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jeudi 12 avril 2018

Des concessions pour les avocats sur la réforme de la justice.....


12 avril 2018

Des concessions pour les avocats sur la réforme de la justice

Le dialogue avec la chancellerie se poursuit sur fond de mobilisation

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Alors que le mouvement de protestation des avocats contre le projet de loi de programmation de la justice a surpris le gouvernement, notamment en régions, Nicole Belloubet, garde des sceaux, a fait des concessions pour tenter de déminer le terrain. Lundi 9  avril, deux jours avant la manifestation nationale prévue mercredi à Paris, la ministre de la justice a encore reçu la présidente du Conseil national des barreaux (CNB), Christiane Féral-Schuhl, le président de la Conférence nationale des bâtonniers, Jérôme Gavaudan, et la bâtonnière de Paris, Marie-Aimée Peyron. Cette réunion a été qualifiée de " positive " par plusieurs participants.
Malgré les retouches obtenues par les avocats depuis un mois et qui ont donné lieu, le 4  avril, à une saisine rectificative du Conseil d'Etat sur le projet de loi soumis pour avis par la chancellerie, la bronca des barreaux ne faiblit pas. " Tant qu'on gagne, on joue ",résume un conseiller des avocats dans ces négociations. Lundi, la garde des sceaux et les représentants des avocats ont prévu de se retrouver le 19  avril, au lendemain de l'examen du projet de réforme en conseil des ministres. Avec notamment l'objectif de travailler les sujets qui pourraient faire l'objet d'amendements lors de la discussion au Parlement.
M.  Gavaudan, qui a été reçu à déjeuner par le premier ministre, Edouard Philippe, début avril, avec ses deux consœurs, reste inquiet sur le fond d'" un projet de loi qui éloigne le justiciable du juge ".Mais il se réjouit qu'un calendrier de rencontres soit prévu avec la chancellerie. Le ministère de la justice doit en outre transmettre prochainement une note précisant les nouveaux champs où la présence d'un avocat aux  côtés du justiciable sera obligatoire. Un sujet très sensible dans une profession dont une frange croissante s'est paupérisée depuis quinze ans.
Une journée " justice morte "Déjà, les avocats ont obtenu que soit supprimée du projet de loi la possibilité de recourir à  une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité sans avocats. Une mesure que certains magistrats appelaient de leurs vœux, prenant l'exemple d'un délinquant de la route qui reconnaît l'infraction et accepte la sanction proposée par le parquet mais ne souhaite pas être obligé de payer un avocat en plus.
Dans les mesures qui peuvent être considérées comme catégorielles, l'obligation, avant de se tourner vers la justice pour un litige civil, de recourir à la conciliation est élargie à  la médiation et à la procédure participative, deux domaines d'intervention des avocats. De même, l'idée de confier aux notaires la gestion des saisies immobilières a été abandonnée alors que les capitaux ainsi immobilisés permettent d'alimenter les caisses (Carpa) gérées par les ordres d'avocats. En matière de procédure pénale, l'article de loi qui devait permettre au magistrat de faire par visioconférence l'interrogatoire de première comparution a aussi été retiré du projet de Mme Belloubet. Aujourd'hui, les représentants des avocats sont décidés à continuer d'obtenir des  avancées  de la ministre.
Du côté des magistrats, la stratégie est différente. Les deux premiers syndicats (Union syndicale des magistrats et Syndicat de la magistrature) sont sur la même longueur d'ondes que les avocats, et ont appelé avec les greffiers et les syndicats des fonctionnaires de la justice à une journée " justice morte " mercredi. Mais ils ont refusé toute discussion avec la chancellerie depuis la présentation du projet de loi, le 9  mars.
Lundi, deux cent cinquante juges d'instance ont signé une lettre ouverte au premier ministre et à la ministre de la justice pour " sauver la justice de proximité ". En dépit de la promesse de Mme Belloubet de ne fermer aucun lieu de justice, la fusion des tribunaux d'instance avec les tribunaux de grande instance et la suppression du statut de juge d'instance font craindre un désintérêt, voire un déclassement, de ce contentieux par la justice. La lettre du projet de loi ne le prévoit pas, son exposé des motifs non plus, mais elle le rend possible. C'est cette même crainte de transferts de certains contentieux vers les grands tribunaux ou les grandes cours d'appel, que Mme Belloubet souhaite permettre pour offrir de la souplesse aux juridictions, qui alimente l'inquiétude sur le risque de dévitalisation lente des petits tribunaux et des petites cours.
A l'Union syndicale des magistrats comme au Syndicat de la magistrature, on juge " marginales " les concessions obtenues par les avocats et on préfère se concentrer sur le second round, celui qui se déroulera lors du débat parlementaire. Il est officiellement censé débuter fin mai.
Jean-Baptiste Jacquin
© Le Monde

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