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vendredi 16 juin 2017

Les Crises.fr - Le New York Times applaudit l’essor des algorithmes de censure, par Robert Parry

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16
Juin
2017

Le New York Times applaudit l’essor des algorithmes de censure, par Robert Parry


Source : Consortium News, Robert Parry, 02-05-2017.
Exclusif: The New York Times applaudit l’avenir orwellien de la « démocratie » occidentale où des algorithmes traquent rapidement et éliminent les informations que le Times et les autres publications mainstream n’aiment pas, rapporte Robert Parry.
Juste quelques jours après avoir brandi le Premier Amendement au cours du dîner des Correspondants de la Maison Blanche – pour célébrer la liberté de la presse – les médias mainstream américains reviennent sur une idée très différente : comment utiliser des algorithmes pour purger internet de ce qui est jugé être des « fake news », c’est-à-dire ce que les mainstream jugent être de la « désinformation ».
Le bâtiment du New York Times à New York (photo de Wikipedia)
Le New York Times, un des principaux promoteurs de ce nouveau modèle orwellien de censure, a dédié les deux tiers d’une page de ses éditions du mardi à un article élogieux sur des entrepreneurs high-tech qui peaufinent une intelligence artificielle qui peut traquer et éradiquer les soit-disant « fake news ».
Pour justifier cette stratégie draconienne, le Times cite seulement une « fake news » qui prétend que le candidat aux présidentielles préféré de l’establishment français, Emmanuel Macron, a reçu des fonds de l’Arabie Saoudite, une histoire bizarroïde publiée par un site web qui a pris l’aspect du journal Le Soir et qui a été localisé dans le Delaware par un numéro de téléphone.
Donc, alors que des tels articles intentionnellement fabriqués, de même que des théories du complot sans fondement, sont bannis d’internet – et méritent bien sûr d’être clairement condamnés – le Times ne réfléchit pas sur les dangers potentiels d’avoir un groupe sélectionné d’entités journalistiques mainstream fondant leur jugement sur ce qui est vrai ou ce qui ne l’est pas sur des algorithmes qui vont gommer d’internet toute opinion contraire.
Étant donné que le Times est membre de la First Draft Coalition fondée par Google – avec d’autres publications mainstream telles que le Washington Post et le site de propagande pro-OTAN Bellingcat – cette idée d’élimination de l’information qui va contre ce que le groupe affirme vrai peut sembler assez fascinant pour le Times et les autres initiés. Après tout, il pourrait sembler cool d’avoir un outil high-tech qui bâillonne vos critiques automatiquement.
Mais vous n’avez pas besoin d’une très grande imagination pour voir comment cette combinaison de pensée collective mainstream et d’intelligence artificielle pourrait créer un avenir orwellien dans lequel une seule face d’une histoire est racontée et où l’autre face disparaît purement et simplement de la vue.
Tout comme le Times, le Post, Bellingcat et les autres se considèrent comme la source de toute sagesse, la réalité est qu’ils ont tous fait d’importantes erreurs journalistiques, contribuant parfois à des crises internationales terribles.
Par exemple, en 2002, le Times a signalé que l’achat de tubes en aluminium par l’Irak révélait un programme d’armes nucléaires secrètes (alors que les tubes étaient en fait pour l’artillerie) ; le Post a écrit comme un fait avéré que Saddam Hussein cachait des stocks d’ADM (qui en réalité n’existaient pas) ; Bellingcat a faussé la portée d’une roquette syrienne qui a répandu du sarin dans un faubourg de Damas en 2013 (ce qui a donné l’impression que le gouvernement syrien était coupable alors que la fusée est apparemment issue d’un territoire contrôlé par les rebelles).
Ces faux compte-rendus – et beaucoup d’autres provenant des médias traditionnels – ont été contestés en temps réel par des experts qui ont publié des informations contraires sur Internet. Mais si la First Draft Coalition et les algorithmes étaient en capacité de contrôler, les épurateurs d’informations auraient pu enlever les évaluations des contradicteurs comme étant des « fausses nouvelles » ou une « mauvaise information ».
Des risques de totalitarisme
Il devrait également y avoir la peur – même parmi ces gardiens auto-proclamés de la « vérité » – que leurs algorithmes pourraient un jour être utilisés par un régime totalitaire pour piétiner les dernières braises de la démocratie réelle. Cependant, si vous cherchez une telle réflexion, vous ne le trouverez pas dans l’article de Mark Scott dans le Times. Au lieu de cela, le Times glorifie les créateurs de ce Brave New World.
Affiche de Big Brother illustrant le roman de George Orwell sur la propagande moderne, 1984.
« Dans la lutte contre les fausses nouvelles, Andreas Vlachos, un chercheur en informatique grec vivant dans une ville anglaise du nord, est en première ligne », ajoute l’article. « Fort d’une décennie d’expertise en apprentissage machine, il fait partie d’une start-up britannique qui publiera prochainement, avant les élections nationales début juin, un outil automatisé de vérification des faits ». Il préconise également une compétition mondiale où s’affronteront les sorciers informatiques des États-Unis et de la Chine, pour utiliser l’intelligence artificielle dans la lutte contre les fausses nouvelles…
« Alors qu’après la victoire du président Trump aux États-Unis, l’Europe se prépare à plusieurs élections cette année, M. Vlachos, 36 ans, fait partie d’un nombre croissant d’experts technologiques à travers le monde qui exploitent leurs compétences pour faire face à la désinformation en ligne… Les informaticiens, les géants de la technologie et les start-up utilisent des algorithmes et des tonnes de données en ligne pour, en un instant et automatiquement, localiser les fausses nouvelles plus rapidement que les groupes traditionnels de vérification des faits ».
The Times cite sans aucun scepticisme les promoteurs de cet effort de censure high-tech :
« Les Algorithmes se chargeront de la grosse partie du travail lourd nécessaire pour lutter contre la désinformation », a déclaré Claire Wardle, responsable de la stratégie et de la recherche chez First Draft News, une organisation à but non lucratif qui s’est associée à des entreprises technologiques et à des salles de rédaction pour dénoncer de faux rapports sur les élections aux États-Unis et en Europe. « Il est impossible de faire tout cela à la main. »
L’article poursuit : « Jusqu’à présent, les fausses nouvelles pures ont été relativement rares [en Europe]. Au lieu de cela, les faux rapports proviennent plus souvent d’Européens sur les réseaux sociaux qui mettent de vraies informations hors contexte, ainsi que de fausses affirmations diffusées par des groupes soutenus par des états, tel Sputnik, l’organisation de presse russe. »
Peu de preuves nécessaires
Bien qu’il ne fournisse aucun détail sur la prétendue culpabilité de Sputnik, l’article du Times pointe vers un autre article d’Andrew Higgins, dans le Times du 17 avril, qui accuse le réseau russe Russia Today de « fausses nouvelles » car il a détecté dans des sondages d’opinion une poussée de François Fillon, accusé dans les médias mainstream d’avoir une relation positive avec le président russe Vladimir Poutine. Curieusement cependant, plus loin dans le récit, Higgins reconnaît que « dernièrement, M. Fillon est remonté dans des sondages d’opinion. »
Le président russe Vladimir Poutine, après son discours à l’Assemblée générale des Nations Unies le 28 septembre 2015. (Photo de l’ONU)
(En fin de compte, Fillon a terminé bon troisième avec 20 pour cent des voix, un point derrière Marine Le Pen du Front National et quatre points derrière Emmanuel Macron, les deux finalistes. Il est également curieux que le Times accuse RT d’avoir de faux résultats de sondage alors qu’il a publié des prédictions, avec une certitude de 90 pour cent ou plus – et 85 pour cent le 8 novembre – que Hillary Clinton gagnerait les élections présidentielles aux États-Unis).
Au-delà de l’absence de preuve de la culpabilité de la Russie dans ces opérations de « fausses nouvelles », l’histoire du Times du Mardi tourne à l’opération de propagande et de guerre psychologique de l’OTAN en Lettonie, le Centre de communication stratégique d’excellence, dont le directeur Janis Sarts avertit sur « un accroissement de la désinformation là-bas. »
Ce centre de Stratcom, qui supervise la guerre de l’information contre les adversaires que l’OTAN perçoit, mène actuellement un « hackathon » à la recherche de codeurs pouvant développer une technologie pour rechercher les nouvelles que l’OTAN considère comme « fausses ».
Sarts, cependant, précise que l’objectif de Stratcom n’est pas seulement de supprimer les informations contraires, mais d’éliminer les points de vue déviants avant que trop de gens puissent les voir et les entendre. « Des acteurs étatiques ont tenté d’amplifier des points de vue spécifiques pour les intégrer au courant mainstream », a déclaré Sarts au Times.
Comme l’indique le Times, une grande partie de la pression pour éteindre les «fausses nouvelles» est tombée sur les géants technologiques américains tels que Facebook et Google – et ils y répondent :
« Après la critique de son rôle dans la diffusion de faux rapports lors des élections américaines, Facebook a introduit un outil de vérification des faits avant les élections néerlandaises de Mars et le premier tour de l’élection présidentielle française du 23 Avril. Il a également supprimé en France 30 000 comptes qui avait partagé des fausses nouvelles, une petite fraction des  quelque 33 millions d’utilisateurs de Facebook dans le pays. »
Un mouvement croissant
Et, selon le Times, ce mouvement de censure se répand :
« Les législateurs allemands réfléchissent aux amendes lourdes potentielles contre les entreprises de technologie si elles ne répriment pas les fausses nouvelles et les discours de haine en ligne. Depuis l’année dernière, Google a également financé près de 20 projets européens visant à vérifier les faux rapports potentiels . Cela inclut son soutien à deux groupes britanniques qui cherchent à utiliser l’intelligence artificielle pour vérifier automatiquement les affirmations en ligne, avant les élections législatives du 8 juin… »
Le fondateur de Bellingcat, Eliot Higgins
« David Chavalarias, un universitaire français, a créé un outil numérique qui a analysé plus de 80 millions de messages de Twitter sur les élections en France, aidant les journalistes et les vérificateurs à réviser rapidement les affirmations qui se propagent sur le réseau social. »
« Après l’élection présidentielle aux États-Unis l’année dernière, Dean Pomerleau, informaticien à l’Université Carnegie Mellon à Pittsburgh, a également mis au défi ses followers sur Twitter de proposer un algorithme qui pourrait distinguer les fausses déclarations des nouvelles réelles. »
« En travaillant avec Delip Rao, un ancien chercheur de Google, il a offert un prix de 2 000 dollars à tous ceux qui réussiraient. Au début de cette année, plus de 100 équipes du monde entier s’étaient engagées sur le défi des fausses nouvelles de M. Pomerleau. À l’aide d’une base de données d’articles vérifiés et de leur expertise en intelligence artificielle, des groupes rivaux – une combinaison d’équipes collégiales, de programmeurs indépendants et de groupes d’entreprises technologiques existantes – ont déjà réussi à prédire avec précision la véracité de certaines affirmations à près de 90%, a déclaré Pomerleau. Il espère que ce chiffre dépassera les 90 avant que son défi se termine en juin. »
Ainsi, si l’on considère comme vrai ce que disent le Times, le Post, Bellingcat et autres oracles de vérité qui s’estiment honorables, 90 pour cent ou plus d’informations contraires pourraient bientôt être repérés par les algorithmes de censure qui peuvent rapidement détecter et éliminer des points de vue divergents. Tel est l’avenir orwellien tracé pour la « démocratie » occidentale, et le New York Times est impatient de voir ce « marché aux idées » étroitement réglementé – on pourrait dire trafiqué – prendre le pouvoir.
Le journaliste d’investigation Robert Parry a révélé plusieurs des affaires Iran-Contra pour The Associated Press et Newsweek dans les années 1980.
Source : Consortium News, Robert Parry, 02-05-2017.
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

33 réponses à Le New York Times applaudit l’essor des algorithmes de censure, par Robert Parry

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FritzLe 16 juin 2017 à 06h30
Pour qui se prennent-ils, ces censeurs qui prétendent discerner le vrai du faux ?
Et qui veulent dicter “leur vérité” au grand public ?
Leur force, c’est de tenir des discours dans le vague, autour de quelques éléments acceptés par les classes dirigeantes : “fausses nouvelles” – “ingérence russe” – “discours de haine” – “théorie du complot”.
Notre réplique, ce sera de démonter leur discours, et d’exposer leurs mensonges.

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