

Jeudi 02 Février 2017 à 18:30
Le procès du "tribunal médiatique" instruit par François Fillon et ses soutiens dans le "Penelope Gate" n'est pas une offense faite aux médias, mais aux citoyens. Et c'est notre démocratie qu'il fatigue.
"On a quinze jours à tenir". Réunissant ses troupes mercredi afin de les garder soudées dans la tempête "Penelope Gate", François Fillon a affiché son optimisme quant au retour rapide du beau temps sur sa campagne. Mais quinze jours, ce n'est pas seulement le délai espéré par le candidat de la droite à la présidentielle pour que l'enquête du parquet financier sur les soupçons d'emploi fictif de son épouse soit close… "Il faut tenir assez longtemps pour qu’on arrive au point de basculement dans l’opinion, où cela va apparaître comme de l’acharnement", éclaire en effet "un stratège de la campagne" dans .
Et c'est bien cela, l'enjeu de la course de relais dans laquelle se sont engagés les soutiens de Fillon depuis dix jours, au fur et à mesure des révélations de la presse sur la face cachée de ce dernier. Se passant leurs cries d'orfraie comme des sprinteurs un témoin, ils déclinent avec endurance l'air entonné par leur champion : "Je ne me soumettrai plus au tribunal médiatique" -comme s'il l'avait fait à un seul instant, lui qui n'a jamais accepté de produire devant les citoyens dont il sollicite les votes une seule des fameuses preuves dont ses avocats assurent qu'elle le blanchiront aux yeux de la justice.
A UN MOMENT DONNÉ, LES STRATÈGES DE FILLON ONT RAISON, L'OPINION BASCULERA
Accuser le média plutôt que de répondre sur le fond, une stratégie classique chez nos politiques en cas de gros temps, que l'on pourrait donc regarder avec indifférence, voire amusement, si elle ne posait pas un problème fondamental : elle fonctionne. A un moment donné, ces stratèges ont raison, l'opinion basculera. C'est mathématique. Une révélation en entraînant une autre, multipliées par l'info en continu sur Internet, les réseaux sociaux et la télévision, l'effet de masse produira irrémédiablement l'impression d'un acharnement médiatique. Jusqu'à ce que l'opinion se mette à son tour à scander : "Laissez-le tranquille !" Ironie de l'histoire, même les mensonges de François Fillon participent à ce processus puisque, comme l'ont montré les jours ayant suivi son intervention au 20 heures de TF1, chacun de ses arrangements avec la vérité donne lieu à des vérifications par la presse qui nourrissent à leur tour… le procès en "chasse à l'homme" !
Et si cette stratégie est dangereuse, ce n'est pas pour les médias, qui en ont vu d'autres. Non, ce sont les citoyens qu'elle méprise. "La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration", proclame l'article 15 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, dont l'esprit doit bien évidemment s'appliquer aux élus du peuple. Or, le parlementaire a ceci de particulier par rapport au citoyen lambda que lui n'obéit somme toute, dans l'exercice de son activité, qu'à lui-même, puisqu'il vote ses propres règles de contrôle ! Or, illustration de la difficulté que peuvent éprouver nos élus à s'imposer des règles d'éthique basiques si on ne les y aide pas : la réaction d'un certain… François Fillon, au moment du vote de la dernière avancée en date sur la transparence de la vie politique : "Je suis scandalisé que le gouvernement parle de loi de moralisation. Comme si la vie politique était immorale. Moi, je n’ai rien à cacher. Je ne voterai pas ce texte parce qu’il n’a aucun intérêt".
L'AFFAIRE CAHUZAC A ÉTÉ RÉVÉLÉE PAR LE FAMEUX "TRIBUNAL MÉDIATIQUE"
Et c'est là qu'intervient la presse car si cette loi a pu prendre corps, c'est uniquement parce que l'affaire Cahuzac a été révélée par le fameux "tribunal médiatique" que dénoncent aujourd'hui les soutiens de François Fillon - alors qu'ils étaient trop heureux d'y participer à l'époque. La presse constitue donc bel et bien dans le "Penelope Gate" un "quatrième pouvoir" : certainement pas au sens de la toute-puissance comme l'entendait Balzac - "elle attaque tout et personne ne l'attaque" - mais en son sens originel de contre-pouvoir face aux abus des trois pouvoirs traditionnels - "un recours des citoyens", écrit Ignacio Ramonet.
Alors oui, in fine, la justice dira le droit. Mais elle ne le fera que parce que les médias auront fait leur travail en lui soumettant le cas de Penelope Fillon, que son mari a soigneusement écartée de tous les radars pendant vingt ans. Et quelle que soit sa décision restera une certitude, assénée là encore par un certain François Fillon le 21 septembre dernier : "Pas d’autorité de l’Etat sans honnêteté ! Le pouvoir doit être exemplaire pour être vraiment légitime". Pour juger de cette exemplarité, les citoyens ont le droit de savoir ce que font les représentants qu'ils ont élus de l'argent que la République met à leur disposition pour mener à bien leur mandat. Dire le contraire est une insulte à la démocratie. Et les citoyens ont le devoir de le refuser.

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