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lundi 11 septembre 2017

Rentrée blogueuse - Jean-Luc Mélenchon


http://melenchon.fr

                                     Jean-Luc Mélenchon

Rentrée blogueuse

 
Rentrée blogueuse

Chers lecteurs, je reste fidèle à ce blog où vous êtes entre douze mille et vingt-cinq mille en moyenne chaque jour, hors pics de périodes électorales, à venir picorer des nouvelles dans mes interminables textes. Au total, depuis 2015, vous avez été quatre millions de visiteurs uniques à être passés un moment sur ces pages.
En reprenant la saison d’écriture, je dois annoncer que je prépare ici d’importants changements dans l’organisation du plus ancien et plus régulier de mes moyens de communication. Mais avant cela, les chapitres reprennent leurs enchaînements, tantôt à la file ici même, tantôt sur les divers dérouleurs de ma page. Pendant ce temps, ma chaîne Youtube et ma page Facebook complètent le dispositif de mon expression.

De retour de congés, parfois bien longtemps après qu’on ait soi-même repris le travail, on continue de recevoir des cartes postales que les amis ou la parentèle vous ont adressées de loin. J’en raffole comme autant de petits moments de bonheur fossile. Puisque j’ai repris ma place devant ce clavier, c’est que j’ai « fait ma rentrée ». Ces premières lignes sont ma carte postale retardée. Ainsi va la vie. Je me suis reconstruit autant que j’ai pu pendant mes dix-huit jours de congés après dix-huit mois de campagne. À un moment j’ai cru être maudit : Macron est venu passer quelques jours à Marseille où je me croyais tranquillement retiré loin des feux de la meute. Heureusement la Gorgone est passé sans me voir. Il est vrai que je ne bougeais pas une oreille ! Entre autres, j’ai écrit ce texte sur l’insoumission comme « nouvel humanisme » pour me dégourdir les muscles du cerveau. J’écrivais sous l’ombre d’un chêne millénaire. Sa rude peau d’écorce noire me tirait les doigts et j’allais le caresser parfois entre deux paragraphes. La (re)lecture des Mémoires d’Hadrien, de marguerite Yourcenar, me faisait tout sentir en stoïcien romain.
Puis après les universités d’été la France insoumise je suis resté à Marseille. J’avais à y faire encore. Il me fallait prendre le temps d’aller voir le bout de ma circonscription. En effet, au-delà des îles du Frioul où j’ai recueilli 54 voix sur 150 électeurs inscrits, il y a encore un petit bout de terre, un ilot, hélas désormais inoccupé. C’est le phare du Planier. J’ai posé le pied sur ce rocher pour l’instant fermé à toute visite pour cause de réhabilitation des lieux. Puis j’ai fait mon bagage et j’ai pris mes quartiers pour trois jours dans ce moulin à eau, au bord de l’Aveyron, que j’affectionne tant. J’en suis un hôte régulier. C’est au point qu’un « journaliste » de la « presse locale » avait cru pouvoir « révéler » de façon impertinente, éthique, ragnagna et indépendante, que j’aurais menti sur ma déclaration de patrimoine en oubliant de signaler que j’en serai propriétaire. En pleine campagne présidentielle cela va de soi. Mais il n’en est rien. Je n’en suis pas le moins du monde propriétaire. Évidemment. Jamais l’énergumène ni son « journal » n’ont rectifié. Évidemment. Que l’eau passante emporte leur venin !
Dans le flux des ions positifs venus de la cascade et les fraîcheurs soudaines du soir qui tombe dans la vallée, j’ai goûté l’apaisement que produisent les choses immuables. Sur le cours de l’eau qui grisonne quand la nuit va monter, un héron passait en strict habit gris, le bec maquillé de jaune au coin des lèvres… Sinon, le jour, hélas, des pyrales du buis pendouillaient au bout de leur fil en se tortillant médiocrement. Le temps est venu pour elles de mourir à leur tour. En effet, elles ont détruit leur écosystème en dévorant tous les buis qui bordaient ici rivages, chemins et murets. Des buis centenaires sont désormais réduits à leur bois où s’accrochent des lambeaux de mousse pitoyables. Ce désastre griffe le coeur. Mais personne ne sait comment stopper l’invasion de cet insecte venu d’Asie. Alors ici ou là s’agitent des essaims de papillons de la pyrale comme si c’était la fête du printemps. Leurs ailes blanches sont bordées de noir comme un faire part de deuil.
On se promena, mangea et but raisonnablement avant de rentrer le pas lourd remettre le licol. Après qu’on m’ait enlevé chaussures, ceinture, souliers, montre et confisqué mes liquides divers (mais non c’est pas du zèle ! Un parlementaire qui cache une bombe dans ses chaussure, sa montre ou son bain de bouche ça existe !) j’ai pu monter dans la bétaillère ailée et retrouver Paris. Aussitôt je me jetais dans la fournaise. Depuis, la mobilisation contre le coup d’État social que sont les ordonnances détruisant le code du travail occupe tous mes instants. En fait dès le lundi qui a suivi la fin des universités d’été de la France insoumise à Marseille un terrible feu médiatique s’est déclenché contre nous. Mes amis ont fait face magnifiquement. J’ai fait ensuite de mon mieux, en dépit d’une hargne dans la violence et la mauvaise foi qui m’ont laissé pantois plus d’une fois !
Je me suis ainsi retrouvé plongé dans l’ambiance d’excès et de coups tordus médiatiques qui prévalait dans la dernière semaine avant le premier tour de l’élection présidentielle. Je pense que la dernière semaine avantla marche du 23 devrait être un bombardement médiatique de première grandeur selon la tradition dans ce genre de situation amplifié par la trouille que nous inspirons à la bonne société. Bah ! Prenons-le du bon côté ! C’est peut-être signe qu’une nouvelle fois nous ne sommes pas si loin du but qu’on pourrait le croire…

Cela a été une exécution en règle. La ministre du travail, Muriel Pénicaud, y avait mis son esprit d’escalier et tout le tranchant mépris : « Premièrement, les contrats aidés sont extrêmement coûteux pour la nation. Deuxièmement, ils ne sont pas efficaces dans la lutte contre le chômage. Troisièmement, ils ne sont pas un tremplin pour l’insertion professionnelle. » Trois mensonges en une phrase. Premièrement un « emploi aidé » coûte 7000 € au Trésor public, tandis que l’un quelconque des emplois « créés ou conservés » par le CICE coûte 300 000 € ! Deuxièmement, supprimer 260 000 emplois, même « aidés », n’est pas une mesure efficace de lutte contre le chômage. De leur côté les services du ministère du travail affirmaient il y a peu : « ils sont un des outils les plus efficace pour diminuer le chômage à court terme ». Troisièmement les « emplois aidés » supprimés ne créent pour autant aucun tremplin pour l’insertion professionnelle des personnes en grande difficulté qui les occupaient.
Les phrases à l’emporte-pièce de Muriel Pénicaud étaient destinées à effacer l’impression terrible que la lecture des chiffres donnait. La suppression des emplois aidés est en effet le plus grand plan de licenciement collectif jamais vu dans l’histoire de notre pays. La première année, en 2017, il s’agit de 150 000 emplois supprimés. La seconde année, en 2018, il s’agit de 110 000 emplois supplémentaires qui seront détruits. Au total il s’agit de 260 000 emplois en moins ! C’est-à-dire l’équivalent des deux tiers de toutes les destructions d’emplois après la crise financière de 2008 ! Personne n’est en état de dire quel sera l’impact sur l’économie du pays d’un tel plan de licenciement. Mais on devine assez facilement quel effet de réduction de l’activité ces destructions d’emplois vont provoquer. 260 000 personnes jetées dans l’inconnu et la peur du lendemain, privées de revenus, c’est évidemment autant de gens qui consomment beaucoup moins et ne peuvent plus payer leurs charges ordinaires de loyer, électricité, carburant, nourriture.
Tenons compte ensuite du fait que ce choc va venir amplifier celui que va provoquer la perte de revenus occasionnés par le gel du point d’indice des fonctionnaires, l’augmentation de la CSG, la réduction d’un minima social comme les cinq euros sur l’APL ! Mais il ne faut surtout pas oublier l’impact sur la vie quotidienne en général de toutes ces suppressions d’emplois. Elles vont se traduire par une propagation des désordres et des abandons tout à fait spectaculaires. Voyez par exemple comment la première mesure résultant de cette décision a été l’annonce par le resto du cœur de l’impossibilité dans laquelle il se trouvait de servir dorénavant des repas chauds !
Dans l’Éducation nationale, il s’agit de 20 000 postes de travail supprimés ! Tout le monde sait à présent que cela veut dire moins de postes d’accompagnement d’élèves en situation de handicap, moins d’animateurs pour les activités périscolaires, de surveillants, d’aide administrative et ainsi de suite… Dès la rentrée scolaire le chaos s’est installé. À la Réunion, les trois-quarts des communes ont dû repousser de 4 jours la rentrée par manque de personnel et des craintes sur la sécurité pour les élèves. Selon l’AMF, la situation est particulièrement « catastrophique » dans les départements ruraux comme la Meurthe-et-Moselle, le Gard, la Gironde et l’Ardèche. On peut déjà multiplier les exemples locaux où l’on aura vu des situations devenir ingérables du fait de la destruction de ces postes de travail.
Il ne s’agit pas ici de faire une description idyllique et nostalgique de ces « emplois aidés » dont on voyait bien les limites. Mais elles ne sont pas là où les situe Madame Pénicaud ! Les « emplois aidés » les plus efficaces que l’on ait connus ont été ceux créés par le gouvernement de Lionel Jospin. En effet, ils étaient garanti pour cinq ans, tandis que les « emplois aidés » n’allaient que sur un an, ils étaient payés au SMIC et assortis d’une formation obligatoire. Dans ces conditions, 80% de ces « emplois jeunes » ont débouché sur un CDI ou une embauche par concours dans la fonction publique. On connaît aussi les effets d’aubaine que ces « emplois aidés » pouvaient également occasionner. Il va de soi que la principale revendication à leur sujet pour favoriser réellement un débouché sur l’emploi en CDI, c’était évidemment de favoriser les contrats longs qui permettent d’organiser sa vie et ses projets, et de garantir réellement une formation professionnelle qualifiante. Mais aucune de ces critiques ne permet de dire ensuite qu’il est préférable de ne plus avoir « d’emplois aidés » !
On notera que, jusqu’à ce jour, ceux qui ont multiplié les emplois précaires avaient toujours eu pour argument « c’est mieux que rien ». Dorénavant il semble que « rien » devienne la norme. Or il faut savoir que le plan de suppression des « employés » frappe les chômeurs les plus précaires et les plus éloignés de l’emploi. Cela représentait 90% de ces contrats. Le plus souvent, ils permettaient de maintenir à flot des systèmes et des interventions déjà en limite de flottaison du fait du manque de moyens humains. Il s’agit des associations et de très nombreux services publics. Ceux-là représentent les 3/5ème du recours aux « contrats aidés ».
Au total, donc, cette mesure est un désastre humain, économique et pour la vie sociale ! C’est là un de ces « coups de rabot budgétaire » stupides, imaginé de façon purement technocratique, que des énergumènes illuminés par l’idéologie libérale trouvent très saine parce qu’ils pensent que moins il y a d’intervention publique, plus la société va générer spontanément des services privés ! Bientôt on va voir s’écrouler partout autour de soi les derniers filets de sécurité de protection qui continuaient à maintenir vaille que vaille une certaine cohérence de la vie quotidienne en société. Dès lors, la paupérisation va connaître une accélération, de tous ceux qui la transforment aussi en marginalisation et relégation !
Jusqu’à quel point et pendant combien de temps cela sera-t-il supporté ? On ne peut jamais répondre à une telle question. On ne sait quand un système qui se trouve dans une phase sur-critique va voir se déclencher une avalanche. Mais on est certain qu’elle aura lieu et que son amplitude peut être très grande. En toute hypothèse, partout où reculent les services publics, on ne voit jamais de services privés les remplacer. Le recul de l’État et des collectivités ne laisse derrière lui que des déserts. Désert social, désert culturel, désert médical et ainsi de suite. L’histoire montre que les populations y répondent par des initiatives d’auto-organisation destinées à leur garantir ce minimum sans lequel la vie est tout simplement impossible. Tout en menant avec vigueur la bataille contre la destruction des « emplois aidés », nous serons vigilants et inventifs pour participer au remaillage spontané que les délaissés, les oubliés, les abandonnés vont entreprendre.

En Grèce, encore une fois, le président Emmanuel Macron aura stupéfait. Déjà l’étrange mise en scène de sa prise de parole devant le Parthénon sentait bien fort le coup de com. Pourquoi pas ? Mais peu importe dorénavant. De son séjour à Athènes il ne restera que cette bordée d’injures contre le peuple français qui lui tient tête. On se perd en conjectures sur le sens de cette habitude dorénavant bien prise de s’en prendre aux Français depuis l’étranger. Au demeurant, en confirmant les propos inadmissibles qu’il avait déjà tenus en Roumanie, Emmanuel Macron indique aux observateurs qu’il y a bien une intention de sa part dans cette façon de faire et qu’il en poursuit l’objectif avec méthode. Le fait est qu’on ne l’a jamais vu reculer après avoir cinglé au visage.
Dans ce registre, les séquences se suivent et se ressemblent. 17 septembre 2014 : « Il y a la société Gad (…). Il y a dans cette société une majorité de femmes. Il y en a qui sont, pour beaucoup, illettrées ». 27 mai 2016 : « vous n’allez pas me faire peur, avec votre T-shirt. La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler ». 29 juin 2017 : « une gare, c’est un lieu où on croise des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien ». Et ce 8 septembre 2017 nous voici rendus à une véritable bordée : « fainéants », « cyniques », « extrêmes ». Je n’oublie pas bien sûr les remarques atterrantes contre les nordistes tabagistes et alcoolisés ou celle sur le « Comorien » que livrent les kwassas-kwassas !
Ici, je viens de rassembler ce qui visait directement la composante populaire de notre nation. Pour Macron, clairement, le peuple est le problème en France. Mais au fond, chez lui, le mépris de caste vient en renfort de ses obsessions idéologiques. Il le sait : au cours des 20 dernières années la France a été un bastion de la résistance contre la vague des politiques néolibérales qui a déferlé sur l’Europe. Là est le problème à ses yeux, comme ceux de toute la caste européenne et notamment de la Commission ! Si durs qu’aient été les coups que nous avons pris sous Chirac, Sarkozy et Hollande, la résistance sociale n’a jamais désarmé en France. Et elle a connu des succès notoires ! Derrière l’injure, il faut donc voir le diagnostic politique. Plusieurs des charges faites depuis l’étranger sont ainsi autant de messages de connivence adressée à la caste européenne. Car celle-ci a toujours regardé les dirigeants français comme des faibles devant leur peuple depuis le référendum négatif de 2005.
Ainsi quand le 24 août dernier en Roumanie Macron déclare : « La France n’est pas un pays réformable, les Françaises et les Français détestent les réformes. Dès qu’on peut éviter les réformes, on ne les fait pas. C’est un peuple qui déteste cela. » Ces considérations méprisantes pour le peuple dont il est le président, ont toujours un sens politique bien précis qui vise le « modèle français ». Ainsi à Londres en février dernier : « Le système fiscal français “empêche les gens de réussir trop bien”. Et le 23 août en Autriche : « La réalité, c’est que la France est la seule grande économie européenne qui n’a pas gagné face au chômage de masse, c’est ça la réalité ». En l’occurrence cette « réalité » est un mensonge. L’Espagne, le Portugal et l’Italie sont en situation plus délicate.
Mais je laisse pour l’instant de côté l’aspect purement politique que visent les injures d’Emmanuel Macron. Je veux plutôt souligner un autre aspect. Son discours fonctionne aussi comme une levée des digues qui obligeaient jusque-là la caste à faire preuve de retenue dans l’expression de ses jugements sur le peuple. En les décomplexant, en jouant sur la banalisation de l’outrage, il entretient une mentalité de combat parmi les dominants. La mode est ainsi créée. Ce n’est sans doute pas hasard qu’il y ait eu après cela un médiacrate capable de traiter « d’abrutis » sur un plateau de télévision les 20% d’électeurs de la France insoumise. Il faut à ce sujet s’intéresser autant au contexte de la phrase qu’à l’insulte. Le médiacrate traitait précisément du fait que « tout le monde sait bien ce qu’il faut faire pour tirer notre pays d’affaire ». Bien sûr ce n’est pas très original que de voir ressurgir la fameuse « TINA » de Thatcher. Mais dans la foulée d’Emmanuel Macron c’est la première fois que ceux qui n’en conviennent pas sont traités « d’abrutis ».
Cette transgression ne restera pas isolée, on va le voir bientôt. Elle est significative du moment politique actuel. La violence du harcèlement qui s’exerce contre « la France insoumise » est bien en phase avec ce nouvel état d’esprit des dominants. Sur ce plan, l’évolution des positionnements est stupéfiante. Après la dédiabolisations de Madame Le Pen, nous voici arrivés au moment où les éléments de langage contre « la France insoumise » sont dorénavant les mêmes sur l’ensemble de la politique qui va de l’extrême droite au PS et aux Macroniste. Je ne crois pas que de tels « arguments » fassent changer qui que ce soit d’avis à propos des mobilisations qui viennent. Pas une personne ne se sentira dissuadée de marcher avec nous dans la rue le 12 septembre ou bien Le Président des riches
Dans l’entretien qu’Emmanuel Macron a donné au journal Le Point le 31 août dernier, il confirme que son gouvernement s’apprête à réduire l’impôt sur le capital de deux façons. D’abord, il compte mettre en place un prélèvement forfaitaire unique à 30% sur l’ensemble des revenus du capital. Actuellement, les revenus que procurent un capital, qu’ils soient loyers, dividendes ou plus-values sont imposés au titre de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux qui financent la sécurité sociale (CSG et CRDS). Mais ils profitent déjà de barèmes dérogatoires plus favorables par rapport à celui qui existe pour les revenus du travail. On leur accorde également de nombreux abattements. C’est ainsi que les rentes sont en général moins taxées que les salaires.
La réforme de Macron va aller beaucoup plus loin dans cette inégalité. Quel que soit le montant du revenu qu’un foyer tire de ses rentes, d’intérêts, de loyers, de dividendes ou de plus-values, il sera imposé à 30%. Seulement. Et ce pourcentage inclura non seulement l’impôt sur le revenu mais aussi les prélèvements sociaux habituels que tout le monde est censé payer. C’est encore un coup de force qui va contre le cœur de la tradition fiscale républicaine. En effet c’est, au bénéfice de la caste, la fin du principe de progressivité de l’impôt. Il est en vigueur en France depuis 1914 ! Jusqu’à présent le taux d’imposition augmente à mesure que le revenu augmente. Ce n’est plus le cas dorénavant.
Pour illustrer ce qu’est la nouvelle situation, je vais donner un exemple. C’est celui de Madame Muriel Pénicaud, ci-devant ministre du travail ! Le journal l’Humanité nous en a appris de belles à son sujet dans son édition du 27 juillet ! Comme vous le savez dorénavant, alors qu’elle était DRH de Danone, elle avait réalisé un gain de 1,13 millions d’euros sur des stock-options. Il s’agit d’actions qui restent à la disposition d’un bénéficiaire à qui elles sont attribuées gratuitement à un prix convenu et qu’ils achètent pour les revendre au moment qui paraît le plus opportun. Acheter quelque chose sans débourser un centime pour le revendre au moment où il vaut le plus cher, c’est évidemment une opération qui ne demande pas beaucoup d’efforts et peut rapporter gros. Très gros. Ainsi madame Pénicaud a réalisé cette opération au moment même où elle était en charge d’un plan social concernant 900 personnes. À l’annonce de ce licenciement, les marchés financiers se frottaient les mains et la valeur des actions Danone a fortement progressé. Madame Pénicaud a donc gagné sans faire le moindre effort et sur le malheur de 900 personnes une somme considérable : 1 300 000 €.
Que devient cette somme devant l’impôt ? Je suis parti de l’hypothèse où ce serait son seul revenu de l’année. Bien sûr, ce n’est pas le cas, car elle en avait bien d’autres et notamment son salaire… Le barème d’imposition s’appliquant à ce genre de revenus en 2013 était progressif. Il aurait conduit madame Pénicaud à payer 30% d’impôt sur le revenu au titre des 152 000 premiers euros et 41% au titre des 978 000 suivants. Ce à quoi il aurait fallu encore ajouter 15,5% au titre des prélèvement sociaux. Dans ces conditions, au total elle aurait dû payer : 616 125 euros d’impôts. Mais si la réforme prévue par Macron s’était appliquée à l’époque, la situation aurait été totalement différente pour Madame Pénicaud. Elle n’aurait été imposée qu’à 30% sur l’ensemble de la somme, soit 333 900 euros d’impôts. Cela représente une économie de 278 235 € par rapport à ce qu’elle aurait dû payer dans l’ancien système ! Dorénavant, ce sera la règle. On peut dire qu’il s’agit d’une faveur incroyable accordée à ceux qui ont déjà le plus ! L’ensemble de ceux qui perçoivent la majorité de leur revenu en rentes profiteront donc de ce prélèvement unique très favorable. Il s’agit ici de la catégorie des plus riches en France. L’observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) a calculé que les 1% les plus riches gagneraient en moyenne 4500 euros chacun grâce à cette évolution et les autres pratiquement rien.
Mais ce n’est pas tout ! Emmanuel Macron a encore prévu une autre faveur pour les plus riches. Il a décidé de supprimer l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les patrimoines financiers. Toute la partie de la fortune d’un particulier constitué en actions ou titres financiers ne sera plus comptée dans l’évaluation de sa fortune pour y appliquer l’impôt de solidarité. Dorénavant on ne prendra en compte que le patrimoine immobilier. Pourtant, c’est le capital financier qui constitue l’essentiel des plus grandes fortunes. Cela représente les neuf-dixième de la fortune des 3 500 plus importants contribuables. Les 0,1% les plus riches de la population française ont en moyenne un portefeuille financier qui atteint 14 millions d’euros. Pour eux, la suppression de l’ISF sur cette partie de leur capital sera l’équivalent d’une réduction d’impôt annuelle de 170 000 euros.
Le montant de ces cadeaux donne le vertige ! Quand on fait le total, c’est encore plus impressionnant. Il y en a pour environ 7 milliards d’euros par an ! Cet incroyable manque à gagner pour l’État n’a aucune justification autre que de vouloir satisfaire le milieu social qui a organisé la promotion, le verrouillage de la situation et pour finir l’élection d’Emmanuel Macron. La taxation des revenus financiers, la structure de l’impôt sur la fortune, ce sont des questions qui touchent très peu de monde. Quand, où, sous quelle forme ces gens-là ont-ils présenté leurs revendications ? Ont-ils fait des cortèges, des pétitions, des manifestations ? Non. Le président et les riches se connaissent assez pour savoir exactement quoi faire et quand !
Mais il faut prendre la pleine signification de ce que le retrait de telles sommes des caisses de l’État signifie. Ces 7 milliards d’euros par an permettraient de financer l’embauche de 60 000 enseignants et l’ouverture de 115 000 places en crèche… Ou bien celle de 3000 centres de santé et la construction de 25 000 logements HLM. Tel est l’immoralité absolue qui se cache derrière les grands mots des prétendues doctrines économiques que les libéraux psalmodient.
Le gouvernement et ses porte-paroles savent que personne ne peut accepter une telle indécence. C’est pourquoi ils font miroiter aux yeux du grand nombre les bienfaits de la suppression des cotisations salariales pour le chômage et la maladie. Ou bien la suppression de la taxe d’habitation. Pendant ce temps, personne ne regarde de l’autre côté, là ou les poches remplissent par centaines de milliers d’euros. Quant aux bas salaires, inutile de dire que les gains promis seront en réalité très réduits ! En effet la baisse des cotisations sera étalée sur l’ensemble de l’année prochaine mais la hausse de la CSG se produira entièrement à partir du 1er janvier. Bilan pour un SMIC : une hausse de 5 euros. Juste la somme correspondant à la baisse des APL.
Mais au passage, ce n’est plus le capital qui paye les cotisations sociales qui sont pourtant une part du salaire réel. Le « salaire brut », c’est du salaire ! Dorénavant il sera payé par les contribuables qui devront compenser à l’euro près l’exonération de cotisations sociales décidées par Macron. Autrement dit : le salaire payé par l’employeur sera baissé et l’impôt sur le contribuable salarié sera augmenté pour payer cette baisse. D’un autre côté, les retraités qui ont des pensions de 1200 euros seront perdants : ils subiront la hausse de la CSG sans aucune compensation. Au final, l’étude de l’OFCE le confirme, les baisses d’impôts concerneront surtout les plus fortunés : 46% de ces baisses iront aux 10% les plus riches. On dit merci à qui ?

De tous côtés montent des échos favorables. Il semble que la mobilisation en cours pour la journée d’action du mardi 12 septembre et la marche du samedi 23 septembre se prépare bien. De plus, nous avons réussi à stopper la campagne médiatique absurde selon laquelle il y aurait une compétition entre ces 2 dates. Je dis « absurde » » pas seulement parce que nous avons appelé dès la première minute à soutenir l’initiative que la CGT avait prise d’abord toute seule pour la date du 12 septembre. Mais surtout parce que, en toute hypothèse, deux événements séparés de 11 jours ne peuvent pas être concurrents ! Surtout s’ils ont le même objet. Et davantage encore quand ceux qui y appellent en partagent le fond alors même que d’autres déclarent ouvertement ne pas être concernés !
Rappelons tout de même que le mot d’ordre de « retrait de l’ordonnance sur le code du travail » ne fait pas l’unanimité. En effet, l’ensemble de la « vieille gauche » n’appelle pas au retrait des ordonnances. Loin s’en faut. Le président du groupe PS à l’Assemblée nationale, Bertrand Faure a bien précisé : « nous ne demandons pas l’abrogation des ordonnances mais leur aménagement ». Le PS, EELV, les radicaux de gauche (PRG), et qui sais-je encore se tiennent cois. De même dans le champ syndical. La rencontre à l’Assemblée nationale du groupe parlementaire « la France insoumise » avec le secrétaire général de la CGT, à sa demande, a donc permis de clore ce feuilleton sans objet. Au demeurant, il suffisait de voir qui jetait de l’huile sur le feu pour se faire une idée de la nocivité attendue de cette opération. Naturellement, son seul objet était de répandre une mauvaise ambiance démoralisante et démobilisante. Je crois pouvoir dire que cette manœuvre a désormais échoué. Les propos bienveillant de Phillipe Martinez à l’égard de notre initiative en attestent, côté syndical.
Pour le reste, tous ceux qui réfléchissent comprennent vite ce qui est en jeu. La marche du 23 a besoin que la mobilisation syndicale du 12 septembre soit un succès. Elle a également besoin que le 21 septembre syndical soit également succès. Car ces rassemblements décentralisés dans tout le pays ne peuvent qu’élargir la prise de conscience populaire et l’approfondir. Dès lors, les 2 dates concourent comme autant de vagues successives au déferlement de la marée que nous nous efforçons de faire monter pour le 23.
La France insoumise a pris ses responsabilités de première force politique d’opposition sociale. Elle l’a fait à l’Assemblée nationale pendant toute la session extraordinaire. Puis en appelant pendant cette session extraordinaire aux rassemblements des 5 et 12 juillet. Elle le fait de nouveau en en appelant à une marche commune le 23 septembre, un samedi. Elle y appelle toute la population, salariée ou pas, contre le fait politique majeur que représente pour notre société la fin du règne de la loi en matière de droit social. Notre responsabilité est de montrer que cette question concerne absolument tous les Français, de toutes conditions et de toutes opinions. C’est pourquoi depuis le début nous affirmons que nous ne visons pas une marche des seuls « insoumis » mais de tous ceux qui se sentent concernés. Nous les avons appelés à venir s’ils le souhaitent avec leurs pancartes et drapeaux particuliers. Enfin si bien sûr, comme par le passé, la meute des aboyeurs essaiera de nouveau de réduire cette marche à ma personne, il va de soi que cette tentative ne dissuadera pas davantage que par le passé.
En toute hypothèse, beaucoup de choses ont bougé en peu de temps. L’officialité médiatique et la macronie pensait d’abord avoir réussi à isoler « Mélenchon et Martinez », comme l’avait annoncé le journal Le Figaro, dans le camp étriqué des archaïques ronchonneurs. Mais, au fil des jours, l’arc des forces qui se mobilisent s’est élargi. La FSU, Solidaires, l’UNEF se sont joints à l’initiative syndicale. Puis la direction de la CFDT n’a pas manifesté l’enthousiasme espéré par l’équipe Macron. Enfin les syndicats de Force Ouvrière sont largement passés dans l’opposition. À cela s’est ajouté que la tentative pour opposer l’action syndicale et la marche du 23 septembre a échoué. De nombreux syndicats de branche ou du niveau départemental et local intègrent la date du 23 septembre dans leurs appels à la mobilisation. On verra donc ce jour-là aussi des bannières syndicales.
Enfin, quelque chose de nouveau et important s’est aussi produit. On sentait qu’une volonté politique de rompre les routines existait. J’avais noté l’appel à la marche du 23 de Sébastien Jumel et Stéphane Peu, députés communistes très unitaires qui avaient d’ailleurs été candidats avec l’appui de la France insoumise dès le premier tour.. Puis il y a eu l’intervention de Benoît Hamon sur Europe 1. En décidant d’appeler lui-même à participer au 23, Benoît Hamon a rompu la muraille de confinement politique que les chefs de la « vieille gauche » cherchaient à dresser. Je considère sa décision et son appel public comme un événement politique de première importance. Il faut saisir sans hésitation la main qui se tend.
Quoi qu’il leur en coûte, je demande à tous ceux qui me font confiance de jeter la rancune à la rivière et de tourner la page. Il faut partout où cela est possible préparer sur le terrain en commun cette mobilisation. Il s’agit bien sûr d’abord d’assurer le succès de la marche. Mais puisque l’occasion s’en présente, ce sera une bonne chose de cultiver une jonction de choix politique qui peut avoir sans doute des lendemains. La mise en mouvement commun de nos « mouvements » pour le succès du 23 peut faire de cette date un heureux commencement. Je le souhaite.
Pour ma part, je subordonne toute mon activité et mes contacts à sa réussite. Toute la sphère médiatique macroniste et les satellites de toutes sortes du président sont déjà en alerte et passent à l’action dans leurs domaines respectifs. L’enjeu de ce bras de fer est parfaitement compris de part et d’autre. Le niveau de la mobilisation sera l’indicateur le plus net du rapport de force. L’adversaire le sait. Nous aussi. Il faut donc agir en conséquence avec sens des responsabilités. Celle de « la France insoumise » dans cette séquence est considérable. Nous agissons donc avec méthode jusque dans les détails.
Au fond, nous retrouvons dans le contexte actuel les mêmes données que pendant la campagne présidentielle. Mais j’estime que l’élargissement désormais acquis de forces qui appellent à la marche antigouvernementale du 23 et choisissent ainsi de se fédérer par l’action est une situation nouvelle plus favorable au rapport de force avec le système. Sans oublier que des milliers de militants de toutes origines, des syndicalistes, des communistes, des socialistes, y seront présents par milliers mêmes si leurs dirigeants n’ont pas choisi d’y appeler. Je crois à la force irrésistible de cette fédération. Je crois à la force de la contagion de l’unité par l’action dans les milieux populaires. Tout ce que nous faisons doit y être subordonné. Pour ma part, je m’y dévoue.

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