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samedi 8 décembre 2018

A Guidel, le désarroi des familles d’enfants nés sans bras - le 8.11.2018

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A Guidel, le désarroi des familles d’enfants nés sans bras
Face à l’inquiétude de la population, les experts n’écartent « aucune hypothèse »
GUIDEL (MORBIHAN)- envoyé spécial
Rien ne vous sera caché. » La promesse a été faite d’emblée par François Bourdillon, directeur général de Santé publique France (SPF), aux habitants de Guidel (Morbihan) réunis mardi 6 novembre au soir dans une salle municipale. A ses côtés : sept responsables d’agences sanitaires et médecins. Face à eux : environ 200 personnes, parmi lesquelles plusieurs parents d’enfants nés sans bras ou sans mains. Dans cette commune bretonne de 11 500 habitants, quatre enfants atteints d’une semblable malformation congénitale (agénésie transverse des membres supérieurs) sont nés entre 2011 et 2013.
Ce nombre anormalement élevé de cas similaires a été signalé aux autorités dès 2015. Avec la médiatisation de situations identiques identifiées dans l’Ain et en Loire-Atlantique, l’affaire a pris une ampleur nouvelle. La réunion publique organisée mercredi par la municipalité de Guidel s’est déroulée dans un contexte national tendu. L’agence Santé publique France, chargée de superviser les recherches sur le sujet, a été critiquée pour sa gestion du dossier. Fin octobre, la ministre de la santé, Agnès Buzyn, a annoncé l’ouverture d’une nouvelle enquête confiée à SPF et à l’Agence nationale de sécurité sanitaire.
« Quand ma petite-fille me pose des questions, je lui dis quoi ? Je lui explique quoi ? », a interrogé le grand-père d’une enfant atteinte d’agénésie, la voix tremblante. « Il faut lui dire qu’on ne sait pas, a répondu François Bourdillon. Parce que c’est la réalité. » Face à la population, les spécialistes ont détaillé les causes connues (génétiques, notamment) pouvant entraîner une agénésie, les facteurs « présupposés » de son apparition (d’ordre toxique et environnemental), ainsi que l’organisation du « dispositif de surveillance, d’investigation et de recherche ». A Guidel, ledit dispositif a permis de conclure « qu’il y avait un fort excès de cas [de pathologies] »par rapport à la moyenne nationale. Mais, ici comme ailleurs en France, les recherches « poussées » qui ont été menées n’ont « pas permis d’identifier de facteurs explicatifs ».
Cette absence de réponse à la question que tout le monde se pose a été au cœur des échanges avec le public, inquiet mais satisfait d’obtenir certaines réponses. L’incidence éventuelle de l’exposition à des produits phytosanitaires a été soulignée à de nombreuses reprises par des habitants. Les experts sont demeurés formels, expliquant notamment qu’une des familles concernées vivait à l’époque en centre-ville, et non à la campagne – ce qui diminue a priori la probabilité d’exposition à ces substances –, que le lien entre pesticides et malformations congénitales n’est pas avéré et que les « sources d’exposition aux produits toxiques peuvent aussi être domestiques »« Toutes les hypothèses » doivent encore être envisagées, ont-ils expliqué.

« On a été oublié »

Une rumeur d’étonnement a parcouru l’assistance lorsqu’une mère a évoqué son cas. « Ma fille, née en 2011, a une agénésie de la main droite, a expliqué la jeune femme, très émue. J’habite à Calan [à 25 kilomètres de Guidel]. Pourquoi on n’a jamais reçu de questionnaire ? On a été complètement oubliés ! » Dans la foulée, plusieurs parents ont fait état de semblables situations.
Explication : les services de l’Etat ont, jusqu’à présent, cantonné leurs investigations à la commune de Guidel, pour des raisons « méthodologiques » et « de moyens ». M. Bourdillon a reconnu les « limites » des études disponibles. Interrogé à l’issue de la réunion, le maire de Guidel, Jo Daniel, affirmait avoir eu connaissance, ces dernières semaines, de « six ou sept cas » d’enfants nés dans un rayon d’une vingtaine de kilomètres autour de la commune et concernés par des handicaps semblables à ceux dont sont atteints les quatre enfants guidélois.

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