C’est quoi, une information fiable ? Je me suis beaucoup posé cette question durant tout le mois de décembre, pendant lequel j’ai longuement arpenté les couloirs d’un hôpital. D’abord, parce que les équipes qui s’occupent d’un même patient tournent beaucoup. Un jour, c’est une infirmière bavarde, l’autre un infirmier taiseux. D’ailleurs, ils ne se parlent pas toujours beaucoup, semblant échanger avant tout à partir d’un dossier dans lequel ils reportent l’évolution de la situation, mais auquel les proches du malade n’ont jamais accès.
Parfois passe un médecin spécialisé sur un point précis, en l’espèce un infectiologue qui explique que c’est un cas de Covid « à surveiller de près », s’agissant d’un patient âgé. Mais on ne reverra jamais ce spécialiste, on ne saura pas ce qu’il a conclu ni décidé, si même il a décidé quelque chose. C’est d’ailleurs un sentiment qui ronge, de ne pas savoir si des choix vont être faits, quand l’intervention aura lieu.
Les jours passent, et on rentre dans un espace-temps totalement nouveau, fait de longues attentes et de ces quelques mots jetés au détour d’un couloir par un nouvel infirmier bavard : « Dis donc, tous ses organes sont en bon état, je lui ai demandé la recette pour être autant en forme à son âge ! » Mais d’information certaine, toujours aucune trace. Il y a bien une source, le « grand » médecin, qui dirige le service, qui passe de temps en temps dans la chambre du patient mais jamais quand on s’y trouve. Lui doit savoir, mais on ne le verra jamais. Et puis, de toute façon, il décide un jour de transférer le malade dans un autre service. Et tout recommence. Nouvelles infirmières, nouveaux infirmiers, nouvelle approche, nouveaux mots.
Trois semaines se sont passées, et seule l’évolution du patient, visible même pour le béotien, permet de comprendre. Il faut continuer à écouter entre les lignes, saisir chaque mot, encaisser ceux qu’on ne comprend pas, ne toujours pas savoir à qui se fier. Et attendre.
Fabrice Tassel
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