Martine Aubry se convertit à une primaire à
gauche
Le Monde.fr | • Mis à jour le | Par Raphaëlle Besse Desmoulières (Lille, envoyée spéciale)
Elle s’est fait désirer jusqu’à la dernière minute. Discrètement, en toute fin de soirée, Martine Aubry s’est glissée au premier rang du débat, organisé jeudi 25 février à Lille, par les initiateurs de l’appel pour une primaire à gauche. Retenue par l’inauguration d’une résidence en hommage à l’ancien résistant Stéphane Hessel, mort en 2013, la maire socialiste de la cité nordique a créé la surprise en apportant son soutien à ce dispositif.
Admettant avoir eu dans un premier temps une « réaction un peu institutionnelle », Mme Aubry a expliqué au micro qu’elle s’était interrogée pour savoir « comment on peut demander à un président de la République – s’il est candidat – d’aller dans une primaire ». « Si maintenant, ça a l’air d’être le chemin, que François Hollande est candidat et qu’il est prêt à venir dans cette primaire, c’est formidable », s’est-elle félicitée. Un changement de pied pour celle qui déclarait encore mercredi soir que le chef de l’Etat n’avait pas « besoin » de se plier à un tel exercice s’il souhaitait se représenter en 2017. Cette prise de position intervient au lendemain d’une tribune au vitriol contre la politique de l’exécutif, publiée dans Le Monde et qu’elle a cosignée avec des intellectuels et plusieurs personnalités socialistes et écologistes.
Lire la tribune : « Un affaiblissement durable de la France se prépare »
« Aujourd’hui, je vois que ça bouge », a lancé Mme Aubry à un public venu nombreux pour cette première réunion sur le sujet à Lille. Pour justifier sa démarche, l’ex-patronne du PS a rappelé celle de Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS, qui s’est déclaré favorable à une primaire à gauche. « Eh, bien, allons-y, dans ces conditions ! Et, comme le président de la République a l’air de dire que s’il était candidat il n’y serait pas opposé, alors voilà, il faut pousser pour que chacun, y compris ceux qui ne veulent pas venir, accepte de venir dans ce grand mouvement démocratique », a souligné l’ancienne ministre, qui avait elle-même participé à la primaire de 2011. Hasard du calendrier, l’ex-président du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, qui refuse de passer par cette case, donnait une conférence à quelques mètres de là, face à des étudiants lillois.
« Janvier, c’est un peu tard »
Un peu plus tôt, le bras droit de Mme Aubry, le député de l’Essonne François Lamy, avait pris la parole aux côtés du parlementaire européen EELV Yannick Jadot, de l’écrivaine Marie Desplechin ou encore de l’économiste Thomas Piketty, tous trois à l’origine de l’appel. Ce dernier a notamment rappelé son opposition à voir une primaire organisée début 2017, comme l’a demandé M. Cambadélis.« Janvier, c’est un peu tard », a-t-il estimé, faisant valoir sa préférence pour une primaire qui se tiendrait en même temps que celle de la droite, c’est-à-dire en novembre. « Il faut qu’en septembre on sache qui a envie d’être candidat et qu’on débatte à l’automne sur le fond », a plaidé M. Piketty.
Date, périmètre, socle commun : tous les obstacles sont en effet loin d’être levés. Martine Aubry elle-même l’a relevé dans une formule destinée autant aux partis politiques engagés dans cette démarche qu’à un Manuel Valls qu’elle n’a pas cité. « Si on ne fait pas de la politique avec de la communication mais avec des valeurs, on a le droit de ne pas être tous d’accord », a-t-elle jugé. Ce qui ne l’empêchera pas de revenir dans la foulée à ses différends avec l’exécutif : « Pour moi, une réforme n’a de sens que si demain est meilleur qu’aujourd’hui. Il faut retrouver le sens du progrès social, économique, non pas financier, mais durable. » Une pierre de plus dans le jardin de François Hollande, qui devait rentrer vendredi d’une tournée en Amérique du Sud et en Polynésie française.
Journaliste au Monde
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