29
Déc
2015
Perquisitions musclées, arrestations injustifiées : les abus de l’état d’urgence
Source : Le Monde, Les Décodeurs, 23-11-2015
Mickaël, 27 ans, regardait un film d’action dans le TGV Marseille-Rennes, vendredi 20 novembre, en compagnie d’un autre homme. Mal lui en a pris, selonSud-Ouest : en gare de Massy (Essonne), la police évacue le train et lui saute dessus pour l’arrêter. Des passagers auraient trouvé suspects son comportement et son aspect : le jeune homme est barbu et il portait des gants. Choqué, il a été libéré au bout de quatre heures.
Cette histoire n’est qu’un exemple des nombreux cas relevés cette semaine par la presse locale : la France est en état d’urgence. Un état administratif qui donne aux forces de l’ordre de larges moyens d’action. Mais aussi un état collectif prompt à l’emballement.
Une fillette de 6 ans blessée
Autre histoire édifiante, celle que raconte La Voix du Nord sur ce jeune homme, dont le père de 67 ans a été interpellé manu militari, mardi 17 novembre, à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais). Sophiane avait accompagné son père à la préfecture la veille pour une démarche administrative. Les forces de l’ordre l’auraient alors repéré prenant des photos, ce qu’il dément. Résultat : la police enfonce la porte du domicile familial, fouille l’appartement de fond en comble, et arrête son père, qui passe la nuit en garde à vue.
A Quévrechain, dans le Nord, Fatima et sa fille ont subi une brusque perquisition de nuit au motif qu’un homme, que les autorités suspectaient de détenir des armes de guerre, avait habité dans la maison par le passé. La jeune fille raconte les lasers dans l’appartement, la porte qui vole en éclats, sa mère de 43 ans menottée… pour une perquisition qui n’a rien donné.
Les victimes des bavures sont parfois très jeunes et impressionnables : à Nice (Alpes-Maritimes), une petite fille de 6 ans a été blessée par des éclats au cou, lors d’une perquisition jeudi. A 4 h 30 du matin, les policiers d’élite du RAID enfoncent la porte de l’appartement familial, plaquent le père au sol. Les voisins évoquent des tirs dans les serrures, que la police dément, mais c’est bien par des éclats de bois qu’a été blessée la fillette, touchée alors qu’elle dormait dans la chambre d’à côté. Et le tout pour rien : la police s’est trompée de porte, elle visait en fait le voisin. Hospitalisée, la petite fille n’a rien de grave et la police a reconnu une « erreur rare ».
Le musicien Ibrahim Maalouf retenu sans motif
Ibrahim Maalouf, trompettiste français renommé, qui a rendu un hommage aux victimes des attentats sur le plateau du « Grand Journal » de Canal+ le 16 novembre, a raconté au site spécialisé Clique avoir été retenu plusieurs heures par des policiers, gare du Nord à Paris, avant de monter dans un train Eurostar pour Londres.
Le natif de Beyrouth (Liban) aurait alors appris que son passeport avait fait l’objet d’un signalement auprès de l’organisme de coopération policière Interpol. Papiers confisqués, interrogatoire… Une fois relâché, il raconte sur son compte Facebook sa mésaventure relayée aussitôt sur Le Parisien, qui impute la responsabilité à la douane au lieu de la police. Le musicien prend ensuite son train, avant d’être invité à en descendre par « trois agents de la douane », fâchés d’avoir été associés à l’épisode. S’il dit comprendre l’attitude de la police face au signalement d’Interpol (dont il ne saisit pas la raison), Ibrahim Maalouf reproche aux douaniers d’avoir « dépassé les limites en [le] traitant comme un terroriste potentiel devant tout un wagon juste parce qu’un journaliste a écrit par erreur qu’ils [l]’avaient arrêté ».
« Acharnement contre un lieu sacré »
Les riverains de la mosquée d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), eux, sont scandalisés par l’état du bâtiment laissé par la police après sa perquisition musclée, dans la nuit du 16 au 17 novembre. Un des responsables de la mosquée a assuré avoir proposé les clés à la police, qui a refusé, « préférant forcer la porte ». Un adjoint au maire d’Aubervilliers, Sofienne Karroumi, a posté sur sa page Facebook des photos des dégradations subies par le lieu de culte, qu’il qualifie d’« acharnement contre un lieu sacré ».
Ces personnes pourront-elles obtenir réparation ? En théorie, elles peuvent porter plainte pour violation de domicile et voie de fait, sans garantie, bien entendu, d’obtenir réparation. Il est même possible, si les dommages causés ont été reconnus par la police, d’invoquer la responsabilité de l’Etat, et d’adresser les factures au ministère. Dans certains cas, les forces de police ou les préfectures ont déjà indiqué qu’elles indemniseraient les personnes concernées.
Source : Le Monde, Les Décodeurs, 23-11-2015
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Etat d’urgence : 2 700 perquisitions, deux enquêtes préliminaires ouvertes
Source, Le Monde, Les Décodeurs, 15-12-2015
Plus d’un mois après les attentats ayant frappé Paris le 13 novembre, le rythme des perquisitions administratives est en baisse, mais reste soutenu. Le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a effectué le 15 décembre un bilan des actions menées par les forces de l’ordre depuis la mise en place de l’état d’urgence, le 14 novembre. D’une moyenne de 120 perquisitions administratives quotidiennes en France pendant les dix jours ayant suivi les attentats parisiens, la fréquence est passée à une quarantaine par jour au début du mois de décembre.
Ces résultats effectuent une mise à jour de ceux annoncés par le premier ministre, Manuel Valls, invité de la matinale de France Inter, le 11 décembre.
Les 2 700 perquisitions administratives qui ont été menées au total ont abouti – outre les saisies diverses et les assignations à résidence – à l’ouverture de deux enquêtes préliminaires par la section antiterroriste du parquet de Paris, une information révélée par Mediapart et confirmée par Le Monde.
360 assignations à résidence
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P.S. on notera que l’État d’urgence ne semble pas super efficace en Corse…
16 réponses à Perquisitions musclées, arrestations injustifiées : les abus de l’état d’urgence....
Commentaires recommandés
Tous sommes désormais des suspects en puissance, des ennemis de l’ordre établi qui doit être de moins en moins questionné ou remis en question.
La militarisation de la police telle qu’elle est déjà réelle aux US, un autre grand pays défenseur des libertés et de la fraternité, montre la voie de ce qu’attend la France dépersonnalisée et suiveuse des merveilleux modèles venus d’outre atlantique. Près de 600 personnes tuées par la police en 2015, souvent dans des circonstances complément incroyables et de violences totalement inutiles.
Entretenir la peur dans la population, mener des politiques étrangères absurdes, diviser les sociétés, telles sont les recettes de nos psychopates gouvernants depuis des décennies et auxquels les attentats, qui résultent de la logique absurde de leurs politiques, prêtent main forte à encore plus de confiscation des libertés élémentaires.
Et dire que nous continuons, en allant voter, à maintenir ces malades en place.