En tant que mère, puis-je mettre ma créativité au service du mal ? Dans la vie de parents, il est des moments durant lesquels on se dit que son enfant est un dictateur en herbe. Cela débute à 2 ans avec la découverte d’un mot : le « non ». Dès lors, on entre dans une phase d’affirmation de personnalité et de négociation perpétuelle. Parce qu’être parent, c’est de la fatigue, une usure, de la colère qui se mue en exaspération et ce vain espoir de profiter d’un moment à soi. Alors quand vous venez de lire dix livres d’affilée, qu’il est 21 heures et que ce petit être, débordant d’énergie depuis 7 heures du mat’, vous annonce les yeux plein phare qu’il « veut PAS dormir », on tente des choses. Parfois, c’est un mensonge – « maman repasse te voir » –, un lâche « j’appelle papa », ou la menace d’une privation – « si c’est comme ça, pas de bébé nageur » (menace ultime par ici). L’approche est critiquable mais totalement assumée. On fait comme on peut. Il y a peu j’ai découvert une autre technique. A 18h45 pétantes, je récupère ma dose de vitamine C pure à la crèche. Arrivé à la maison, le voilà qui déclare qu’il ne se lavera pas. Le « pas envie » laissant présager une phase d’âpres négociations. Dix minutes plus tard et faute d’accord trouvé, je sors une carte : « Crapouillot va venir si ça continue. » « Crapouillot, c’est qui ? », s’enquiert-il. En deux temps trois mouvements, me voilà à inventer l’existence d’un monstre et l’histoire qui l’accompagne. « C’est le neveu de Cornebidouille, tu sais la sorcière qui veut que les enfants mangent leur soupe. Lui, il est plus gentil mais il veut que les enfants se lavent. » Là, je me mets à le dessiner une grande baignoire avec des pattes et des mains, mais un sourire sympa. Mon invention s’avère être d’une redoutable efficacité : mon fils est entré dans le bain… et n’a plus voulu en sortir. Face à mon ingénieuse créativité, j’ai d’abord ressenti de la fierté et tout un panel de possibilités d’invocation de monstres – la fée CarrieJolie pour le brossage de dents ; Scratch-Scratch le dévoreur de pieds nus... –, mais ma maestria de manipulation m’a tout de même fait culpabiliser. Ce fût bref car depuis, mon fils m’inonde de questions – « Est-ce que Crapouillot va venir ? », « Il mange quoi ? », « Il travaille où ? » – et cela, toujours à 21 heures alors que je rêve à mon tour – comme le dinosaure multicolore Pop que nous lisons plusieurs fois chaque soir – de rejoindre le « pays du dodo ». C’est de bonne guerre. |
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