Blast - Le souffle de l'info : Y A QU’À SE BAISSER...vendredi 28 février 2025

 

Y A QU’À SE BAISSER

La nouvelle newsletter signée Sébastien Fontenelle. Un principe simple : une compilation des derniers dérapages observés dans les médias dominants. Parce qu'à force d'extrême droitisation, on finit par ne presque plus les voir. Cette newsletter Le bloc-notes de Sébastien Fontenelle est la deuxième que nous envoyons. Désormais, elle sera exclusivement envoyée aux abonnés de Blast. Si vous souhaitez continuer à la recevoir – ainsi que le Best-of du lundi et notre sélection de brèves - et soutenir notre travail, nous vous invitons à vous abonner à Blast, afin de nous permettre de continuer à vous informer sur ces enjeux cruciaux.

18 février 2025 Comme le relève avec beaucoup de sagacité Le Figaro (groupe Dassault), l’hebdomadaire Le Point (groupe Pinault) « déclare la guerre à Wikipédia », où la fiche consacrée à ce magazine, rigoureusement documentée, ose mentionner, de façon parfaitement exacte, qu’il est de droite, et que sa « ligne éditoriale fait l'objet de critiques virulentes et suscite de vives controverses ». Pour Le Point, c’en est trop : l’hebdomadaire, qui prétend donc dicter ses contenus, publie une pétition enjoignant à Wikipédia « d’établir des garde-fous beaucoup plus efficaces contre ces détournements idéologiques de l’encyclopédie ». Sans surprise : cet appel à limiter la liberté d’expression est paraphé par la fine fleur de l’éditocratie de droite et d’extrême droite qui vient de passer d’interminables années à psalmodier que la gauche était l’ennemie de la liberté d’expression.

20 février 2025 (1) Le magazine en ligne Tribune juive publie un billet - prudemment effacé depuis - dont l’auteur, l’écrivain franco-israélien Marco Koskas, écrit : « La conscience humaine n’est plus façonnée par les livres mais par les hyènes de la politique. Et moi je ne vois pas d’autre réponse que mettre une balle dans la tête de Mme Soudais, Monsieur Coquerel et toute la mélenchonie. Mais je n’aurais jamais assez de balles pour dézinguer tous ces affreux. Et pas de révolver non plus… » Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur de François Bayrou, s’abstient de réagir à ces menaces de mort visant des élus - insoumis - de la République : c’est à ses silences, aussi, que se devinent les inclinations de ce personnage.

20 février 2025 (2) Il faut lui reconnaître cet incontestable talent : l’éditocrate Géraldine Woessner, rédactrice en chef au Point, excelle dans l’art difficile du lâcher de vilenies. Au mois de mai 2024, elle déposait sur le réseau social du milliardaire d’extrême droite Elon Musk, après l’assassinat de plusieurs dizaines de journalistes palestiniens par l’armée israélienne, cette délicate sentence : « Il n’y a pas de journaliste palestinien. » Quelques mois plus tard, négligeant le minuscule détail que la haine des Juifs était l’un des piliers de l’idéologie nazie, elle déclarait, à la télévision, et dans le plus grand des calmes : « L’antisémitisme qui existait dans les années (19)30 ou (19)40, c’était un antisémitisme honteux. L’Allemagne a caché ce qu’elle faisait aux Juifs. » Cette fois-ci, elle écrit, dans un message posté sur le réseau social Bluesky, et toujours très calmement, que les sites d’information Reporterre, Arrêt sur Images et Blast « diffus(e)nt de fausses information à échelle industrielle » - sans produire, évidemment, et pour cause, la moindre preuve, au soutien de cette diffamation : à ce niveau-là, le talent devient une aptitude.

24 février 2025 Le bruit court que l’écrivain Boualem Sansal, emprisonné en Algérie, aurait été invité par un mystérieux « individu » non identifié à révoquer « son avocat juif ». Cela inspire à l’éditocrate Philippe Val, ex-directeur de Charlie Hebdo officiant désormais sur Europe 1 (groupe Bolloré), cette profonde réflexion : « Je n’ai jamais entendu parler d’un dignitaire algérien soigné dans un hôpital français refusant d’être soigné par un médecin juif. » Cette prose de celui qu’il appelle « l’excellent Philippe Val » ravit l’éditocrate Raphaël Enthoven, qui s’empresse de la diffuser sur le réseau social du milliardaire d’extrême droite Elon Musk, en lui ajoutant ce commentaire de son cru : « Les oligarques et les dignitaires algériens n’ont aucun scrupule à se faire soigner en France par des médecins juifs, mais ils suggèrent vivement à Boualem Sansal de prendre un avocat non-juif. » Question : comment diable MM. Val et Enthoven identifient-ils « des médecins juifs » ?

25 février 2025 (1) Le Point, poursuivant sa croisade contre Wikipédia, publie un entretien - réalisé par l’éditocrate Géraldine Woessner - avec l’éditocrate Philippe Val, qui décidément est partout. Celui-ci déclare notamment - et pour la plus grande joie de son interlocutrice, qui n’en espérait peut-être pas tant - que Wikipédia est « un tribunal populaire », que la fiche que lui consacre l’encyclopédie en ligne (et dont il néglige évidemment de préciser qu’elle est elle aussi parfaitement documentée) est « mensongère » et « malveillante », qu’elle « vise clairement à nuire à sa vie professionnelle et personnelle », et qu’elle est même « moins objective que celle d'Adolf Hitler ». Moyennant quoi, sortant ses gros ciseaux, il « réclame l’interdiction des fiches sur les personnes vivantes sans leur consentement ». Ici, donc : Val est oublieux, mais Val est - pour une fois - divertissant. Oublieux, parce qu’il semble n’avoir aucun souvenir de l’époque où lui-même confectionnait pour Charlie Hebdo des éditoriaux dans lesquels il calomniait et diffamait obsessionnellement des personnes vivantes - sans leur consentement, il va de soi. Et divertissant, parce que lorsqu’il a cherché, parmi les innombrables fiches biographiques publiées par Wikipédia, celle qu’il pourrait valablement comparer avec la sienne, il a donc choisi, pour finir, celle d’… Adolf Hitler : c’est bon, de rire, parfois.

25 février 2025 (2) Sur RTL, le journaliste Jean-Michel Aphatie déclare : « Chaque année, nous commémorons le massacre d’Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais nous en avons fait des centaines en Algérie. Est-ce qu’on en a conscience ? » Ce constat est parfaitement exact, comme l’ont « prouvé depuis longtemps toutes les études historiques », ainsi que le rappellera quelques heures plus tard l’historien Alain Ruscio, spécialiste du sujet. Le massacreur Bugeaud s’en faisait d’ailleurs une gloire, qui promettait aux Algériens, en 1845 : « J’entrerai dans vos montagnes, je brûlerai vos villages et vos moissons. » (Et qui a tenu parole.)

26 février 2025 Les propos de Jean-Michel Aphatie provoquent pourtant la fureur du député d’extrême droite Éric Ciotti, qui poste, sur le réseau social du milliardaire d’extrême droite Elon Musk, ce délicat message : « Jean-Michel Aphatie a endossé le rôle d’un prédicateur algérien. Il a insulté la France en osant comparer la présence française en Algérie au massacre d’Oradour-sur-Glane ! » Rappel : quelques mois avant de se poser ainsi en protecteur de la mémoire de l’abominable massacre d’Oradour (Haute-Vienne) - village rasé le 10 juin 1944 par les Waffen SS de la division Das Reich qui ont exterminé ce jour-là la totalité de la population -, le même Ciotti s’était allié sans trop d’états d’âme, avant les élections législatives de l’été dernier, avec un parti cofondé par un Waffen SS.

27 février 2025 L’eurodéputée insoumise Rima Hassan, interviewée sur Sud Radio, déclare : « Le Hamas a une action légitime, si on se réfère aux résolutions des Nations unies. Par contre, ce n’est pas parce que les Nations unies sont extrêmement claires sur le droit des peuples colonisés à avoir recours à la lutte armée que les procédés de la lutte armée justifient tout : vous n’avez pas le droit de prendre en otages des civils, vous n’avez pas le droit de commettre un certain nombre d’exactions telles qu’elles ont été commises (par le Hamas), et je rappelle que moi et mon parti avons très souvent rappelé que c’étaient des crimes de guerre. » Bruno Retailleau réagit immédiatement : il annonce « signaler à la procureure de la République de Paris ces propos qui relèvent » selon lui « de l’apologie du terrorisme ». Il ne juge pas utile de lui signaler aussi les menaces de mort proférées sept jours plus tôt par l’écrivain Marco Koskas contre des députés insoumis - et qu’il n’a toujours pas dénoncées: c’est à la géométrie extrêmement variable de ses tolérances, que se reconnaît, aussi, la droiture de ce ministre.

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