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Sur l’histoire des violences policières
« C’est important [de revenir sur l’histoire des violences policières] parce que ça permet de documenter, d’objectiver, de qualifier et de rappeler ce qui est l’objet d’un déni systématique de la part de l’exécutif et des gouvernements. Ça permet aussi de rappeler ce que les pratiques policières brutales s’inscrivent dans une longue histoire méconnue qui ne fait pas partie du récit national ni des programmes scolaires. »
« Si les violences policières sont indignes d’un Etat de droit comme a osé le dire le président de la République, force est de constater qu’elles sont historiquement avérées, structurelles, répétées et indéniables. »
« L’ambition du livre c’est de prend le contre pied du déni systématique, non pas pour dénoncer, mais pour prendre au sérieux ce phénomène et essayer d’en sortir ou d’essayer que l’histoire de bégaye pas éternellement. »
Sur l’esprit de revanche post-68
« Il y a deux niveaux : un niveau conjoncturel et un niveau structurel. Le niveau structurel c’est qu’il m’a semblé utile de revenir sur les événements de mai et juin 1968 pour insister sur l’importance des violences de la police à cette époque au regard du nombre de blessés et au regard des sept morts. »
« Cette période qui va suivre les années 68 va consister à prendre sa revanche - expression de l’historien Maurice Rajsfus - qui va se traduire par le harcèlement des membres d’organisations politiques dissoutes comme la gauche prolétarienne ou la répression accrue des mouvements de lycéens. Des pratiques et des dispositifs qui peuvent donner l’impression que l’Etat se rachète et cherche à reprendre la main sur la chienlit. »
« Le niveau structurel est lié au fait que d’événements en événements ce qu’on constate c’est une matrice commune, qu’on peut appeler la violence d’Etat - voire des massacres d’Etat selon le terme de l’historien Alain Dewerpe - qui s’étale sur vingt ans. Entre 2005 et 2017 on a compté 96 personnes mortes suite à des interactions avec les forces de l’ordre. »
« Il y a une sorte de reproduction d’une matrice depuis au moins 1945 qui a une dimension post-coloniale - qui n’est pas l’entrée que je cherche à mettre en avant - mais il y a trois choses qu’on retrouve à chaque fois : 1- Des pratiques policières violentes sur une longue durée. 2- La couverture par l’institution avec des exactions protégées par la hiérarchie et l’institution qui échappe au contrôle démocratique. 3- C’est la culture de l’impunité. On pourrait ajouter le déni systématique. C’est ce qu’on appelle la violence d’Etat. »
Sur le « syndrome Malik Oussekine »
« [Ce qui a longtemps hanté les gouvernements, à savoir la mort d’un manifestement] ne fait plus peur aujourd’hui. »
« Depuis 1944, le maintien de l’ordre en France a toujours bénéficié d’une image très favorable, reconnu à l’étranger. Il y a une doctrine du maintien de l’ordre qui a été de nature à inspirer d’autres pays. Cette doctrine du maintien de l’ordre est basée sur le zéro mort. »
« Malik Oussekine est mort et a été frappé par des policiers, des voltigeurs - ce que la plaque commémorative ne dit pas -, qui n’ont jamais été inquiétés ni sur le plan professionnel ni sur le plan pénal. »
« À partir de la mort de Malik Oussekine, il y a une obsession du zéro mort avec la volonté affichée d’une relative pacification du maintien de l’ordre dans les manifestations et les mouvements sociaux. Pourtant, d’après le décompte de Basta! Il y a eu 657 morts entre 1973 et 2020. Et même la gendarmerie reconnait qu’il y a eu 232 morts suite à des contacts avec la police entre le début des années 70 et 2010. »
De la relative pacification à la militarisation de la police
« ce discours de la pacification, ce discours de la réforme est nié par les faits - il y a un aveuglement considérable - mais en plus ce que l’on constate c’est qu’il y a un durcissement des techniques du maintien de l’ordre. »
« On est passé d’une police au service de la population à un service qui fait de la population un ennemi. Il n’y a plus d’adversaire mais des ennemis. Il y a des "camps" comme l’a déclaré de manière indigne un haut fonctionnaire [le préfet Lallement]. »
« Cette tendance à la militarisation a été observable dans tous les pays occidentaux et plus particulièrement manifeste en France depuis le début des années 2010 - notamment avec l’opération César sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes et la mort de Rémi Fraisse. »
« La mort de Rémi Fraisse marque le retour non pas de bavures policières mais de pratiques illégales couvertes par l’institution. »
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