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jeudi 19 avril 2018

Abdelkader Messahel : " Il n'y a pas plus dangereux que le retour de combattants djihadistes "


19 avril 2018

Abdelkader Messahel : " Il n'y a pas plus dangereux que le retour de combattants djihadistes "

Le chef de la diplomatie algérienne s'inquiète de la déstabilisation du Sahel

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En visite à Paris du 9  au 11  avril, le ministre algérien des affaires étrangères, -Abdelkader Messahel, a détaillé au Monde sa position sur les différentes crises régionales. Interrogé avant les frappes occidentales en Syrie, le chef de la diplomatie algérienne a plaidé pour la résolution du conflit dans un cadre syrien.


En Libye, comment expliquez-vous la difficulté à mettre sur pied un dialogue national ?

Le processus est contrarié par trop d'agendas qui ne permettent pas à la volonté du peuple libyen d'aboutir selon la stratégie arrêtée par les Nations unies. La solution doit venir d'un dialogue entre Libyens. Ce pays a suffisamment de compétences pour cela. La preuve : fin mars, deux grandes villes qui étaient pratiquement en guerre, Zintan et Misrata, ont trouvé des solutions. C'est un pas très important.


Quel est le rôle de l'Algérie dans ce processus ?

Notre rôle est d'accompagner les Libyens dans la mise en œuvre de leurs propres volontés, sans ingérence. Nous sommes en contact quasi quotidien avec toutes les parties libyennes.


L'approche de l'envoyé spécial de l'ONU en Libye, Ghassan Salamé, vous semble-t-elle la bonne ?

M. Salamé a plusieurs grands mérites. Il a compris que la mission de l'ONU devait être en Libye. C'est le cas, elle est installée à Tripoli. Il est également en contact permanent avec presque tous les acteurs libyens et il s'est rendu à peu près partout. Nous le soutenons de manière sincère.


La dégradation de la situation dans le nord du Mali signe-t-elle l'échec de la stratégie de la mission des Nations unies et de la France ?

Il n'y aura pas de solution en dehors de l'appropriation de la sortie de crise par les Maliens eux-mêmes. Notre rôle, comme celui de la France, des Nations unies, est de les accompagner. Nous renforçons les capacités des troupes maliennes, nigériennes, nous formons des troupes spéciales, nous apportons un soutien logistique, nous partageons nos renseignements.
Nous accordons une aide substantielle : plus de 100  millions de dollars - 80  millions d'euros - en quelques années - aux pays du Sahel pour lutter contre le terrorisme - . Nous ne parlons pas beaucoup de ce que nous faisons, mais nous le faisons.


Le G5 Sahel, que vous refusez d'intégrer, peut-il apporter une réponse à l'insécurité ?

Il le peut. Les gens se focalisent sur la présence ou non de l'Algérie dans le G5 Sahel. Vous connaissez les raisons pour lesquelles nos forces armées ne sortent pas de notre territoire : c'est constitutionnel, historique, culturel. L'armée algérienne est faite pour jouer son rôle de défense nationale. Nous n'avons pas de problème avec ceux qui se mobilisent pour combattre le terrorisme, bien au contraire. Nous aidons aussi ces pays, mais chacun le fait à sa manière.


Après la défaite militaire de l'organisation Etat islamique dans la zone irako-syrienne, observez-vous une recomposition de la menace terroriste au Sahel ?

Il n'y a pas plus dangereux que le retour de combattants - de l'étranger - . Nous l'avons connu au début des années 1990 quand des jeunes qui étaient allés combattre " les ennemis de Dieu " en Afghanistan sont revenus, aguerris, en Algérie. Nous avons ensuite vécu la tragédie de la décennie noire.
Aujourd'hui, peu de combattants vont revenir vers l'Europe car celle-ci s'est dotée de moyens pour l'empêcher. Par contre, beaucoup vont chercher à venir vers le Sahel, car c'est dans cette région qu'ils trouveront des espaces, des sources de financement et une faiblesse des institutions.


Le Maroc vous a appelé à vous impliquer dans les négociations sur le Sahara occidental. Que répondez-vous ?

L'Algérie a toujours soutenu les droits légitimes du peuple sahraoui. Nous reconnaissons qu'il y a des réfugiés sur notre territoire. Tout comme il y a eu des réfugiés algériens au Maroc pendant notre guerre de libération. Le Maroc nous a soutenus, tout comme la Tunisie. Mais nous ne leur avons pas demandé d'aller négocier l'indépendance de l'Algérie avec les Français à notre place. C'est la même chose. Nous ne faisons pas partie de ce conflit.


Le FLN vient d'appeler le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, à briguer un cinquième mandat. Lundi 9  avril, on l'a vu affaibli lors d'une sortie publique. Doit-il se représenter en  2019 ?

Il n'a pas paru affaibli. Il a eu, il y a cinq ans, un accident cardio-vasculaire qui lui a causé quelques petits problèmes de santé, mais le président dirige le pays. Lundi 9 avril, il a été à la rencontre de son peuple. Il est très présent. Depuis son arrivée, il s'est engagé dans une œuvre grandiose. En  1997, nous étions pratiquement en rupture. Vingt ans après, nous sommes un pays stable et sûr. Mais c'est lui qui décidera s'il souhaite être candidat, et c'est le peuple qui tranchera.
Propos recueillis par Charlotte Bozonnet
© Le Monde

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