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jeudi 7 novembre 2019

Jean-Luc Mélenchon - La diabolisation permanente - le 7.11.2019




                      

La diabolisation permanente

Jeudi 7 novembre 2019

La diabolisation permanente

Crédits photo : capture d'écran (en h. à g.), Fæ (en h. à d.), Maison blanche (en b. à g.), Stéphane Burlot (en b. à d.)
Dans ce post vous trouverez aussi une analyse de la révolution citoyenne en Irak. Oui, j’admets que l’essentiel de mon temps disponible en dehors de mes tâches de Président de groupe parlementaire est fait d’un suivi passionné des évènements qui ont cours dans les révolutions citoyennes qui agitent le monde actuellement. Je veux y apprendre tout ce qui se peut, comme préparation aux évènements qui ne tarderont pas à concerner toute la planète politique. Ici, à Paris, la hausse de 13% du prix de ticket de métro n’a pas donné le résultat qu’il a produit à Santiago du Chili. Là-bas, partant de cette revendication, on est arrivé à la tenue d’un référendum en vue de la convocation d’une Assemblée Constituante. Je dois dire que cela me laisse rêveur. Mais le Macron local, le président Pinera aura fait quinze morts avant de céder.
Pendant ce temps, le peuple français est soumis à un débat éreintant sur le port du voile, le droit de signer une pétition et une foule de diversions morbides de cette sorte. Toute la classe médiatique, à des millions de kilomètres des préoccupations simples du commun des gens, semble vouée à exciter tout le monde sur des sujets qui peineraient à exister sans cette incitation morbide. Pendant ce temps, plusieurs millions de personnes basculent dans la pauvreté en une nuit pour cause de réforme de l’indemnisation du chômage, par exemple.
Bref : qu’est-ce que l’actualité ? Une production de l’industrie unifiée de l’information et du spectacle. Le fossé qui se creuse de cette façon aggrave le mépris général de la population pour tous les lieux de pouvoirs où une caste bavarde et vaine semble s’être regroupée peureusement pour parler en rond. Pour ce qui me concerne, un sondage me plaçant pourtant fort loin derrière le couple Macron/Le Pen aura suffi à réarmer le canon à dénigrement médiatique qui s’était tu quelques temps, c’est-à-dire environ quinze jours. Ai-je dit que Le Monde Diplomatique du mois de novembre avait raison de parler d’« annexion » à propos de l’Allemagne de l’Est ? Cela signifierait que j’approuvais l’ancien régime de ce pays. Le degré zéro de la pensée. Que j’ai déjà écrit et commenté cette idée il y a cinq ans dans un livre, Le Hareng de Bismarck, n’affecte pas la mémoire de poisson rouge des « commentateurs ».
Le niveau médiatique s’est effondré depuis quelque temps déjà. À présent, la scène médiatique est le radeau de la Méduse. Plus un jour sans une provocation grossière ou des propos indignes contre les femmes, contre les musulmans, contre les grévistes, les cheminots, les syndicats, les retraites, tout et tout le monde. La haine et la peur comme lien social sont partout. Un journaliste bulot, accroché à sa rente à Bruxelles depuis quinze ans, se déchaîne contre l’usage du mot « annexion ». Puis il doit avouer qu’il n’a pas lu l’article qu’il condamne. Un comble. Cohn-Bendit me traite de « con » à l’antenne de France Inter sous les yeux amusés de deux répondeurs automatiques du système. Encore un effet de la mémoire de poisson rouge : il avait déjà fait ce numéro il y a cinq ans mais cette fois-là il condamnait l’usage du mot « boche » dans mon livre. Pourtant ce mot ne s’y trouvait pas, évidemment. De toute façon il est invité pour faire ce type de numéro. Les deux calembredaines officielles se délectaient. Mais – quelle horrible surprise – le grand esprit d’Outre-Rhin leur infligea ensuite le ridicule de les injurier eux aussi. Trente ans après la chute du mur de Berlin, voilà tout ce que la France aura comme échange sur un évènement aussi considérable qui a redessiné la carte de l’Europe et changé le destin de notre pays. En France on ne dialogue plus, on diabolise en rond. On ne dira pas « je ne suis pas d’accord, car » mais « il dit ça parce qu’il est dangereux ». Le message ne compte plus mais la tenue du messager devient le sujet du « débat ». La diabolisation est devenue le mode d’échange ordinaire.
L’exemple le plus grossier nous a été donné à propos de l’appel pour dire « stop à l’islamophobie ». L’usage d’un mot, « islamophobie », suffirait à refuser son soutien à des millions de gens au moment où leur persécution morale, psychologique et physique va jusqu’à un attentat devant une mosquée. J’ai beaucoup réfléchi avant de signer ce texte. D’autres des députés insoumis avait déjà signé quasi instantanément. J’ai vu qu’en dehors de cette initiative, dont nous avons été informés par Arié Halimi de la LDH, il n’y avait rien. Aucune initiative, aucune proposition. Aucun geste. Notez aussi : si je n’avais pas posé la question devant l’Assemblée nationale il n’y aurait eu aucun écho de cet attentat avant le huitième orateur de cette séance.
Pas un mot du président de l’Assemblée. Le président de la République n’a pas été à la mosquée, ni saluer les familles des victimes. Comment comprendre un tel niveau de dédain et d’insensibilité ? Comment comprendre un tel de refus d’assumer les devoirs de sa charge au service de l’unité du pays et du régime laïque de notre nation ? Et combien parmi nos nouveaux censeurs n’ont pas eu un mot de protestation quand dix députés insoumis en écharpe ont été expulsé par la « ligue de défense juive » de la marche contre l’assassinat de Mireille Knoll. À présent ils postillonnent d’indignation parce que tel ou tel signataire disqualifierait le message du texte signé.
Pour ma part je signe un texte pour ce qu’il y a dans le texte et pas en raison de ceux dont je découvre ensuite qu’ils l’ont également signé. Sinon je n’aurai jamais signé de texte dans le passé avec Bernard-Henri Levy ni avec le CRIF car nous sommes en désaccord sur à peu près tout ce qui a mon avis défini la France comme une République indépendante. Ni avec Dupont-Aignan contre la privatisation des autoroutes. Ni avec Bruneau Retailleau contre l’invasion du Rojava. Mais il faut savoir faire bloc quand l’essentiel est en jeu. Et l’essentiel est en jeu dans ce pays en ce moment à cause des apprentis sorciers qui veulent spéculer sur la haine des musulmans ou la stigmatisation permanente à leur égard. Il s’agit de millions de personnes, il s’agit de la deuxième religion du pays.
Pourtant, à mesure que les heures passent, j’observe qu’en partant d’un désaccord sur un mot, on en viendrait en réalité à refuser aux musulmans le droit d’être défendus par des gens qui ne sont pas musulmans et qui veulent faire cesser l’ambiance actuelle contre eux. Je ne suis pas juif mais je n’offrirai jamais mon silence à ceux qui voudraient les persécuter. Et cela quand bien même les représentants de cette « communauté » m’insultent et me molestent à toutes occasions. De même pour les chrétiens. En cela, je suis plus français parce que plus républicain que tous les chefs de clans, religieux ou non, qui oublient comment notre premier devoir est de faire peuple ensemble, et cela n’est possible qu’à égalité de droit et de respect. Ce qui est en cause c’est donc l’unité des Français, croyants ou non. Ce qui est en cause c’est l’autorité des défenseurs intransigeants de la laïcité que nous sommes :  nous devons donner la preuve que nous défendons la liberté de tous les cultes. Même quand ce n’est pas nous qui écrivons les textes avec nos mots et nos nuances.

En dehors de cette initiative pour une marche le 10 novembre, quoi d’autre dans le paysage ? L’alternative au texte d’appel à manifester contre la haine des musulmans est la banalisation du silence à propos de la haine des musulmans. Certains ont fait croire à une vague antisémite des gilets jaunes en février dernier en se moquant bien de la réalité de ce qu’ils dénonçaient. Des croix gammées avaient été taguées sur des murs. Le Parisien avait titré sur toute la une : « Ça suffit ». Des rassemblements furent convoquées dans tout le pays, le président en personne s’y rendit. Il passa même auparavant rendre visite à un monument du martyr juif à Paris. Quelques-uns de nos actuels imprécateurs exaltés nous accusèrent lâchement d’être « ambigus » face à l’antisémitisme. Partout dans les rassemblements nous eûmes à subir des grossièretés impunies. Puis on découvrit qu’une seule personne, sans aucun rapport avec les gilets jaunes, avait fait tous les tags incriminés. Ni excuses ni rétropédalage. Le ridicule n’a pas rendu plus vigilant depuis.
En tous cas, rien de toute cette capacité de mobilisation ne s’est manifesté quand il s’est agi des musulmans. Rien. Alors on fait avec ce qu’on a. À mes yeux, les musulmans valent autant que les autres. Ils doivent savoir que la France républicaine, ce n’est pas seulement ceux qui leur tournent le dos aussi grossièrement dans le malheur. Ils doivent savoir que les défenseurs intransigeants de la laïcité que nous sommes garantissent la liberté de leur culte comme celui de tous les autres. Ce qui n’est pas le cas de bien d’autres bonnes âmes qui donnent des leçons mais courent se faire voir à Saint-Sulpice, promeuvent les messes du 11 novembre, les processions de rue ou courent les synagogues kippa sur la tête à tout propos et supportent sans broncher les pires injures et stupidités proférées contre les musulmans.
Je m’adresse à vous, mes amis les plus proches que la campagne de dénigrement de cet appel fait hésiter. Réalisez qu’on ne doit pas accepter de faire des musulmans une catégorie qu’on ne pourrait défendre qu’en combinaison contre la lèpre ! Certes, « islamophobe » est un mot que nous n’aimons pas. Certes nous préférons combattre la « haine des musulmans ». Mais la question posée aujourd’hui n’est pas du tout celle du droit ou non de critiquer une religion. Ce droit n’est pas mis en cause. Le mot aujourd’hui désigne autre chose dans l’esprit public et dans la réalité. Il s’agit de combattre une attitude de haine aveuglée poussant aux mauvais traitements et au crime contre les croyants réels ou supposés d’une religion. C’est ce que dit expressément le texte que j’ai signé à propos de l’islamophobie : « Quel que soit le nom qu’on lui donne, il ne s’agit plus ici de débats d’idées ou de critique des religions mais d’une forme de racisme explicite qui vise des personnes en raison de leur foi ». Les lois liberticides dont parle aussi ce texte ne sont pas nommées. C’est dommage. Cela permettrait de clouer le bec à ceux qui semblent vouloir oublier le contenu récent des lois sur l’état d’urgence qui permettent tous les abus ou celle du Sénat contre le seul voile des parents accompagnatrices bénévoles de sorties scolaires.
Me faire donner des leçons de laïcité et d’intransigeance a l’égard des intrusions du religieux dans la politique est un moment savoureux. Car je n’ai pas oublié les indignations sélectives passées et même récentes des mêmes quand je ne voulais rien céder aux autres religions. Ceux-là ne savent pas que la laïcité n’est pas le fouet des maîtres mais l’appel des opprimés qui veulent croire chacun comme bon leur semble qu’un autre monde sera moins cruel que celui-ci. Et si nous nous chargeons plutôt de changer celui-ci ici et maintenant, ne perdons pas de vue de quoi nous parlent les croyants du peuple. Quand Marx parle de « l’opium du peuple » à propos de la religion, on gagne à lire davantage que les premiers deux-cent quatre-vingt signes, car à l’époque on ne pensait pas au format du tweet. Il explique : « La religion est le soupir de la créature opprimée, l’âme d’un monde sans cœur, comme elle est l’esprit des conditions sociales d’où l’esprit est exclu ». Depuis cette vue, après avoir vaincu chez nous les manigances de l’Église catholique contre la République jusqu’en 1920, nous avons vu changer bien des choses. Nous avons appris à connaître avec la « théologie de la Libération » en Amérique latine comment la religion pouvait aussi ne pas être qu’une drogue qui annule la volonté d’agir pour changer le monde mais parfois l’exact contraire. Je ne dis tout cela et ne déborde de mon sujet que pour donner à respirer dans une querelle pour le reste bien étouffante. Pour le reste je persiste et signe au nom du texte réel et du contexte cruel.
Je crois utile de publier ici le texte réel que j’ai signé et je demande en conscience à mes amis de toujours ce qu’ils trouvent vraiment à redire à ce qu’ils lisent !
« Depuis bien trop longtemps, les musulmanes et les musulmans en France sont la cible de discours venant parfois de « responsables » politiques, d’invectives et de polémiques relayés par certains médias, participant ainsi à leur stigmatisation grandissante.
Depuis des années, la dignité des musulmanes et des musulmans est jetée en pâture, désignée à la vindicte des groupes les plus racistes qui occupent désormais l’espace politique et médiatique français, sans que soit prise la mesure de la gravité de la situation.
Depuis des années, les actes qui les visent s’intensifient : qu’il s’agisse de discriminations, de projets ou de lois liberticides, d’agressions physiques de femmes portant le foulard, d’attaques contre des mosquées ou des imams, allant même jusqu’à la tentative de meurtre.
L’attentat contre la mosquée de Bayonne le 28 octobre en est la manifestation la plus récente et les services de l’État savent que la menace terroriste contre les lieux de cultes musulmans est grande.
Il a fallu que cette violence jaillisse aux yeux de tous, à travers l’humiliation d’une maman et de son enfant par un élu RN au conseil général de Bourgogne Franche Comté, pour que tout le monde réalise ce que des associations, des universitaires, des personnalités, des syndicats, militants et au-delà, des habitants, dénoncent à juste titre depuis des années :
L’islamophobie en France est une réalité. Quel que soit le nom qu’on lui donne, il ne s’agit plus ici de débats d’idées ou de critique des religions mais d’une forme de racisme explicite qui vise des personnes en raison de leur foi. Il faut aujourd’hui s’unir et se donner les moyens de la combattre, afin que plus jamais, les musulmanes et les musulmans ne puissent faire l’objet de tels traitements.
Puisque les discours et déclarations d’intention ne suffisent plus, parce que l’heure est grave, le 10 novembre à Paris nous marcherons pour dire :
– STOP aux discours racistes qui se déversent sur nos écrans à longueur de journée, dans l’indifférence générale et le silence complice des institutions étatiques chargées de lutter contre le racisme ;
– STOP aux discriminations qui visent des femmes portant le foulard, provoquant leur exclusion progressive de toutes les sphères de la société ;
– STOP aux violences et aux agressions contre les musulmanes et les musulmans, qui se retrouvent progressivement déshumanisés et stigmatisés, faisant d’eux des terroristes potentiels ou des ennemis de l’intérieur ;
– STOP aux délations abusives jusqu’au plus haut niveau de l’État contre des musulmans dont le seul tort serait l’appartenance réelle ou supposée à une religion ;
– STOP à ces dispositifs de surveillance de masse qui conduisent à une criminalisation pure et simple de la pratique religieuse : les conséquences, notamment pour des salariés licenciés et des familles déstabilisées sont désastreuses et ne peuvent plus être tolérées. Cette criminalisation se fait au détriment des libertés fondamentales et des principes les plus élémentaires d’égalité censés guider notre pays.
Nous, musulmans ou non, disons STOP à l’islamophobie et nous serons nombreux pour le dire ensemble le 10 novembre prochain à Paris.
Nous appelons toutes les organisations, toutes les associations, tous les collectifs, toutes les fédérations de parents d’élèves, tous les partis politiques, toutes les personnalités, tous les médias, toutes les personnes solidaires à se joindre à cet appel solennel et à répondre présent à la marche du 10 novembre prochain.
Il en va des libertés fondamentales de tous. Il en va de la dignité et de l’intégrité de millions de concitoyens. Il en va de notre unité à tous, contre le racisme sous toutes ses formes qui, aujourd’hui, menace une nouvelle fois la France. »

Dans un précédent post, j’ai proposé une contribution à l’analyse de la révolution citoyenne au Liban. J’y étudiais ses causes et ses manifestations selon la grille de lecture de la théorie de « l’ère du peuple ». Dans la vague révolutionnaire qui déferle en ce moment sur la planète, il y a des choses utiles à apprendre de chacun des cas. Et leur étude précise montre comment ces événements partagent un ensemble de formes et de méthodes qui constitue le moment politique mondial. Si les révoltes des peuples se ressemblent c’est que leurs causes sociales autant que la culture mondialisée dans laquelle ils prennent place se sont uniformisées. L’émergence, pour la première fois, d’un mode unique planétaire de gestion de la société, le néolibéralisme, a généré une riposte d’une forme commune a toutes les sociétés, elle aussi : la révolution citoyenne. À présent, j’écris sur celle qui ébranle l’Irak depuis le début du mois d’octobre. 
J’ai fait le choix de commencer ce tour d’horizon par les pays hors Amérique du sud alors même que celle-ci une nouvelle fois a ouvert le chemin. Je l’ai fait pour tester la valeur d’une grille de lecture qui s’est forgée sur ce continent au moment où les prévisions de cette méthode se réalisent si loin de la matrice de départ. La méthode de travail consiste à ramasser toute la documentation qui est disponible à travers les récits de presse et les vidéos qui remontent du terrain, à interroger des spécialistes du domaine et des amis sur place ou de retour.  En compilant les observations de faits, on trace le tableau. Que s’est-il passé avant ? Quel est le déclencheur ? Comment se déroule l’action ? Qu’y voit-on ? Quelle revendication, quel milieux atteint-elle ? Et ainsi de suite.      
On reconnaît dans la mobilisation populaire en Irak un processus présent dans toutes les autres situations révolutionnaires. Au point de départ, une revendication ou plusieurs concernant l’accès aux services publics. Puis le mouvement social « transcroît », passe à une autre forme qui en est la conséquence. C’est le moment « dégagiste » ou la légitimité des décideurs est mise en cause. Au commencement, donc, les manifestations actuelles sont héritières de plusieurs mouvements en faveur des services publics. En Irak, sous les radars médiatiques mondiaux, ils ont eu lieu sans pause depuis 2015. Mais désormais, le peuple demande aussi le départ de tout le personnel politique et de toutes les structures politiques dirigeantes en exercice. Toutes sont assimilées à un résultat de l’occupation américaine. Dans le contexte d’un tel pays, on ne saurait imaginer plus vaste remise en cause. Le fond de l’air dégagiste se sentait déjà dans les résultats des élections législatives de mai 2018. En effet elles avaient été dominées par une importante grève civique. 44% des électeurs irakiens seulement étaient allés voter : la participation la plus basse depuis 2003. Et ceux qui sont allés voter ont placé en tête Mokthada Al-Sadr, en alliance avec le parti communiste irakien, qui défendait un programme de lutte contre la corruption et pour le changement institutionnel. 
Pour entrer dans une vue plus approfondie, il faut manier les instruments de mesure de la théorie de l’ère du peuple. L’Irak est un pays qui a connu depuis 2003 plus de 10 ans de guerre continue. Et dans le même temps, le pays a connu une forte explosion démographique. L’évolution de sa population correspond à l’envolée décrite dans l’ère du peuple comme fait générateur d’une précipitation de l’Histoire. Il y a cent ans, il n’y avait que 3 millions d’habitants en Irak. En 1999, on passe à 22 millions, puis 40 millions désormais. En 2050, il y aura 50 millions d’irakiens. Cette explosion a produit deux choses : une population jeune et une concentration urbaine subite. L’âge moyen des Irakiens est de 20 ans. L’aire urbaine de Bagdad est l’une des plus grande du monde, avec 13 millions d’habitants. 
Aucun des réseaux collectifs qui structurent la vie des sociétés urbaines n’a suivi cette évolution. Ni en terme d’extension ni bien sûr en amélioration. D’abord, l’essentiel des capitaux ont été orientés vers l’effort de guerre. Et les Américains ont organisé pendant leur occupation un pillage des richesses par leurs entreprises privées. Résultat : les Irakiens se retrouvent avec des services publics et des infrastructures en ruine. Un des cas les plus graves est celui de l’eau. Il a provoqué déjà des manifestations importantes durant l’été 2018 quand d’importantes parties de l’Irak étaient en situation de pénurie d’eau. Et pour cause : entre les réservoirs d’eau douce et la consommation finale, il y a 60% à 70% de pertes. Le ministère en charge de la gestion de la ressource en eau est l’un des plus petits budgets du gouvernement irakien. De ce fait qui n’est pas unique en son genre sur place, il y a en Irak de nombreuses coupures d’accès aux réseaux collectifs du fait du défaut d’investissements publics d’intérêt général. 
Le dysfonctionnement du réseau de distribution de l’eau alimente aussi l’un des griefs qui s’exprime avec le plus de force dans les rangs du peuple en action : la protestation contre la corruption des « élites » politiques et sociales. La corruption est un des modes les mieux répandu et documenté comme forme ordinaire de prédation des richesses publiques par l’oligarchie. Ce n’est pas un phénomène marginal. Il occupe au contraire une fonction de rouage central dans le circuit de la décision dans le monde du néolibéralisme. En Irak, la corruption s’étale sans vergogne. On parle ici de faux contrats, de fausses commissions qui permettent aux milieux proches du pouvoir de se faire rémunérer en contournant tous les circuits légaux. Un exemple célèbre sur place est donné et c’est précisément sur la question du réseau d’eau et de son état lamentable. En 2015 un « grand rapport » a été demandé, décidé et financé pour évaluer la situation et proposer un plan de marche à suivre pour remettre d’aplomb ce réseau . Une entreprise privée a été payée 36 millions de dollars pour le faire. Le rapport n’est jamais sorti. Il n’existe pas. C’était juste une combine pour détourner de l’argent public de son usage d’intérêt général. 
Partout dans le monde, la question des réseaux, et particulièrement celui de l’eau, rencontre dorénavant le fait géologique de l’ère du peuple : l’anthropocène. L’activité humaine provoquée par l’explosion du nombre modifie radicalement l’écosystème planétaire. Ainsi de l’augmentation des températures. En 2016, à Bassora, dans le sud de l’Irak, on a enregistré une température maximale de 53,9° Celsius. Presque le record absolu mondial. Ce phénomène a évidemment des conséquences sur le cycle de l’eau. D’une part, cela accélère son évaporation et d’autre part, cela rend les épisodes de pluies diluviennes plus intenses. Or, la plupart de l’eau douce irakienne est stockée dans des lacs artificiels à l’air libre.  L’évaporation est donc maximale. Du coup, alors que l’Irak dispose en théorie de plus de ressource en eau douce par habitant que le Royaume-Uni ou l’Allemagne, il se retrouve dans des situations de pénuries. 
L’eau est par ailleurs un sujet de tensions internationales dans le contexte irakien. En effet, l’Irak se trouve en aval du Tigre et de l’Euphrate. Les Irakiens sont donc confrontés aux politiques hydriques de la Turquie et de l’Iran qui sont en amont de ces fleuves. Or, pour l’un comme pour l’autre, cela consiste essentiellement à installer de plus en plus de barrages de façon à pouvoir retenir l’eau et, par conséquent, réduire largement le débit des deux fleuves lorsqu’ils arrivent en Irak. Les deux puissances seront bientôt capables de contrôler entièrement l’approvisionnement en eau douce des Irakiens. L’Iran gère par ailleurs une partie de ses eaux usées en les reversant directement dans des affluents qui finissent dans les eaux fluviales irakienne. Cette eau arrive en Irak contaminée et impropre à la consommation. Étant donné le mauvais état, voir l’inexistence du réseau de traitement des eaux usées, il y a des conséquences sanitaires graves. En 2018, à Bassora, 100 000 personnes ont été victime d’intoxication hydrique. 
Cette perte humiliante de contrôle, donc de souveraineté, sur une ressource aussi essentielle est en rapport direct avec le contenu et la dynamique de la révolution en cours. Elle alimente une importante composante patriotique de la mobilisation. Comme au Chili, en France, en Algérie ou au Liban, les manifestations et rassemblements sont saturés de drapeaux nationaux. Ici comme ailleurs, ils sont les symboles de l’affirmation de la communauté politique commune par-dessus toute les autres. Dans le contexte d’une société déchirée par l’instrumentalisation politique des conflits religieux, et des années après la liquidation du régime baassiste qui avait instrumentalisé cette position sous Saddam Hussein, le retour du national comme moyen de rassemblement est un évènement. 
C’est donc un même mouvement qui veut récupérer des droits communs pour tous les citoyens et celui qui met en cause l’ingérence étrangère proche ou lointaine. La revendication par le peuple de sa pleine souveraineté est un tout. En Irak, cela se matérialise d’abord par le rejet des ingérences étrangères des États-Unis et de l’Iran. Il est dit que ces deux pays sont les « parrains » de tous les gouvernements irakiens depuis 2003. Dès lors, les manifestants mobilisés refusent aussi le système politique ethno-confessionnel mis en place par les États-Unis et qu’utilise si bien l’Iran. Ces mouvements le voient désormais comme une manière d’organiser institutionnellement la main-mise sur leurs vies et sur les institutions avec lesquelles se prennent les décisions. Il me paraissait important de montrer comment le problème de la gestion de l’eau participe directement à la révolte contre la perte de souveraineté qui fait sortir les foules dans la rue. 
Ce n’est pas la seule conséquence politique de la dégradation des réseaux collectifs indispensables à la vie du peuple en Irak au moment où elle explose en raison de la guerre, de la corruption et des ingérences étrangères. Cette situation a accéléré, de l’autre côté, la sécession des riches. Elle atteint aussi des sommets. Là encore, c’est l’invasion américaine qui est déterminante pour le comprendre. Lorsqu’ils sont arrivés, les États-Unis sont venus avec leurs militaires mais aussi avec un grand nombre de leurs entreprises dans tous les domaines. Pour loger tout ce petit monde, les États-Unis ont créé un bout de ville au centre de Bagdad totalement fermé : la « zone verte ». Entourée de palissades et protégée par des mercenaires privés, ce quartier dans le centre de Bagdad regroupe les sièges des institutions irakiennes, de l’ambassade des États-Unis et des grandes entreprises étrangères. Très peu d’Irakiens peuvent y accéder physiquement. À l’inverse, les happy few qui y vivent n’ont jamais besoin d’en sortir, sauf pour aller à l’aéroport. Tous les services dont est privé le reste du pays existent dans ce petit bout de Bagdad. Il s’agit de l’une des formes les plus importantes de séparatisme social du monde. C’est un cas parfait d’inscription spatiale du clivage entre le peuple et l’oligarchie. 
L’épicentre de la mobilisation populaire se situe place Tahrir, à Bagdad. Cette place n’est séparée que par un pont de la « zone verte ». A plusieurs reprises, les manifestants ont tenté de le traverser et d’accéder au quartier du pouvoir. Les scènes rappellent les gilets jaunes mettant l’Élysée comme objectif à leurs manifestations. Cela explique sûrement la violence de la répression en face. En Irak, on tire à balles réelles. Depuis le début du mois d’octobre, il y aurait eu environ 200 morts et près de 10 000 blessés. Comme au Chili ou en France, la tactique du régime est de nier la violence de la répression, ce qui revient à en rajouter une autre. Des institutions étatiques sont utilisées pour justifier l’utilisation de la police et de l’armée comme milice des dirigeants en place. Le gouvernement irakien a du publier un rapport d’enquête. Il nie, contre l’évidence, toute ouverture de feu sur des manifestants. Les rapports entre la police et le peuple mobilisé est aussi un trait commun des révolutions citoyennes. Entre volonté de fraternisation et utilisation privative d’un corps d’État de la part du pouvoir, le bras de fer produit des évolutions incontrôlables. À leur tour, elles alimentent une bonne partie des turbulences qui embrasent la société mobilisée irakienne. 
À présent, le mouvement populaire a fait surgir la revendication de convoquer une Assemblée constituante. C’est le moment qui couronne l’accomplissement du processus de la révolution citoyenne. La question est de savoir si une telle assemblée finira par s’imposer comme solution à la crise politique. Au Chili c’est chose faite. Un référendum va déterminer si oui ou non le peuple chilien veut convoquer cette assemblée. Dans le déroulé du processus c’est décisif. En écrivant une Constitution, le peuple s’auto-défini et se constitue lui-même, donc, comme sujet politique permanent qui va se manifester à l’avenir dans des institutions qui correspondent au projet que la Constitution porte en elle. 
Les événements irakiens nourrissent la théorie de l’ère du peuple et de la révolution citoyenne. Ces évènements en Irak confirment enfin la place singulière de la participation en nombre des femmes a l’action. J’ai déjà évoqué à propos du Liban ce fait qui fonctionne comme un signal de la profondeur de la crise en cours et de l’ampleur du sursaut de la société que leur présence affirme. Le journal Le Monde a publié un magnifique reportage sur cette présence féminine en Irak, jusqu’au lieu central de l’affrontement avec le pouvoir : le pont face à la « zone verte ». Ce reportage permet de comprendre comment cette présence est un enjeu pour le pouvoir qui la craint et n’hésite pas à la cibler pour rétablir le climat de peur dont il a besoin. Cette présence n’est donc pas seulement une conséquence de la gravité de la situation mais un facteur « aggravant » de celle-ci en amplifiant le signal donné. Ceci nous oblige à penser que l’action ne peut se contenter d’enregistrer la présence ou non des femmes mais doit chercher au contraire à la faciliter et à l’encourager. Cette remarque se fait en général mais aussi en particulier à l’adresse des hommes et des hommes dans leurs familles qui restent souvent les derniers empêcheurs de la mobilisation des femmes en général ou de leur mère, de leurs épouses ou de leurs filles en particulier.   
Au total, les observations venues du terrain confirment la force propulsive que peut avoir un processus dégagiste. Ici, il fonctionne à plein dans un contexte où il s’agit pourtant de renverser un régime enkysté par des années de clanisme et de destructions sociales et civiques et soutenu par une occupation étrangère. Ils confirment la fécondité d’une stratégie fondée sur une compréhension des composantes et du sens des évènements. Dégagisme et Constituante sont autant d’opportunités d’action politique refondatrices de la société. Mais les évènements en cours dans le monde montrent qu’ils résultent d’un surgissement spontané plutôt que d’une action d’avant-garde éclairée. Il faut l’intégrer pour agir ensuite efficacement. C’est le moment de citer Kant : « la théorie sans la pratique est inutile, la pratique sans la théorie est aveugle. »  

Il ne faut pas faire confiance à Macron. Récemment à l’Assemblée nationale, ses députés ont décidé que les mesures accordées sous la pression aux gilets jaunes en décembre 2018 allaient être payées par la Sécurité sociale. Il s’agit des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires et de la baisse de la CSG pour une partie des retraités. 3 milliards d’euros en moins dans le budget de la Sécurité sociale qui ne seront pas compensés par l’État. Ce sont donc les salariés cotisants eux-mêmes qui vont payer directement et tout seuls. En sont dispensés les riches qui se contentent de participer si légèrement au budget de l’État qui ne compensera pas.
Mais il y a un autre domaine dans lequel Marron avait promis autre chose en décembre dernier : celui des frais bancaires. Le 22 décembre 2018, il avait réuni tous les patrons des grandes banques françaises à l’Élysée en grande pompe médiatique. Il affirmait avoir obtenu un engagement solennel de leur part. Les banquiers lui auraient juré de garantir le plafonnement des frais d’incidents bancaires pour les clients pauvres. Pas plus de 25 euros par mois et pas plus de 200 euros par an. Il nous avait alors assuré qu’une promesse de banquier, c’était du solide : on pouvait faire confiance. Les médias avaient acclamé et confirmé la propagande officielle. Pourtant il y avait anguille sous roche dès ce début. En effet la fédération patronale des banques s’étaient aussitôt empressé de préciser que « le montant plafonné sera fixé librement par chaque banque ».
Où en est-on presque un an plus tard ? On découvre qu’une fois de plus, c’était du vent. Un mensonge. Le plafonnement des frais bancaire n’existe pas. Cet été, deux associations, 60 millions de consommateurs et l’union nationale des associations familiales (UNAF), ont envoyé des « clients mystères » dans des agences des grandes banques pour tester la réalité de la mesure. Le résultat est sans appel. 78% des clients interdits bancaires ou surendettés n’ont bénéficié d’aucune limite de frais alors qu’ils devraient y avoir droit automatiquement. Et 91% des clients ayant un revenu inférieur à 1800 euros n’ont bénéficié d’aucun plafonnement.
On en reste donc à la situation catastrophique déjà constatée en 2017 dans une enquête par ces deux associations. Elles avaient révélé qu’un cinquième des clients en difficulté se voyait prélevé au moins 500 euros par an en frais divers. Cela peut être des commissions facturées lorsqu’un paiement se présente à la banque sans provisions suffisantes, des frais de rejet de prélèvement ou le coût retenu sur des lettres d’information sur la situation envoyée par la banque à son client. En tout, c’est une ponction de 6,5 milliards d’euros que les banques réalisent sur le dos de leurs clients. Accéder au réseau bancaire n’est pas un choix dans nos sociétés. Pour payer son loyer, le gaz, l’électricité, pour recevoir son salaire : c’est une nécessité vitale. Ces frais sont donc en réalités des taxes : il n’y a pas moyen d’y échapper.
Sauf que ces taxes forment un impôt privé. Leur finalité n’est pas de financer l’intérêt général à travers les services publics ou l’entretien des infrastructures mais de nourrir des dividendes pour les actionnaires de la banque. C’est donc de l’argent pris aux pauvres et directement envoyé dans la sphère financière, d’où il ne redescendra plus. Il faut donc faire cesser cet obstacle rencontré par pleins de gens pour accéder à un service dont ils ne peuvent se passer. Il s’agit d’un pur parasitage sans utilité pour la société. Pour changer ça, inutile de faire confiance à des gens déjà capables d’une telle prédation aussi immorale. En République, l’intérêt général s’impose par la force de la loi. Nous avons donc déposé une proposition de lois contre les frais bancaires abusifs. Elle est prête. On peut la dégainer à tout moment si le vent souffle assez fort.

Nicole Belloubet est la ministre de la Justice. Son action n’est pas seulement, comme celle de tous ses collègues, un mensonge permanent sur les moyens réels en baisse tandis que ses annonces les disent en hausse. Son bilan est un sujet de honte pour notre pays. Elle est responsable d’un glissement désastreux pour la vie publique. Jamais l’instrumentalisation politique de la justice n’a été aussi grand. Jamais les lois n’ont été aussi hostiles aux libertés individuelles. Jamais les tribunaux n’ont été autant pressionnés pour faire preuve de férocité contre les leaders du peuple, qu’ils soient syndicalistes, écologistes ou politiques. Jamais les réseaux d’affinités politiques n’ont autant gouverné les désignations et les décisions de poursuites.
Mais ce n’est peut-être pas le pire. Après tout, qu’une personne qui a changé de camp comme cet ex « gâtée-pourrie » des promotions éclairs du temps du PS soit aussi un caméléon actif dans un gouvernement de dérive autoritaire, c’est dans l’ordre des choses chez une telle opportuniste. Le pire ce n’est pas ce qu’elle fait mais ce qu’elle ne fait pas. Elle ne dit mot quand un syndicat d’extrême-droite dans la police menace les juges. Elle ne dit rien quand ses services laissent faire des fuites illégales innombrables et elle ne déclenche aucune enquête quand les plaintes sont déposées. Elle laisse impunis les pires errements de violence policières. Elle ferme les yeux quand des actes abominables sont commis dans ce domaine. Par exemple dans le sort infligé aux Tchadiens de Montreuil à l’occasion de leur expulsion. Mais à qui elle inflige pourtant des poursuites pour rébellion et incitation à la rébellion après qu’ils ont été roués de coups. Elle couvre de son silence la lenteur du procureur qui a laissé passer des jours à refuser l’ouverture de l’enquête sur la mort du jeune Ibrahima que j’ai déjà raconté dans un précèdent post.
Plus récemment, Manon Aubry a découvert de drôles de centres de rétention de réfugiés. Ils ressemblent en effet bien fort à des structures d’enfermement et de privation de liberté. Mais ils sont pudiquement rebaptisés « centre de mise à l’abri ». Une totale violation du droit des étrangers qui ne peut exister ni durer sans son accord. On avait vu avec le procès de Bobigny contre six insoumis comment elle avait instrumentalisé la justice pour organiser sa guerre judiciaire contre nous (lawfare), un procès traquenard avant de chercher à le faire trainer avec un demande de report qui fut finalement rejetée. Et pour finir, le parquet, qui avait pourtant mandaté deux procureurs à l’audience, battit en retraite avec des peines d’amendes et une demande de prison réservée à moi seul sur les six présents. Mais il y a eu pire depuis : Le Canard enchaîné a affirmé que Belloubet s’apprêtait à faire la carte des tribunaux où seraient maintenus des juges d’instruction en fonction des résultats électoraux favorables ou non au parti de son protecteur, le président Macron, et à son nouveau parti, « La République en marche ».
Il ne s’agissait pas de croire Le Canard enchainé sur parole, cela va de soi. Mais Belloubet a avoué devant l’hémicycle rempli à l’Assemblée nationale. Pire, elle a aggravé son cas en expliquant que le document cité par Le Canard n’était pas une note (ce que personne n’avait prétendu) mais « un courrier de cabinet a cabinet ». Terrible aveu. Le cabinet de Belloubet cherche à s’accorder avec un autre cabinet ministériel extérieur à celui de la Justice pour organiser la répartition des juges d’instruction sur le terrain. Jamais une telle manipulation de la Justice ni les pressions sur son personnel n’avaient été aussi cyniquement assumés. « L’État RPR » que nous dénoncions dans le passé n’était rien à côté de l’État macronisé, et c’est certainement dans la justice que c’est le plus visible, le plus grossier et le plus brutal. Cela constitue une dérive d’une importance qui ne peut pas être sous-estimée quand on la met en rapport avec la dérive autoritaire globale du pouvoir macroniste dans le contexte global du moment social en France.
Belloubet devient une figure essentielle du système répressif macroniste et certainement son élément le plus important puisque c’est elle qui orchestre les manipulations judiciaires contre les dirigeants politiques de l’opposition et même ceux de la majorité qu’elle a dans son viseur. C’est elle qui pousse à la « fermeté » des juges contre les gilets jaunes, et ainsi de suite. Nous envisageons donc de la faire connaître au niveau international parce que les campagnes contre le lawfare ont besoin d’être rendu lisibles pour l’opinion. Le cas de Lula s’est popularisé aussi à partir du moment où le nom du juge Moro a été capté comme celui de l’homme responsable de cette manipulation judiciaire. Un visage humain est ainsi donné à l’exécution d’une politique qui a tant besoin d’invisibilisation de ses responsables. Dire Belloubet = 1000 condamnations à de la prison, c’est a la fois plus juste, plus humain et donc plus vrai que de mettre en cause des abstractions comme « la Justice ». D’ailleurs ce n’est pas de la Justice. À la veille d’évènements comme ceux qui se dessinent, Nicole Belloubet fait partie des personnes qui doivent être tenues pour responsable de la violence du régime avec Castaner et cette partie du réseau du PS rallié a Macron.

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