Un soir, en mangeant un Skyr (yaourt islandais à la mode), debout dans la cuisine, mon compagnon a cité François Mitterrand d’un ton grave : « Il y a deux sortes d’hommes : ceux qui ont lu “Les Deux Étendards”, et les autres. » Je le sais, lui aussi, nous le savons, ce livre a été écrit par Lucien Rebatet, journaliste à Je suis partout et écrivain fasciste qui désigne les juifs comme responsables de la débâcle de 1940 dans son pamphlet « Les Décombres ». Après un temps passé en prison, Rebatet abandonne la politique et publie « Les Deux Etendards » en 1951. Aucun de nous deux n’est fan de Mitterrand, mais « en être », oui, on aime bien. Et donc cette phrase définitive, prononcée sous la lumière blâfarde de la cuisine, nous a donné envie d’intégrer le bon groupe. Nous avons acheté un exemplaire et j’ai gagné le droit de commencer (trop long à expliquer). Dans les 100 premières pages, il est beaucoup question d’ambition et, en écho à une vieille newsletter de Barbara et Agathe, dans laquelle elles s’inquiétaient de ne pas avoir atteint la célébrité à 30 ans (« notre vie est-elle finie ? »), j’ai partagé ce passage dans le Whatssapp de Rue89 : « On commençait cependant à consulter les dictionnaires avec des inquiétudes inédites. A notre âge, Shelley, Byron, Chateaubriand, Poe, Nerval s’étaient déjà donné des preuves de leur génie. Baudelaire, Balzac, Flaubert, Dostoievski étaient déjà la proie de leurs ferments. Mais les exemples de Rousseau, de Stendhal, de tant d’autres sont des plus rassurants. C’est égal, si l’on doit être comme eux des débutants de la quarantaine, quel difficile destin ! Comment se comporter aussi longtemps, sans la consécration d’un premier pas ? » Barbara a actualisé la liste des artistes rassurants, à partir du screen d’un article américain, en ajoutant : - Laura Ingalls qui a publié son premier épisode de « La Petite maison dans la prairie » à 65 ans (elle est morte à 90 ans, donc elle en a profité).
- Et Martha Stewart, devenue star de la télévision à plus de 40 ans (elle en a 80).
Bonne nouvelle, la célébrité tardive semble appartenir à ceux qui vivent plus vieux. Donc : tout le monde se calme. Si c’est pas pour 2022, ça sera pou plus tard. J’en profite d’ailleurs pour vous dire qu’on travaille sur le carriérisme ces temps-ci. Si vous avez décidé que l’ambition est une fausse valeur et qu’il vaut mieux privilégier le confort d’une vie en adéquation avec ses idées, écrivez à Agathe ( aranc@nouvelobs.com). Découvez aussi nos portefeuilles de couple, ci-dessous. Quant à Rebatet : pas fini, mais je crois qu’on peut vivre sans. |
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