| | HADRIEN MATHOUX RÉDACTEUR EN CHEF POLITIQUE L'âge identitaire, de l'éléphant silencieux au vacarme épuisant
« Marianne » n'est pas le dernier journal à s'en inquiéter : nous vivons à l'âge identitaire, et le marigot politique a bien vite pris le pli. Jadis, la compétition électorale s'organisait selon des modalités bien différentes. Aux balbutiements de la IIIe République, c'est la question du régime et des institutions qui départageait les Français, entre les partisans d'un retour à la monarchie et les républicains de diverses tendances. Puis vint l'émergence de la « question sociale », et ce fut la lutte, parfois musclée, mettant face à face défenseurs du socialisme et disciples de l'économie de marché.
En 2024, dans nos sociétés complexes traversées par des clivages multiples, il n'existe pas une ligne de démarcation unique. Seuls les idéologues les plus obtus prétendent que les questions socio-économiques ont disparu, ou que le rapport des Français aux institutions est désormais sans importance. Mais un encombrant problème obsède les acteurs politiques plus que tous les autres : la question identitaire est partout, tout le temps.
Longtemps, ce thème fut « the elephant in the room », comme disent nos amis anglais. Une matière inflammable dont tout le monde connaissait l'existence mais que personne, sauf les plus extrémistes, ne cherchait à manipuler. Désormais, tout le monde met allègrement les mains dans le cambouis. « Fermons les frontières, exigeons l'assimilation des immigrés et redevenons des Gaulois », clame-t-on au Rassemblement national, où l'on exhibe le ralliement de Malika Sorel comme un trophée.
« Ouvrons nos portes à tous ceux qui le souhaitent : la culture française n'existe pas, et l'heure est à la créolisation ! », leur répondent les insoumis, tout heureux d'avoir débauché Rima Hassan pour importer au maximum la cause palestinienne dans le débat national. Quant aux macronistes, la campagne électorale les voit se lancer dans des odes à l'Europe qui sentent un peu la naphtaline. Et les autres, les citoyens étourdis par ce tintamarre, qui ne se définissent ni comme des « blancs », ni comme des « racisés », ni comme des « européens » ? Ils sont sans doute un peu perdus, mais peuvent toujours se plonger dans la lecture de « Marianne » pour tenter de comprendre le tumulte qui les entoure. Twitter @hadrienmathoux
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