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samedi 1 juin 2024

La lettre de Patrick Le Hyaric - samedi 1er juin 2024

 


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La Lettre du 1er juin 2024
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Bonjour à chacun et chacun,

Mon billet de la semaine s’intitule (ci-dessous et sur le site de l’Humanite.fr) « le souffle du monstre sur la nuque ».

Le total des voix des deux listes d’extrême droite totalisent certains jours jusqu’à 40 % des suffrages en vue des élections européennes. Il semble que tout cela soit banalisé au point que les lumières du combat contre les extrêmes droites s’adoucissent ou s’éteignent. Lors de ces élections, une tâche brune risque de se répandre sur le continent avec différentes nuances de nationalisme. Des fascistes, héritiers directs de Hitler et s’en revendiquant risque de siéger au Parlement européen. Cela aurait de rudes conséquences pour les travailleurs et la jeunesse, les cadres et les chercheurs, les journalistes et les hommes de loi, les femmes et ceux qui sont considéré par les proto-fascistes comme des « étrangers ». Déjà, leurs idées imprègnent des décisions gouvernementales ou européennes.

Macron les nourrit et s’abreuve à leur programme. On vient encore de le voir au sujet de la nouvelle Calédonie ou du refus de reconnaître le droit d’existence des Palestiniens dans leur Etat, ou ces affreux projets contre l’assurance-chômage pour toutes et tous, et la volonté de modifier la justice des mineurs. Sa stratégie guerrière leur dégage la route.

Je me permets une nouvelle fois de sonner l’alerte. L’heure n’est pas à faire « joujou » avec les têtes de liste de l’extrême droite, mais de les combattre pied à pied par l’information, l’éducation populaire, l’action au service des plus démunis condition d’une alliance avec d’autres couches de la société. Il y a urgence à redonner goût à l’engagement et à l’action politique, en cessant de futiles chamailleries reprenant trop souvent les campagnes de la haute bourgeoisie qui veut en finir avec toute la gauche et le parti de l’écologie politique. L’union est un combat difficile. Il faut le mener. L’unité populaire à tisser jour après jour est la voie permettant aux citoyennes et aux citoyens de tracer eux-mêmes un processus de transformation révolutionnaire de la société et du monde. L’altérité, l’écoute de l’autre, la recherche de positions et d’actions communes ne sont pas des défauts. Ils sont la voie. Il n’est pas encore trop tard.
 
 
Un criminel et un complice

Netanyahou bombarde, affame, tue, vole des maisons et des terres en toute impunité. Ses missiles sont sciemment jetés sur des camps de déplacés palestiniens à Gaza. Il viole concrètement les décisions de la plus haute juridiction du monde qui a intimé l’ordre de ne pas bombarder Rafah : la Cour internationale de justice. Alors que les arrêts de cette dernière sont contraignants et doivent donc être respectés, le premier criminel du pouvoir israélien n’a pas hésité à larguer 8 missiles sur le camp de Baraksat. Les flammes ainsi libérées ont dévoré les tentes, les plastiques et les chairs d’êtres humains. D’êtres humains. Oui ! N’en déplaisent aux complices pour qui, un mort n’en vaut pas un autre. Les restes de vies jonchaient le sol sans que cela ne perturbe la conscience des faiseurs de mots pour cacher les maux. Macron s’est dit « indigné ». La belle affaire. Un mot, des mots sans effet, pour camoufler le crime. Un mot boiteux, vide, sans acte. Mieux, avec ses comparses, il juge que le temps n’est pas venu de reconnaître un Etat pour les Palestiniens. Il attend « le moment utile ». Utile pour qui ? Pour laisser le temps au crime génocidaire de se perpétrer ? Cet homme fait honte à la France quand plus de 170 nations ont reconnu La Palestine. Honte à lui. Il ne sait pas ce qu’est le service militaire, mais il est prêt à expédier des troupes au sol en Ukraine et s’est fait le porte-parole de l’OTAN décidant de bombarder en territoire russe. Irresponsable et arcquebouté pour défendre le « deux poids –deux mesures. Il est le complice du pire.

La reconnaissance de la Palestine, Gaza et le respect du droit international sont évidemment partie intégrante du travail du Parlement européen, et par voie de conséquence de la campagne des élections européennes. La paix en Ukraine comme à Gaza concerne un grand parlement comme le Parlement européen. J’y ai déposé des dizaines de résolutions en faveur de l’État Palestinien, contre la décolonisation et pour la libération des prisonniers politiques. Membre de la délégation spéciale chargé des liens entre le Parlement et La Palestine, je me suis déplacé plusieurs fois à Gaza pour vérifier l’utilisation des crédits européens aux populations, aux camps de réfugiés et à l’Urnwa. J’ai été dix ans membre du parlement euro-méditerranéen qui est un lieu de dialogue et de construction de solutions. J’y siégeais aux côtés d’une délégation d’élus palestiniens et d’élus israéliens et des représentants de tous les pays du pourtour méditerranéen. Enfin, l’accord d’association Union Européenne-Israël est, chaque jour, bafoué. Le Parlement européen élu le 9 juin devra à nouveau se saisir de cet enjeu et proposer de rompre cet accord tant que l’État d’Israël ne respectera pas le droit international. Oui, le sort de Gaza, des Palestiniens et des Israéliens concerne tout citoyen ou qu’il vive dans le monde.
 
 
Le souffle du monstre sur la nuque

Alerte ! Un duo maléfique nous étouffe. Il prive la démocratie de son oxygène. Il est en mission pour sauver le système. Sauver une Union européenne conçue pour les puissances d’argent, alignée sur les États-Unis, roulant comme un bulldozer, sur les droits sociaux et démocratiques, et le droit à l’environnement. Le duo agit au grand jour désormais. Tantôt Bardella-Attal, tantôt Macron-Le Pen. Ensemble, ils créent un écosystème où ils se nourrissent l’un, l’autre. Leur projet commun : enterrer le pluralisme politique, fermer pour longtemps la porte à toute alternative de changement progressiste, faire disparaître les forces de gauche de transformation et de l’écologie politique. Leur stratégie ? Le mensonge permanent.
L’extrême droite qui durant une quarantaine d’années a servi de repoussoir pour maintenir de fidèles mandataires du capital au pouvoir est désormais en passe de devenir elle-même fondé de pouvoir du grand capital dans la plupart des pays européens en lieu et place de ses géniteurs.

La nourriture politique de ces extrêmes droites se trouve dans le terreau en décomposition politique, le saccage des conquis sociaux et démocratiques et de la réactivation des réflexes racistes dans des pays héritiers d’une vieille histoire de domination et de colonisation. La désignation de « l’étranger » comme responsable de tous les maux sert précisément à détourner les regards du véritable responsable des souffrances populaires et des crises : le capitalisme globalisé. L’internationale de la haine accompagne ainsi bras dessus, bras dessous l’internationale du grand capital prédateur.

La putréfaction politique sert à la recomposition du capitalisme qui se sécurise en installant une béquille. Le président de la République, une grande partie de la grande presse et de nouveaux médias rachetés directement par les puissances d’argent n’ont eu de cesse depuis des années d’élever le seuil de tolérance dont bénéficie le RN/FN.

À l’instar de Berthold Brecht nous ne saurions trop que conseiller d’apprendre à voir plutôt que de rester les yeux ronds face au désastre possible. L’entrée en campagne d'Attal et de Macron dans une élection qui sert à renouveler le Parlement européen est un immense service à la campagne du premier de liste d’extrême droite qui ne cherche qu’à renationaliser un scrutin au moment même où se pose comme jamais l’enjeu de la nature d’une construction européenne associant les peuples et les nations solidaires libres, souveraines. Une union européenne actrice pour préserver la paix, pour lutter contre les dérèglements climatiques, pour préserver la biodiversité, pour traquer l’évasion fiscale, pour coopérer avec les pays du sud, pour préserver et élargir les sécurités sociales et les sécurités humaines tout au long de la vie, promouvoir les droits des femmes, faire vivre la solidarité et le droit d’asile.

Le duo maléfique fait absolument tout pour échapper à de tels débats. Et pour cause ! En parler reviendrait à dresser l’acte d’accusation des dirigeants européens qui ont déjà entrepris de reprendre des pans entiers des programmes des extrêmes droites. On vient de le voir sur les enjeux environnementaux avec les mauvais ajustements de la politique agricole commune pour répondre aux injonctions de l’agro-business. Il en est de même sur l’immigration avec le pacte asile-immigration.

Combattre le dégoût et l’abstention dans les classes populaires implique un débat et des initiatives politiques audacieuses, de haut niveau pour faire voir et repousser le piège anti-démocratique tendu par ce dangereux rétrécissement du débat public.

Nous sommes entrés dans une phase ou l’appareil d’État, le complexe médiatique et sondagier, une partie du système policier sont aujourd’hui utilisés pour mettre en scène le duel avec l’extrême droite.
 
Passée de 37 à 115 députés se répartissant dans deux groupes depuis les élections de 2019, l’extrême droite pourrait en avoir 150 sur 705 députés européens après le 9 juin. Des députés qui agiront contre les droits des femmes, contre toutes avancées sociales, et pour protéger les grandes fortunes, les détenteurs de capitaux et la rente, contre des décisions favorables à l’environnement, contre le droit d’asile, pour la mise au pas de la justice et de la presse. Leur objectif est de formater la construction européenne dans le cadre de nationalismes capitalistes menant la guerre sociale contre les travailleurs et soufflant sur les braises de la guerre militaire. Chaque citoyen, chaque travailleur, chaque retraité qui utilise le bulletin du RN/FN se tirent, souvent sans même le savoir, une balle dans le pied. Le nationalisme qui porte en lui le repli, le rejet de l’autre, s’oppose frontalement aux exigences de coopération, d’alliances ; d’engagement commun pour faire face aux fracas du monde, aux rapaces de la finance, du numérique et de la militarisation, aux dérègleurs du climat.

La progression des extrêmes droites au Parlement européen peut avoir comme conséquence, l’accélération de la fusion des droites ou un consensus renforcé entre la droite du parti populaire européen et Renew avec les sociaux-démocrates pour conforter les politiques austéritaires et atlantistes. Dans les deux cas, les travailleurs, les jeunesses seront perdants.

Les démocrates, les progressistes, les syndicalistes, les militants des droits humains, les associations ont donc la lourde responsabilité de ne pas laisser les citoyens s’enfermer dans la tenaille Macron-Le Pen.

Laisser-faire, c’est ouvrir les portes d’une catastrophe d’autant plus grave que le pouvoir ne se contente pas d’organiser ce « mauvais duo ». Il reprend aussi des parties de la partition de l’extrême droite quand ils votent ensemble, la politique agricole commune ou le pacte asile-immigration - que Macron juge insuffisamment ferme.

Ce même pouvoir, qui à Bruxelles, a voté contre la directive sur le devoir de vigilance des entreprises qui devait obliger les multinationales à « corriger leur impact négatif sur l’environnement et les droits humains » ou la directive sur les plates-formes numériques censée améliorer les droits des travailleurs de celles-ci. Ce pouvoir qui veut faire une sérieuse entaille dans le droit du sol et prépare le terrain glissant de la préférence nationale dans la loi immigration votée par Le RN/FN.

Dans un tel contexte, les responsabilités des forces de gauche et de l’écologie politique sont immenses. Se vautrer dans le sol boueux de vaines polémiques, des insultes, et des ressentiments désespère et nourrit une abstention qui fait monter les piles de bulletins d’extrême droite dans les urnes. Aucune force de gauche et de l’écologie ne profite de l’affaiblissement de l’autre. Surtout, c’est le monde du travail et de la création qui a plus que jamais besoin d’être protégé et de disposer de forces politiques pour ouvrir un processus de transformation sociale, écologique et démocratique.

Dire cela ne signifie pas qu’il faudrait couvrir d’un voile trompeur les différences et les divergences. Il y en a sur l’Otan, la nature de la construction européenne, la sortie ou non du capitalisme, l’énergie. Mais il y a aussi tous les dévouements et les luttes communes pour l’amélioration du sort des travailleurs, la défense et le renouveau de la République, les combats pour une Europe sociale, solidaire, écologiste, féministe, antiraciste, anticolonialiste, pour une autre politique agricole commune, pour assécher les paradis fiscaux, une autre répartition des richesses, la promotion des services publics.

C’est si vrai que durant la législature qui se termine, sur les 14 910 votes au Parlement européen, dans 80 % des cas les députés de gauche et écologistes français ont voté de la même façon. Une proportion identique lors de la précédente législature. Du reste, le programme de la défunte NUPES comprenait sur les enjeux européens un programme partagé tout en actant des désaccords. Tout en votant communiste et en appelant à voter communiste le 9 juin prochain, je considère que le gain de voix d’une force sur l’autre est une entrave à la conquête de majorité d’idées et surtout de majorité politique pour à la fois sortir du macronisme, empêcher l’extrême droite de le remplacer et bâtir dans le débat et dans l’action un processus anticapitaliste de progrès social et écologique. À court terme, l’affaiblissement de chaque force de gauche revient à s’amputer de l’élection de députés européens au profit en général de la liste placée en tête dans les enquêtes d’opinion. Cultiver, mobiliser, convaincre, donner le goût des urnes devrait être notre œuvre commune.

L’initiative unitaire et européenne des syndicats, CGT, CFDT, UNSA contre l’extrême droite doit être saluée. Les paroles de Sophie Binet rappelant que « l’extrême droite arrive toujours au pouvoir quand la gauche est divisée » doivent être écoutées. Les marches et actions unitaires qui germent un peu partout à l’initiative d’associations et de citoyens, d’actrices et d’acteurs de la culture doivent être soutenues. Les combats pour des avancées sociales et l’égalité créent des solidarités à l’entreprise comme dans la cité et rendent sensibles les intérêts de classe, les solidarités et des alliances permettant de dépasser les rejets, l’essentialisation des individus et le racisme. Condition pour mettre fin à l’élargissement des flaques brunes qui s’étalent sur le pays. Le temps presse. Car, qui ne sent pas le souffle odorant et rauque du monstre derrière sa nuque ? Qui ne voit s’affaiblir les palpitations du cœur de la démocratie ? Le sursaut est nécessaire. Il est encore possible !
 
 
En vous adressant mes amicales salutations, je vous souhaite une bonne semaine.
 
Patrick Le Hyaric
 
 
 
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