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mardi 31 janvier 2023

« On va finir écrasés si ça continue ! » : mobilisation massive à Grenoble contre la réforme des retraites le 31.01.2023

 

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Isère

 « On va finir écrasés si ça continue ! » : mobilisation massive à Grenoble contre la réforme des retraites

Le 19 janvier, lors de la première manifestation grenobloise contre la réforme des retraites, ils étaient déjà beaucoup à dire “Non” ! Ce mardi 31 janvier, ils sont revenus encore plus nombreux (20 000 selon la police, 40 000 selon les syndicats) et on les a suivis.
Ève MOULINIER & Antonin SEUX - Hier à 19:40 | mis à jour hier à 20:09 - Temps de lecture : 4 min



En remontant le cours Jean-Jaurès, privé de tramway, il suffisait de suivre les files de piétons se dirigeant vers la gare de Grenoble pour sentir un empressement. Une envie de rejoindre les troupes. Une envie de se retrouver. Ici, un drapeau qui dépassait du sac. Là, des pancartes en carton tenues à la main. Et au loin, comme un brouhaha de plus en plus puissant, et une masse foncée qui ne cessait de grandir… « T’as vu la foule au fond ! Oh, c’est sûr, cela va être plus fort que le 19 janvier. Franchement, ça fait chaud au cœur », lançait une manifestante à sa copine bien emmitouflée. Les deux quadragénaires, salariées du privé – « à 1 700 balles par mois pour une carrière hachée » –, partageaient ensuite leur espoir que la lutte continue. « Parce que cette réforme des retraites nous déprime vraiment. Cette absence de perspectives et d’horizon, cette non-reconnaissance du boulot qu’on fait maintenant… C’est pour ça qu’on est là, et aussi nombreux. »

À 10 h 30, le début de l’avenue Alsace-Lorraine était plein comme un œuf, si bien que le cortège – qui n’avait pas encore démarré – a été forcé de s’étirer perpendiculairement sur le cours Jean-Jaurès. Trottoirs et rues bondés.

« Quand est-ce que ça démarre ? On va finir écrasés, si ça continue », soufflait un retraité de la fonction publique, un peu impatient, mais heureux.

Quelques-unes des pancartes du jour. Photo Le DL / Stéphane PILLAUD
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Quelques-unes des pancartes du jour. Photo Le DL / Stéphane PILLAUD

Quelques-unes des pancartes du jour. Photo Le DL / Stéphane PILLAUD
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Quelques-unes des pancartes du jour. Photo Le DL / Stéphane PILLAUD

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Quelques-unes des pancartes du jour. Photo Le DL / Stéphane PILLAUD

« Les gens sont contents d’être ensemble, même s’ils sont bien sûr en colère contre le petit Macron ! »

« Qu’est-ce que c’est chouette de voir cela. Les gens sont contents d’être ensemble, même s’ils sont bien sûr en colère contre le petit Macron ! Regardez tous ces sourires ! Moi, j’ai ma pension, mais je défile pour mes fils et mes petits-fils. C’est pour leur avenir ça. Allez, on y va ! »

Alors, oui, ils y sont allés. 40 000 selon les syndicats. 20 000 selon la police. En tout cas, plus nombreux que la première fois. Sur les banderoles, certains slogans étaient restés les mêmes que le 19 janvier – “Non la retraite à 64 ans” ou “Non, nous ne battrons pas en retraite” –, mais d’autres collaient aussi à l’actualité. Impossible de compter le nombre de pancartes où on pouvait lire le mot “bordéliser”, prononcé il y a trois jours par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, pour qualifier l’action des protestataires… On a aussi vu beaucoup de “Métro, boulot, caveau”, avec même une version purement grenobloise : “Vélo, boulot, caveau”.

« Vous savez ce que les gens ressentent aujourd’hui ? Ils ont l’impression que le gouvernement les prend pour des fainéants. Alors qu’on se bat pour vivre dignement, pour un peu d’espoir », nous disait un trentenaire, dont la doudoune est ornée d’un autocollant CFDT. « Moi, je n’en peux plus de les entendre nous dire qu’ailleurs, dans d’autres pays, c’est pire… Comme si on râlait pour rien. Pour eux, notre expression est illégitime. Et ça, c’est infantilisant et cela provoque de la colère et de la frustration… »

Mais ce mardi, si cette colère était bien présente, notamment dans certains chants syndicaux, l’ambiance était surtout conviviale. Et le ciel – devenu magnifiquement bleu quand le cortège est arrivé sur l’anneau de vitesse – y était aussi pour beaucoup. « Même la météo est de notre côté ! », rigolait une cégétiste, déjà prête pour les « prochaines fois ».

Le chiffre : 25,71%

Selon le rectorat de Grenoble, c’est le pourcentage d’enseignants de l’académie qui étaient en grève ce mardi. Cela correspond à un taux de grévistes de 22,61 % en élémentaire et en maternelle, de 28,83 % dans les collèges et les lycées.

Pourquoi ils ont manifesté

Maeva (n’a pas souhaité donner son nom, NDLR), 28 ans, bibliothécaire dans les environs de Grenoble : « Je me mobilise parce que je suis contre le fait de repousser l’âge de départ à la retraite, mais je suis là aussi parce que cette réforme pénalise les jeunes. Elle risque de saturer le marché du travail, alors qu’il suffirait de taxer de 2 % les plus riches pour financer les retraites. »

Photo Le DL / Antonin SEUX

Photo Le DL / Antonin SEUX

Denis Cret, 59 ans, employé aux services techniques aux bâtiments à la mairie de Chamrousse : « Ce n’est que la deuxième fois de ma vie que je viens manifester. J’ai travaillé 35 ans dans le bâtiment et je commence à être fatigué physiquement. Certains jours, j’aurais besoin de me reposer davantage. J’ai mal au dos et aux épaules. J’ai l’impression que je n’aurais pas le temps de profiter de ma retraite longtemps. Je viens manifester pour dire mon ras-le-bol. Plus je travaille et plus je vois ma retraite s’éloigner. »

Elsa Bonnard, 22 ans, étudiante en droit à Grenoble : « Je manifeste pour contester cette réforme. Si le gouvernement commence à reporter l’âge de la retraite alors que je ne suis qu’étudiante, qu’est-ce que ce sera quand j’aurais l’âge de prendre ma retraite ? »

Photo Le DL / A.S.

Photo Le DL / A.S.

Michel Brizard, 50 ans, cuisinier à Rives : « Ce sont toujours aux mêmes que le gouvernement demande de faire des efforts, aux plus précaires. On nous demande de travailler plus pour ne pas gagner plus. Les élites ne se rendent pas compte de nos conditions de vie. Ils ne savent pas ce que c’est de travailler à l’usine et de vivre avec un Smic. »

Elouan Pianck, 15 ans, élève au lycée Champollion de Grenoble : « Je viens pour défendre notre droit à avoir une retraite et à avoir une vie après le travail. C’est important que le maximum de monde se mobilise pour essayer de faire plier le gouvernement. »

Photo Le DL / A.S.

Photo Le DL / A.S.

Annie Lamounette, 64 ans, retraitée, habite à Moirans : « Je viens soutenir mes anciens collègues. Je suis partie à 62 ans à la retraite et heureusement que je n’ai pas eu à attendre deux ans de plus. Le travail, même en bureau, c’est usant. Nous avons besoin de nous reposer. Et puis il faut laisser la place aux jeunes. »


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