Etrange atmosphère, qui évoque celle qui régnait aux temps du référendum sur le traité constitutionnel européen. Les sondages donnent huit à dix points d’avance à Emmanuel Macron, mais cet écart confortable semble soudain fragile. Macron a perdu quatre ou cinq points en une semaine de campagne, ses arguments, même les plus justes, peinent à accrocher, les électeurs fillonistes et les mélenchonistes pensent que «le système» (lequel ? peu importe : la justice, les médias, la finance, tout, quoi…) leur a volé la qualification, ce qui rend les reports plus difficiles. Macron est pour la mondialisation, l’Europe plus unie, l’immigration, la concurrence, l’ouverture : tout ce que les Français, si souvent, détestent.
Iago de la République,
Nicolas Dupont-Aignan a rejoint le Front national qu’il avait juré de combattre. Aussitôt, ses deux vice-présidents ont démissionné, préférant la solitude au déshonneur. On lui promet en échange Matignon. C’est donc la soupe qui le motive, fatigué d’un long chemin solitaire. Une soupe à l’oseille : on soupçonne un arrangement financier qui lui permettra de se faire rembourser des avances de campagne.
Marine Le Pen en a profité pour arrondir les angles. Elle remet en avant son ancienne proposition d’une monnaie commune qui se superposerait à la monnaie nationale qu’elle veut restaurer. Ainsi la France sortirait de l’euro sans sortir tout en sortant. La solution pose de multiples problèmes politiques et techniques. Un seul exemple : la Banque de France indépendante mais liée à la Banque centrale européenne financerait-elle le déficit du budget national ? Si oui, on voit mal la BCE, qui gardera un rôle important, l’accepter. Si non, le FN ne pourra en rien financer son programme déjà ultra-dépensier. Et quid de la dette ? En francs dévalués ou en euros ? En francs, les créanciers seront estampés. En euros, ce seront les contribuables français qui paieront la dette plus cher. Après la séparation, la confusion… Mais les électeurs retiendront surtout que Marine Le Pen a mis de l’eau dans son vin anti-européen, ce qui fait tomber des préventions. Macron a une seule solution : rassembler les républicains. Mais pour cela, il faut leur promettre de ne pas faire comme Chirac en 2002. C’est-à-dire de rassembler aussi après.
Et aussi
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Les mots d’ordre du 1er mai sont un modèle de byzantinisme. Les uns appellent à voter Macron, les autres à voter contre Le Pen sans prononcer le nom de Macron, d’autres encore en tiennent toujours pour l’abstention tout en fustigeant Le Pen, ce qui est contradictoire. Trois militants socialistes ont appelé à un rassemblement en disant qu’il fait faire barrage à Le Pen en ne votant pas pour elle et en ne votant pas blanc. Donc en votant Macron. Mais ils n’arrivent pas à le dire. Cachez ce bulletin que je ne saurais voir…
• Un timide rayon de soleil : un sondage OpinionWay ramène les intentions de vote Le Pen à 39%, en baisse d’un point. Mais les marges d’erreur sont toujours de 2%. Une hirondelle sondagière ne fait pas le printemps.
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Borloo se découvre macronien en diable. Voilà qui n’arrange pas Baroin, qui se voit Premier ministre de la droite et du centre, imposant une cohabitation au président Macron. Baroin refuse toute coalition avec En marche, Borloo dit exactement le contraire.
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