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lundi 9 avril 2018

Européennes : l'imbroglio des têtes de liste


8 avril 2018

Européennes : l'imbroglio des têtes de liste

Dans tous les partis, le flou persiste sur le choix du bon profil pour diriger la campagne et définir ainsi la ligne

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Ales entendre, les élections européennes constituent une échéance " cruciale "pour leur formation. Un rendez-vous stratégique, à ne pas prendre à la légère. Le scrutin de mai 2019 étant le premier vrai test sur la scène nationale depuis la présidentielle et les législatives de 2017. Mais à un peu plus d'un an de ce rendez-vous électoral, les trois principaux partis ne disposent toujours pas d'un chef de file identifié. Que ce soit La République en marche (LRM), Les Républicains (LR) ou le Front national (FN), aucun n'a encore déniché une tête d'affiche, susceptible de mener la campagne et de mobiliser les troupes.
Le nouveau mode de scrutin pousse pourtant à présenter des candidats identifiés par le grand public et disposant d'une vraie force de frappe médiatique : contrairement aux élections de 2014, qui se déroulaient dans huit grandes régions, les prochaines européennes auront pour cadre une circonscription nationale unique. Un changement acté par l'Assemblée nationale en février, sous l'impulsion d'Emmanuel Macron, qui mise sur cette nouvelle configuration pour lutter contre l'abstention et repolitiser nationalement le débat.
Sauf que son propre mouvement ne sait toujours pas qui sera la personnalité en mesure de porter le discours pro-européen du chef de l'Etat et de tenir la dragée haute aux autres figures de l'opposition. Alors que le parti présidentiel lance officiellement sa campagne, samedi 7 avril, ses dirigeants ne cachent pas leur embarras, en évoquant un" choix compliqué ".
Macron trancheraUn temps, le nom de Daniel Cohn-Bendit a circulé mais l'ex-député européen a indiqué au Monde, en février, " ne pas être candidat ". Lui aussi pressenti, Alain Juppé a finalement exclu cette possibilité. Le sujet fait débat au sein de LRM, où certains plaident pour une personnalité de la société civile, afin d'incarner le " renouvellement des visages ". D'autres évoquent la nécessité de choisir un responsable politique expérimenté et emblématique.
" Le choix n'est pas arrêté mais il y a plusieurs hypothèses ", explique au Monde le patron du parti, Christophe Castaner. La plus crédible semble être Sylvie Goulard. L'éphémère ministre des armées du premier gouvernement Philippe a le mérite de connaître les sujets européens sur le bout des doigts. Seuls bémols : elle a été nommée à la direction de la Banque de France en janvier, et l'enquête sur les supposés emplois fictifs du MoDem au Parlement européen, dans laquelle elle avait été mise en cause, n'a pas encore été bouclée.
Parmi les possibles transfuges venus de la droite, les noms de Michel Barnier, actuel négociateur pour l'Union européenne sur le Brexit, ou encore du député européen, Arnaud Danjean, circulent également. " Toutes les hypothèses sont ouvertes. Chacun prendra ses responsabilités ", explique M. Castaner. Le chef d'orchestre de la campagne de LRM " n'exclut pas " lui-même d'être le leadeur de son camp. Le choix de la liste et des 79 candidats devant y figurer devrait être dévoilé début 2019. Seule certitude : c'est Emmanuel Macron qui tranchera la question.
L'affaire est aussi compliquée du côté de LR. Le président du parti, Laurent Wauquiez, a fait savoir dès janvier qu'il ne sera pas candidat, par volonté de ne pas se placer en situation de cumul avec son mandat de président d'Auvergne-Rhône-Alpes. Pour ne pas avoir, aussi, à endosser à titre personnel une éventuelle déconvenue. Pourtant, " il faut une personnalité avec de la notoriété, de la crédibilité " pour mener la liste au niveau national, souligne un député européen. Plusieurs noms circulent, comme celui du philosophe et ex-ministre Luc Ferry – l'hypothèse est écartée par l'entourage de M. Wauquiez –, du maire d'Antibes et président du conseil national de LR, Jean Leonetti, ou encore celui de la vice-présidente de LR, Virginie Calmels. Cette dernière ne confirme pas ses ambitions en la matière, sans écarter pour autant cette perspective. Mais l'hypothèse de sa candidature ne fait clairement pas l'unanimité en interne.
Le profil libéral de l'ancienne juppéiste ne colle pas nécessairement avec la ligne qu'entend porter LR. " Elle incarne le libéralisme alors qu'on est contre l'accord de libre-échange sur le Mercosur ", note un dirigeant. Autour de M.  Wauquiez, beaucoup la jugent trop modérée pour faire face à la concurrence du FN, notamment pour porter une ligne de fermeté sur l'immigration. " Mettez les frontistes Louis Aliot ou Nicolas Bay en face, ils lui pompent l'électorat ! ", redoute un dirigeant de LR. Il va falloir trouver la perle rare, capable à la fois de contenter tout le monde au sein d'un parti divisé sur cette question et de porter le fer efficacement dans les médias et les meetings. " Je ne vois pas dans les députés européens une tête de liste qui s'impose ", dit Bruno Retailleau, patron du groupe LR au Sénat, selon qui le candidat idéal doit être" quelqu'un de neuf ". " Et capable de redonner le goût de l'Europe aux Français. "Sacrée gageure.
Même vide à l'extrême droite. Avec une inconnue ajoutée à l'équation : le FN aura-t-il mué en " Rassemblement national " d'ici là ? Sans marqueur FN ni porte-flamme de premier plan – Marine Le Pen ayant refusé jusqu'ici de mener la liste – d'aucuns craignent la déperdition dans les urnes. " J'entendrais cet argument si je n'étais plus présidente " du FN, rétorque-t-elle. Si Marine Le Pen n'en prendra probablement pas la tête, rien ne l'empêche d'apposer son nom sur la liste, pour " faciliter son identification ", ou même d'en prendre les rênes médiatiques. " Avec les listes nationales, ce sont les partis et donc leurs dirigeants qui vont mener la campagne ", veut-elle croire.
D'autres noms tournent autour de la maison frontiste pour mener la liste. Celui de Louis Aliot, député des Pyrénées orientales et compagnon de Marine Le Pen, celui de l'eurodéputé Nicolas Bay… Ou " pas forcément " un membre du FN, lançait Sébastien Chenu, en janvier, laissant ouvert l'espoir d'attirer de potentiels alliés, ou ralliés, issus de la droite. Certains frontistes évoquent la possibilité d'un éventuel accord avec Thierry Mariani ou Nicolas Dupont-Aignan. Sans en dire plus. Manière de ne pas dévoiler son jeu trop tôt, ou de bluffer au mieux. En attendant, comme ses concurrents, de trouver la bonne pioche.
Alexandre Lemarié, Olivier FayE, et Lucie Soullier
© Le Monde


8 avril 2018

Les gauches à la recherche de la bonne formule pour le scrutin

A un an de l'échéance, toutes les formations, du PS à La France insoumise, s'interrogent sur la tête de liste et les possibles alliances

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C'est l'un des seuls points communs des formations de gauche : toutes sont à la recherche de la bonne formule et de la bonne tête de liste pour les européennes de mai  2019. A un an des échéances, la division règne et fait craindre un éparpillement des voix. Tour d'horizon.

Le PS dans l'embarras Le seul nom qui émerge pour prendre la tête de liste du Parti socialiste (PS) est celui de Pierre Moscovici. " Si je dois faire quelque chose, je le ferai à l'automne 2018. Je ne précipiterai rien ", confie le commissaire européen, s'inscrivant pleinement dans le calendrier d'Olivier Faure, qui annoncera son choix courant septembre. Mais le scénario est redouté par l'aile gauche du PS :" On ne peut pas avoir comme tête de liste un représentant de la Commission Juncker ", estime l'eurodéputé Emmanuel Maurel, qui va prochainement lancer un club pour " rassembler la gauche "." Moscovici, ce serait rédhibitoire ", abonde la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann. Le PS a du mal à trouver une autre tête d'affiche. Christiane Taubira a été sollicitée, mais elle adécliné. Najat Vallaud-Belkacem, souvent citée, balaie l'éventualité : " Je suis heureuse là où je suis. Ça n'est pas en six mois qu'on se construit l'expérience et les réalisations auxquelles j'aspire ", confie au Monde celle qui a rejoint l'institut Ipsos.
LFI en solitaire Sûre d'elle et volontiers dominatrice, La France insoumise (LFI) devrait partir seule aux élections européennes. En tout cas, pas avec des partenaires français (des initiatives communes avec les Espagnols de Podemos sont en revanche prévues). Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon reste sur sa stratégie de défense d'un" plan A " – " sortie concertée des traités européens " et " négociation d'autres règles "– et d'un " plan B " – " sortie des traités européens unilatérale par la France " – en cas d'échec de la première méthode. Les " insoumis "n'ont pas encore tranché la question de la tête de liste. Ils doivent aborder les européennes samedi 7 avril lors du débat stratégique de la première réunion de leur " assemblée représentative ", sorte de parlement du mouvement, dont 60 % sont tirés au sort.
Le PCF s'interroge Chez les communistes, la prudence est, comme souvent, de mise. Lors de leur conseil national des 30 et 31 mars, ils ont adopté l'idée d'une " plate-forme commune " pour construire un rassemblement des formations de gauche, mais aussi d'acteurs de la société civile et d'intellectuels. Le PCF est traversé par plusieurs lignes distinctes ? celle pour une alliance avec LFI, celle pour une alliance avec Génération.s, celle pour une liste autonome ? et gagne du temps en appelant au rassemblement.
Les Verts tentés par l'autonomie Certains écologistes voudraient se rapprocher de Génération.s et militent pour que Noël Mamère prenne la tête de liste. Le journaliste a l'avantage d'avoir la double casquette EELV-Génération.s. L'hypothèse semble avoir fait long feu. Mais les écologistes ne sont pas tous favorables à un rapprochement avec les hamonistes. Ils sont persuadés, à l'image de Yannick Jadot, eurodéputé sortant, que le scrutin européen est le meilleur pour leur formation, qui peut envoyer des élus au Parlement. Et qu'il faut tenter sa chance.
Génération.s veut être le centre du jeu Le mouvement de Benoît Hamon place beaucoup d'espoir dans les élections européennes. Il veut incarner la gauche pro-européenne et " anti-austéritaire ". Il a déjà bouclé un accord avec DiEM25, le mouvement transnational de Yanis Varoufakis, ancien ministre grec des finances. Désormais, il veut décrocher le " sésame de l'union de la gauche ". Il parle avec les Verts et le PCF, même si une alliance entre ces trois formations paraît improbable, tant les divergences sont importantes sur la question européenne.
Abel Mestre, et Astrid de Villaines
© Le Monde


8 avril 2018

LRM veut prendre la main sur la campagne

Le parti présidentiel lance, samedi, une opération nationale de porte-à-porte

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Cap sur les élections européennes. La République en marche (LRM) démarre sa campagne pour le scrutin de mai 2019, samedi 7 avril, en lançant une " grande marche pour l'Europe " dans toute la France. Initialement prévu le 24 mars, le départ de cette opération de porte-à-porte avait été décalé en raison de l'attaque terroriste survenue, la veille, dans l'Aude.
Durant cinq semaines, le mouvement macroniste entend frapper à plus de 100 000 portes afin de recueillir les attentes des citoyens sur l'Europe. Les militants LRM poseront des questions ouvertes, telles que : " Si je vous dis “Europe”, ça vous fait penser à quoi ? " ou " Selon vous, qu'est-ce qui ne marche pas en Europe ? "
Cette méthode de démocratie participative vise à nourrir le logiciel du parti, sur le modèle de la consultation engagée à sa naissance, en avril 2016, pour mener Emmanuel Macron au pouvoir. La majorité sort la grosse artillerie : une dizaine de ministres et près de deux cents parlementaires seront mobilisés, samedi, dans toute la France. Chef d'orchestre de la campagne, M. Castaner, délégué général de LRM, multiplie les initiatives. Après avoir réuni un comité de campagne – qui rassemble le bureau exécutif et les ministres membres de LRM – le 19 mars, il a tenu un meeting à Paris, deux jours plus tard, en compagnie de la ministre des affaires européennes, Nathalie Loiseau, et de l'ex-député européen Daniel Cohn-Bendit. Samedi, il sera à Tours pour lancer cette " grande marche ".
Le président joue grosL'occasion de sensibiliser les électeurs à ce scrutin. Alors que les autres formations n'ont pas démarré leur campagne, le mouvement macroniste veut prendre la main pour tenter d'imposer le discours pro-européen sur lequel Emmanuel Macron a été élu. Avec l'objectif de réhabiliter ce thème aux yeux des électeurs. " Il faut récréer du lien entre les Français et l'Europe, car la dernière fois qu'on les a interrogés sur ce thème, c'était en  2005 avec le référendum ", souligne le député LRM du Benelux, Pieyre-Alexandre Anglade.
Un défi ardu dans un contexte de repli nationaliste et de montée des populismes sur le continent, symbolisés par le Brexit ou par les résultats des élections en Allemagne et en Italie. Un phénomène auquel n'échappe pas la France, où une grande part de l'opinion se montre critique vis-à-vis de l'Union européenne (UE). Après la victoire du Front national aux élections européennes de 2014 (avec près de 25  % des suffrages), les candidats défendant une ligne eurocritique (parmi lesquels Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan ou Jean-Luc Mélenchon) ont réuni près de 50 % des suffrages au premier tour de la présidentielle de 2017.
La persistance d'un euroscepticisme dans l'opinion et l'éventualité d'une forte abstention – traditionnellement élevée aux européennes, en France (56 % en  2014) – rendent compliqués les espoirs de conquête de M. Macron. " La tâche est ambitieuse car il y a un contexte de défiance organisé par la classe politique depuis de nombreuses années afin de masquer ses propres insuffisances, analyse M. Castaner.Face à ceux qui mettent en cause Bruxelles de manière permanente, il est d'autant plus nécessaire de répéter que nous avons besoin de l'Europe. "
Le président joue gros lors du scrutin de 2019 : après plusieurs revers à des législatives partielles, ce sera son premier test national. Et, de surcroît, sur une thématique qui lui est chère. " C'est une élection extrêmement importante pour En marche !, car Emmanuel Macron a eu le courage de mettre le thème de l'Europe au cœur de sa campagne présidentielle, et ce sujet fait partie de l'ADN du mouvement ", observe M. Anglade. La suite du quinquennat et la capacité de la France à faire bouger les lignes à l'échelle du continent dépendent, aussi, du résultat de LRM à ces élections. " Si on veut impulser une dynamique en Europe, il faut être en tête en France lors du scrutin ", estime le député LRM Pierre Person.
M. Macron va lui-même s'engager fortement. Après avoir prononcé deux discours sur l'Europe en septembre (à Athènes et à la Sorbonne), il en tiendra un nouveau, le 17 avril, au Parlement de Strasbourg. Le même jour, il lancera les " consultations citoyennes " qui doivent être menées en France et en Europe, jusqu'en décembre.  A ce jour, c'est une des seules idées de M. Macron à avoir rencontré un écho favorable à Bruxelles : seule la Hongrie de Viktor Orban a refusé d'y participer.
En parallèle, le mouvement macroniste cherche à nouer des alliances avec d'autres formations européennes, comme Ciudadanos, en Espagne, pour trouver un point de chute au Parlement. Si l'idée de s'intégrer à un groupe existant n'est pas exclue, la création d'une nouvelle structure reste l'option privilégiée. Avec l'objectif de faire émerger une force centrale pro-européenne qui bousculerait la domination des deux grands groupes traditionnels – socialistes et Parti populaire européen – sur le modèle de la recomposition française. " Notre capacité à nouer des alliances avec d'autres forces progressistes est un gros enjeu, souligne Gabriel Attal, porte-parole du mouvement. Il en va de notre crédibilité. Nous allons montrer que nous sommes en capacité de renverser la table en Europe et pas seulement un parti dans un pays. "
Sur le fond, le discours commence à se roder pour la campagne. Présentés par l'opposition comme les partisans d'une Europe ultrafédéraliste, les dirigeants de LRM veillent à déminer la caricature de parti " eurobéat ". Ils assument donc un discours pro-européen, tout en se montrant critiques sur la manière dont l'UE fonctionne. " Nous voulons défendre le projet européen – en expliquant que l'Union est le cadre nécessaire pour apporter des réponses sur les grands enjeux comme la crise des migrants, la lutte contre le changement climatique ou la gouvernance économique –, tout en insistant sur la nécessité de le refonder ", explique M. Anglade. Le slogan est déjà trouvé : " Bâtir une Europe qui protège ", comme l'a annoncé M. Castaner. Un objectif aussi ambitieux que compliqué dans sa réalisation concrète.
Alexandre Lemarié
© Le Monde

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