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vendredi 3 novembre 2017

En Erythrée, le régime aurait fait tirer sur la foule

3 novembre 2017.

En Erythrée, le régime aurait fait tirer sur la foule

Des manifestants, dont des enfants, auraient été tués alors qu'ils protestaient contre la fermeture d'une école mardi

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C'est une expression de mécontentement rare en Erythrée, l'un des pays les plus fermés au monde. Une centaine de manifestants sont descendus dans les rues de la capitale, Asmara, mardi 31  octobre, pour réclamer la réouverture de l'école islamique Al-Diaa, fermée par le gouvernement fin octobre. Alors que les élèves, accompagnés de leur famille, se dirigeaient vers le centre-ville pour protester contre la fermeture de leur école, la police aurait tiré sur les manifestants. Peu d'éléments sont disponibles sur les circonstances de l'événement, mais plusieurs vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des personnesfuyant les coups de feu dans les rues d'Asmara.
Selon Red Sea Afar Democratic Organization, un groupe d'opposition basé en Ethiopie, pays voisin et ennemi de l'Erythrée, la répressionaurait fait 28 morts et plus de 100 blessés, dont de nombreux enfants. Mais ces informations n'ont pu être confirmées de source indépendante. L'ambassade américaine a évoqué " des coups de feu en plusieurs endroits d'Asmara en raison de manifestations " et appelé " les citoyens américains à éviter le centre-ville, où les manifestations semblent les plus importantes ",dans un message, mercredi 31  octobre. " Les rues dans le centre-ville pourraient être fermées, et la police continue à maintenir une importante présence ", a précisé l'ambassade.
Une semaine plus tôt, le 27  octobre, le directeur de l'école privée islamique Al-Diaale nonagénaire Haji Musa, très respecté dans la communauté musulmane d'Asmara, " a été arrêté avec ses professeurs, qui sont détenus depuis dans la prison centrale d'Asmara ",indique Awate, un site d'information proche de l'opposition. La fermeture de l'école fait suite à un projet dugouvernement visant à placer toutes les écoles du pays sous tutelle publique. Depuis quelques mois, lesautorités cherchent à reprendre le contrôle des écoles confessionnelles,musulmanes et orthodoxes, restées ouvertes malgré la décision officielle.
" Le gouvernement a peur "" En Erythrée, la religion est un problème de sécurité nationale, explique Amanuel Ghirmai Batha, de Radio Erena, une station érythréenne basée à Paris. Ils veulent imposer la laïcité dans les écoles, supprimer les symboles religieux, et notamment le hijab. C'est particulièrement sensible dans la communauté musulmane, car certaines familles refusent que leurs filles aillent à l'école sans voile. " -Selon le journaliste de Radio Erena, qui dispose d'un solide réseau de correspondants clandestins, le gouvernement a déployé l'armée dans les rues d'Asmara et arrêté plusieurs manifestants, pour la plupart des mineurs.
Une information niée par le gouvernement. Sur Twitter, le ministre érythréen de l'information, Yemane Gebremeskel Meskel,a parlé d'une " petite manifestation, par une école à Asmara (…), dispersée sans qu'il y ait eu de victimes ". Le média d'Etat, Eri TV, décrit cependant les manifestants comme des " terroristes ", des " djihadistes ".
Pour Selam Kidane, la coordinatrice du projet Freedom Friday (" les vendredis de la liberté "), une initiative lancée en  2011 pour mobiliser la population contre le régime, " sans surprise, le régime veut faire passer ce mouvement pour une tentative d'affirmation de la communauté musulmane. Or, toutes les religions sont concernées. Des chrétiens ont, eux aussi, participé à la manifestation et certains ont été arrêtés ". Et de conclure : " Tout cela montre que le gouvernement a peur. Il voit le potentiel des manifestations, c'est pour cette raison qu'il a fait appel à l'armée. "
Le régime érythréen, tenu d'une main de fer depuis 1993 par le président Issayas Afeworki, est l'un des plus répressifs au monde. En  2016, une commission d'enquête de l'ONU l'avait accusé de crimes contre l'humanité à grande échelle.
Ghalia Kadiri
© Le Monde

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