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samedi 18 juin 2016

A gauche, vers une primaire taillée pour François Hollande



A gauche, vers une primaire taillée pour 

François Hollande



LE MONDE |  • Mis à jour le  | Par 


           Lancement du mouvement de Jean-Christophe Cambadelis, "la belle Alliance Populaire" le 13 avril 2016.
Lancement du mouvement de Jean-Christophe Cambadelis, "la belle Alliance Populaire" le 13 avril 2016. Cyril Bitton French-Politicis pour Le Monde


Jean-Christophe Cambadélis a pris tout le monde de court. Le premier secrétaire du Parti socialiste (PS) a annoncé, vendredi 17 juin dans la soirée, l’organisation dans les prochains mois d’une « primaire de la Belle Alliance populaire » – qui regroupe le PS, le Parti radical de gauche (PRG) et l’Union des démocrates et des écologistes (UDE), des écologistes pro-gouvernementaux – pour la présidentielle de 2017. Une proposition qu’il devait faire adopter, samedi, par le conseil national du PS réuni à Paris.
L’initiative du patron des socialistes est une surprise, tant la perspective d’une primaire à gauche pour 2017 semblait s’éloigner au fil des semaines. En réalité, M. Cambadélis procède à une pure manœuvre tactique, car la formule qu’il défend est une élection interne taillée sur mesure pour François Hollande.
Le numéro un de la rue de Solférino sait en effet que Jean-Luc Mélenchon est déjà parti dans la course pour 2017, en espérant rassembler les voix à gauche de l’anti-hollandisme. Il a également constaté que les communistes et les écologistes ont rejeté l’idée de participer à une compétition interne avec le chef de l’Etat, refusant de soutenir ce dernier s’il venait à être désigné à son terme. Il a donc décidé de prendre les devants, en réduisant la primaire à la seule Belle Alliance populaire.

Un calendrier qui colle à celui de Hollande


Concrètement, l’élection se déroulerait sur deux tours, les 22 et 29 janvier 2017, avec un dépôt des candidatures entre le 1er et le 15 décembre 2016. Le premier secrétaire du PS, qui soutient la candidature de M. Hollande à un second mandat, est favorable à ce que le chef de l’Etat y participe. « C’est une décision qui, bien sûr, lui appartient, mais je souhaite que le président de la République y soit candidat », a déclaré au Monde M. Cambadélis vendredi soir.
Selon nos informations, cette initiative a été prise de concert directement entre Solférino et l’Elysée. Donné éliminé du premier tour de la présidentielle par de multiples sondages, M. Hollande se serait en effet résolu à utiliser cette primaire pour tenter de se « relégitimer » au sein de sa propre famille politique.
Vendredi, l’Elysée a refusé de commenter l’annonce de M. Cambadélis, se contentant de rappeler que « le président de la République donnera, comme il l’a déjà dit, sa décision de se représenter ou pas au mois de décembre ».

« Le monde est bien fait »


Mais un proche du chef de l’Etat salue, en « off », le bon coup joué par MM. Cambadélis et Hollande. « Le monde est bien fait, le calendrier de Camba colle parfaitement avec celui de Hollande, comme par hasard… Preuve s’il en est qu’il ne faut jamais sous-estimer le président », sourit cet ami.
L’idée était en germe depuis le congrès du PS à Poitiers en juin 2015, mais l’entourage du chef de l’Etat a longtemps été divisé sur l’opportunité de soumettre la candidature de M. Hollande à un vote interne.
Le feu vert a été accordé au cours des dernières quarante-huit heures. Dans un premier temps, la direction du PS avait laissé entendre, mercredi, que les statuts du parti pourraient être modifiés lors d’un congrès extraordinaire pour empêcher l’organisation d’une primaire, et donner ainsi les mains libres à M. Hollande.
Mais face à la levée de boucliers devant ce qui s’apparentait à un coup de force de la présidence, l’exécutif et M. Cambadélis ont choisi une autre option, celle de la primaire a minima.

Montebourg et Macron au pied du mur

Celle-ci présente pour M. Hollande plusieurs avantages. Elle lui permet d’abord, s’il est candidat, de procéder à l’inventaire de son quinquennat. En affrontant ses opposants internes au PS, il pourrait une bonne fois pour toutes trancher entre les deux lignes du socialisme, entre l’aile réformatrice qu’il souhaite incarner et le camp plus traditionnel des frondeurs.
L’exercice présente un risque pour M. Hollande, celui d’être battu, mais en janvier prochain, il espère bénéficier d’un retournement de l’opinion à son égard, grâce notamment à plusieurs mois d’affilée de bons résultats économiques, à l’image de ceux enregistrés dernièrement, et à la comparaison avec le candidat de la droite qui aura été désigné en novembre.
Un sondage TNS-Sofres, publié vendredi par Le Figaro, montre par ailleurs que le chef de l’Etat conserve malgré tout un socle de popularité parmi les sympathisants du PS – donc parmi les futurs électeurs de la primaire de la Belle Alliance – en arrivant en tête avec 21 % des suffrages, devant le premier ministre, Manuel Valls, et le ministre de l’économie, Emmanuel Macron.
L’autre avantage pour M. Hollande est plus défensif. Cette élection interne met en effet au pied du mur aussi bien l’ancien ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, qu’Emmanuel Macron, deux de ses concurrents potentiels.

« Casse-tête »


Le premier, qui ne cesse de réclamer l’organisation d’une primaire pour affronter le chef de l’Etat, serait ainsi empêché de concourir à la présidentielle en dehors du PS. Surtout, il devrait subir la concurrence d’autres candidatures venues de l’aile gauche du parti.
Vendredi soir, la sénatrice socialiste de Paris Marie-Noëlle Lienemann a déjà fait savoir au Monde qu’elle sera « candidate a priori à la primaire pour avoir un vrai débat de fond face à François Hollande ». Or, le chef de l’Etat le sait : plus le camp de ses opposants internes sera fracturé, plus ses chances de les battre seront grandes.
Quant à M. Macron, participer à cette primaire contre M. Hollande reviendrait pour lui à devoir quitter le gouvernement et à apparaître définitivement comme un traître. Et s’inscrire dans le cadre d’un vote du PS pourrait faire perdre du crédit au créateur du mouvement En marche !, qui se revendique « ni de droite ni de gauche ».
Un vrai casse-tête à venir pour le patron de Bercy, confronté à une situation inverse de celle de Manuel Valls. « Si Hollande y va, Valls le soutiendra. Si Hollande n’y va pas, Valls pourra se substituer à lui sans procès en trahison et participer à la primaire », résume un proche du président de la République.

« Il y a un loup »


Les frondeurs sont conscients du piège en train de se refermer sur eux, et ne cachent pas leur colère. « On refuse cette idée marketing d’une primaire de la Belle Alliance. On veut une primaire de mobilisation en décembre, et non une primaire de confiscation en janvier 2017 », a expliqué au Monde vendredi François Kalfon. Pour ce lieutenant de M. Montebourg, la primaire proposée par M. Cambadélis « est trop floue, donc évidemment il y a un loup ».
Il rejette une compétition limitée au seul cadre socialiste, comme en 2006, et réclame une primaire large, comme en 2011 : « On veut une grande primaire, pas une petite primaire, pas une primaire pour convenance personnelle de François Hollande. »
Une critique partagée par le député de la Nièvre, Christian Paul, qui défend, lui aussi, « une primaire loyale, avec les mêmes règles et le même nombre de bureaux de vote qu’en 2011, et ouverte à tous les électeurs de gauche et pas seulement aux militants socialistes et radicaux ».

En savoir plus :sur http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2017/article/2016/06/18/a-gauche-vers-une-primaire-taillee-pour-francois-hollande.....


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