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dimanche 30 juin 2024

Là -bas si j' y suis - La chute ou la lutte ! - le 1.07.2024

 

 Là-bas si j'y suis
 

La chute ou la lutte !

« Quand le peuple ne trouve pas d’issue dans l’espoir révolutionnaire, il trouve une issue dans le désespoir contre-révolutionnaire » . Voilà ce que disait un certain Léon Trotski. Et c’est ça qui est arrivé à beaucoup par ici : plus d’issue, plus d’horizon, foutu le futur. Inégalité, abandon, peur du déclin, vous connaissez tout ça.

Et le mépris surtout, ah, le mépris !

Et tu sais pourquoi tout ça ? Tu sais d’où ça vient ?

Longtemps la réponse c’était la faute des gros, des salauds de riches, de ces vaches de bourgeois, ce grand méchant capitalisme. C’est simple, c’est clair, t’as plus qu’à lutter « tous ensemble, tous ensemble ». C’est ça l’espoir révolutionnaire. Et parfois ça marche. Pas toujours, parfois ça plante. Tu te retrouves tout seul dans le dernier métro avec ton drapeau et tes poumons pleins de lacrymo. Mais parfois ça fait la Sécurité sociale, l’abolition de l’esclavage, le Droit à l’avortement, les droits civiques, les congés payés. Et tous nos bijoux de famille. C’est le moment de les ressortir et de les faire briller ces jours-ci. On a besoin de se prouver qu’on a pu. Ces fachos veulent nous faire croire qu’on peut pas. Mais on a pu et on pourra.

Voilà la réponse à la question, mais il y en a une autre.

Il arrive que le vent tourne et que la réponse change. « Pourquoi nos malheurs », tu demandes ? On te répond : « c’est la faute aux ritals, aux youpins, aux bougnouls. C’est la faute aux assistés, aux drogués, aux bonnes femmes, aux pédés ». Bien sûr on te le dit pas comme ça. On te la joue faux-cul. « C’est le problème du voile, le communautarisme, la guerre de civilisations, l’islamo-gauchisme ». Mais c’est la même haine, le même bouc émissaire qui porte les mêmes péchés du monde et qu’il faut égorger pour notre salut commun.

Et c’est qui qui répand tout ça ?

Des toutologues, des filousophes, des chargés de com’. C’est aussi des présidents, Chirac-le-bruit-et-l’odeur ou Macron avec son « immigrationisme » et son « changer de sexe en mairie ».

Et attention, on n’est pas raciste, hein.

C’est ça le désespoir contre-révolutionnaire. Pour Hannah Arendt il y a toujours du désespoir à la base du totalitarisme.

Et à la base du désespoir ?

Il y a quarante ans de politique néo-libérale, de délocalisations, de régions entières vidées de leur vie, de services publics démolis, un vrai « sociocide » dans des régions entières, des inégalités qui se creusent de plus en plus. Il y a aussi la résignation, l’indifférence, la désolation impuissante, le Moi-ma-gueule, le PCPE.

Et le mépris surtout, ah le mépris !

Il faut dire qu’il y aussi de l’eau dans le gaz entre la gauche et le monde ouvrier. C’est l’affaire Terra Nova qui remonte régulièrement à la surface depuis 2011. Le think tank Terra Nova lié au parti socialiste publie en mai 2011 une note en vue des élections de 2012 : « Gauche, quelle majorité électorale pour 2012 ? ».

La recommandation c’est qu’il faut viser un nouvel électorat urbain, avec des valeurs culturelles progressistes, des jeunes, des femmes, des diplômés et les minorités des quartiers populaires. Autrement dit, on laisse tomber cette classe ouvrière qui sent le pâté. C’est le divorce entre le bobo et le beauf avec son barbecue, son diesel, son Johnny, le genre pas trop déconstruit, qui vient grossir l’électorat « ouvrier » du RN.

« On a lâché le peuple ». C’est Ariane Mnouchkine qui dit ça, la géniale metteuse en scène du Théatre du Soleilil y a quelques jours dans Libération. À son âge, 85 ans, le mot « collaboration » a tout son sens et elle se demande s’il faut continuer de faire du théâtre avec un pouvoir facho. Elle se pose des questions sur la gauche culturelle, la gauche hors-sol, éloignée du monde populaire.

Le mépris ! Ah le mépris !

« On a lâché le peuple, on n’a pas voulu écouter les peurs, les angoisses. Quand les gens disaient ce qu’ils voyaient, on leur disait qu’ils se trompaient, qu’ils ne voyaient pas ce qu’ils voyaient. Ce n’était qu’un sentiment trompeur, leur disait-on. Puis, comme ils insistaient, on leur a dit qu’ils étaient des imbéciles, puis, comme ils insistaient de plus belle, on les a traités de salauds. On a insulté un gros tiers de la France par manque d’imagination. L’imagination, c’est ce qui permet de se mettre à la place de l’Autre. Sans imagination, pas de compassion. (…)

Aujourd’hui, je ne suis pas certaine qu’une prise de parole collective des artistes soit utile ou productive. Une partie de nos concitoyens en ont marre de nous : marre de notre impuissance, de nos peurs, de notre narcissisme, de notre sectarisme, de nos dénis. J’en suis là. Une réflexion très sombre, incertaine et mouvante.

Heureusement, nous, nous avons le public, et moi, j’ai la troupe. Heureusement, mon dieu, que je les ai à mes côtés. Il y a de la bienveillance, de l’amour, de l’amitié, de l’estime, de la confiance. Avec ça, on résistera. »

(Libération, 12 juin 2024)

C’est peut être des troupes comme ça qu’il faut faire pour résister dans ces temps obscurs. Cette crise a soulevé le couvercle du panier de crabes de la Nupes. Affligeant. Mais, dans l’urgence, des accords et un programme ont été trouvés. Et puisqu’il s’agit du Front Populaire, il faut se souvenir que c’est le populo qui a gagné l’été 1936, le gouvernement a du suivre et obtempérer. C’est le populo qui a occupé les usines et qui a mis la pression sur le pouvoir et qui est allé voir la mer à bicyclette.

C’est une troupe comme ça, informelle, à l’échelle planétaire qui s’est battue durant des années pour la libération de Julian Assange. Et c’est pile au moment où « le taré à la tête du pays » ouvrait toute grande la porte du pouvoir aux fascistes du RN, qu’on apprenait la libération de Julian Assange au bout de 14 ans de lutte !

Fou de joie, son comité de défense envoyait partout dans le monde un communiqué finissant par : « Si nous avons réussi à libérer Assange, de quoi sommes-nous encore capables ? ».

Il nous faudra beaucoup moins de quatorze ans pour faire disparaitre cette sale tâche brune sur le cœur de la Patrie.

Daniel Mermet

P.-S.
Les médias jouent un rôle capital dans ce conflit. Le RN a pour but la privatisation de l’audiovisuel public. Il faudra faire tout pour les en empêcher. Quand on voit CNEWS ou BFM on voit le rôle qu’il donnerait aux médias. Pour vous, une première résistance c’est de soutenir et faire circuler les médias indépendants. Un exemple au hasard, LÀ-BAS ! Nous avons mis la plupart des articles en accès libre pour cette période. Faites circuler. Et vite abonnez-vous, réabonnez-vous. Et si vous voulez que quelqu’un pense à vous toute l’année et même toute la vie, offrez-lui un abonnement à Là-bas. Regardez les tarifs d’abonnement et vous comprendrez pourquoi tout le monde en offre à tout le monde.

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Chants de bataille #36 : « Comme ils disent »

À quelques jours de la Marche des fiertés parisienne, qui aura lieu samedi, Olivier Besancenot revient sur la chanson « Comme ils disent », de Charles Aznavour : https://la-bas.org/la-bas-magazine/chroniques/chants-de-bataille-36-comme-ils-disent

Éduquer ou réprimer ?

Gabriel Attal a choisi. Invité de Laurence Ferrari sur les antennes du groupe Bolloré ce lundi 24 juin, il déclarait : « les très courtes peines d’isolement à la première incartade – même quand c’est quelque chose que certains pourraient qualifier de léger –, je pense que c’est beaucoup plus efficace, y compris en termes éducatifs pour les jeunes ». Pourquoi une justice efficace doit-elle distinguer les mineurs des justiciables adultes ? Réponses avec Françoise Dumont, présidente d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, que recevait Laurence De Cock dans « Si j’aurais su » : https://la-bas.org/la-bas-magazine/entretiens/eduquer-ou-reprimer-gabriel-attal-a-choisi

« Avec ma tête d’arabe, est-ce que je devrai longer les murs ? »

« – Probablement ».
La question, c’est Dillah qui la pose. La réponse, c’est un capitaine de police qui la donne. C’est pas un sketch. C’est pas un film. Un entretien avec ce gradé en fonction, Stéphane Lemercier, chargé de cours à la Faculté de Droit de Montpellier, spécialiste du racisme dans la police : https://la-bas.org/la-bas-magazine/entretiens/avec-ma-tete-d-arabe-est-ce-que-je-devrai-longer-les-murs

Gérard Mordillat fait profiter Macron de ses conseils à la veille des élections

Pour piloter la France, Macron va foncer : ni extrême droite, ni extrême gauche, mais tout droit dans le mur en klaxonnant ! Ce qui suscite chez Gérard Mordillat quelques réflexions : https://la-bas.org/la-bas-magazine/chroniques/gerard-mordillat-fait-profiter-macron-de-ses-conseils-a-la-veille-des-elections

Préférence Nationale : cette vieille recette facho, un sujet urgent

« Il y a toujours un groupe qui symbolise le rejet en fonction de la conjoncture du moment », dit l’historien Gérard Noiriel. Pour ça, il suffit de mobiliser les émotions, prendre un fait-divers et généraliser pour dénoncer un groupe qui va faire bouc émissaire. Cette stratégie permet surtout de détourner la colère du plan social et économique vers le plan racial, ce qui va diviser et anéantir les luttes possibles. Il est urgent de démonter le système de cet apartheid dont les électeurs du RN sont souvent eux-mêmes les premières victimes : https://la-bas.org/la-bas-magazine/entretiens/preference-nationale-cette-vieille-recette-facho-un-sujet-urgent

« Va à la niche » ! C’est raciste ou pas ?

Racisme ordinaire ou « expression populaire de gens qui se détestent » ? Cette semaine Dillah vous propose un petit test : https://la-bas.org/la-bas-magazine/chroniques/va-a-la-niche-c-est-raciste-ou-pas

 
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