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vendredi 11 décembre 2020

Discussion autour de la mesure imposant le port du masque à l'école pour les enfants de 6 à 11 ans

 

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Auteur : Collectifs des parents soucieux de trouver le meilleur équilibre pour leurs enfants en période de Covid

Lettre ouverte à Emmanuel Macron, Président de la République, Monsieur Jean Castex, Premier Ministre, Messieurs Jean-Michel Blanquer, Ministre de l’Éducation Nationale, Olivier Véran, Ministre en charge des Solidarités et de la Santé et Jérôme Salomon, Directeur Général de la Santé,

Monsieur le Président, Messieurs les Ministres, Monsieur le Directeur

Au nom de plusieurs collectifs de parents d’enfants de 6 à 11 ans soumis à la mesure du port du masque obligatoire à l’école, nous vous adressons cette lettre, espérant attirer votre attention et susciter l’ouverture d’un dialogue sur ce sujet qui nous pose souci.

Alors que la grande majorité des mesures sanitaire a été réévaluée, ou que des perspectives ont été données pour celles encore en vigueur ; Messieurs Macron et Castex, lors de leurs dernières interventions, n’ont eu aucun mot concernant l’évolution du décret imposant le masque à l’école dès 6 ans ; mesure prise dans le contexte exceptionnel de pic épidémique que vous connaissez.

Nos enfants ne sont pas des détails dans cette crise.

Bien que ne faisant que des formes bénignes de la maladie, ils subissent pourtant de plein fouet ces mesures contraignantes et pénalisantes pour leurs apprentissages et leur équilibre, et n’ont pas l’occasion de faire entendre leur voix…

Au même titre que les syndicats, groupements d’intérêts, représentants des cultes… nous représentons des milliers d’enfants et autant de familles qui souhaitent être considérés et entendus.

À cet effet, nous vous serions reconnaissants de nous accorder, a minima :

  • Une information claire et régulière, y compris dans les médias et lors de vos allocutions, sur les mesures concernant les enfants de moins de 11 ans
  • L’ouverture d’un dialogue avec les représentants de nos collectifs
  • La prise en compte de nos positions et avis dans la mise en place de ces mesures
  • Les réponses aux questions qui vous sont adressées et certainement remontées par les personnels enseignants et de l’éducation nationale.

Nous souhaitons plus particulièrement attirer votre attention sur plusieurs points.

Le décret imposant le port du masque aux enfants de 6 à 11 ans a été pris conformément aux recommandations du Haut Conseil de Santé Publique (HCSP), qui lui-même s’est appuyé, selon le document, sur les recommandations de l’OMS. Il est à noter que l’Avis du HCSP ne mentionne comme source que le rapport de l’OMS concernant le port du masque pour les adultes, mais nous assumons que par extension, les recommandations de l’OMS concernant le masque pour les enfants de moins de 11 ans ont également inspirées l’avis du HCSP.

Ainsi, l’OMS et le HCSP indiquent notamment :

« En cette période et/ou zone de circulation très active du virus SARS-CoV-2 et par précaution, le port d’un masque grand public adapté par les enfants dès l’âge de 6 ans à l’école élémentaire (du CP au CM2) est recommandé, en respectant les difficultés spécifiques, notamment comportementales. »

  • Ainsi, si nous ne remettons pas en cause le port du masque au sein de la population générale, et ne nions aucunement la gravité de l’épidémie, nous constatons que les conditions de forte propagation de l’épidémie ayant motivé le décret ne sont déjà plus d’actualité, puisque la diffusion de l’épidémie, bien qu’encore active et stagnante, a néanmoins fortement baissé, ce qui a d’ailleurs permis la levée d’autres mesures comme la fermeture des commerces, l’interdiction des rassemblements dans les lieux de culte, la fermeture des clubs sportifs aux mineurs…

En outre, le rapport du HCSP ainsi que les recommandations de l’OMS insistent sur la nécessité d’encadrement et de supervision par un adulte, de respect des consignes d’utilisation du masque pour en garantir son efficacité. Les rapports mentionnent également les risques d’auto-contamination en cas de mauvais usage du masque.

  • Or, en mars dernier, vous avez-vous-même, Monsieur Véran, expliqué à quel point l’utilisation du masque - chez les adultes - était complexe, pointant du doigt l’impossibilité quasi certaine d’utiliser le dispositif dans les conditions adéquates, et concluant à l’inutilité certaine de celui-ci. Le contexte pénurique de l’époque explique probablement une partie de votre discours. Néanmoins, nous pouvons en retenir une chose qui n’est pas discutable : pour être efficace, un masque doit être utilisé dans des conditions strictes.
  • Vous conviendrez alors aisément qu’à 6 ans, on ne peut décemment pas porter un masque plusieurs heures d’affilées dans le respect de ces règles. Quant à la supervision par l’adulte telle que recommandée par les instances, et déclinée sur la mesure ; cela revient à faire porter la responsabilité des mauvaises utilisations du masque, et donc de tout ce qui pourrait en découler, aux enseignants. Est-ce vraiment souhaitable d’engager la responsabilité des enseignants de la sorte ?
  • Enfin, s’il est indéniable que la plupart des enfants se conforment du mieux possible, peut-être même plus que les adultes, aux règles ; les quelques semaines d’expérience et le recul dont nous bénéficions aujourd’hui le confirment : la pratique n’est pas du tout conforme à la théorie. Il est en effet impossible de veiller à l’utilisation correcte des masques dans des classes de 20 à 30 élèves. Les témoignages sont légions, et viennent autant des parents que des enseignants. Nous sommes des milliers à constater que les masques sont manipulés sans cesse. Dans de nombreux cas, ils reviennent souvent humides, sales, alors qu’ils sont encore sur le nez des enfants ! Dans ce contexte, comment pourriez-vous d’une part garantir leur efficacité, mais aussi, l’innocuité de ces mauvaises utilisations ?

Nous souhaitons également attirer votre attention sur l’absence d’éléments permettant d’appuyer cette mesure, dans le cadre d’une balance bénéfice / risque argumentée.

  • Le Conseil d’État a lui-même reconnu, à l’occasion du référé-liberté déposé récemment, qu’aucune donnée scientifique ne permettait de valider la mesure et que nous n’avions pas le recul nécessaire pour apprécier les effets secondaires du port du masque sur la santé, le développement, l’apprentissage et le psychique des enfants. Le référé a été rejeté au motif que la situation de circulation du virus à la date du décret, c’est à dire au 29 octobre, justifiait cette mesure exceptionnelle. La situation actuelle ne la justifie donc plus.
  • La mesure a donc été prise dans un principe de précaution, tout à fait louable par ailleurs. Cependant, nous estimons que ce principe de précaution vaut également pour les effets inconnus puisque non étudiés jusqu’à présent, sur le développement, les apprentissages, la santé psychologique, la relation à l’autre, la santé globale de nos enfants.

Nous nous permettons également de souligner deux points qui relèvent d’une simple observation empirique :

  • Nos voisins européens que sont l’Italie et l’Espagne, dont nous sommes les plus proches, à la fois géographiquement mais aussi culturellement, ont imposé le port du masque à 6 ans dès le mois de septembre. Pour autant, ils n’ont pas davantage réussi à juguler la deuxième vague et ont connu une situation similaire à celle de la France, à la même période.
  • Les écoles maternelles, établissements restés ouverts pendant la seconde vague et n’imposant pas le port du masque à leurs petits élèves (et c’est heureux !) n’ont pas été plus touchés que les écoles élémentaires par des clusters ou contaminations.
  • Les taux d’incidence et positivités des tests réalisés sur les enfants de moins de 9 ans restent bien inférieurs à ceux du reste de la population

Il est donc permis, si ce n’est de douter, de demander à ce que des études plus rigoureuses soient faites, de façon à infirmer ou valider, et quantifier, l’efficacité du port de masque, non pas théorique, mais dans les conditions réelles de la vie scolaire en classe élémentaire.

Enfin, nous souhaitons vous alerter sur les nombreuses incohérences et dérives, inacceptables, qui sont régulièrement portées à notre attention, et que nous pouvons malheureusement nous-mêmes constater.

  • Là où les adultes s’octroient volontiers des pauses, écarts dont nous sommes tous témoins, certains personnels enseignants ont pris l’habitude de punir systématiquement les enfants qui baissaient simplement leur masque quelques secondes. La teneur de ces punitions varie. De simples lignes d’écritures mais aussi des brimades, exclusions, et isolements nous ont été remontés.
  • Le refus des certificats médicaux, rédigés par les médecins traitants des enfants, constitue également une atteinte et une ingérence gravissime à la santé des enfants concernés. Rappelons que seuls les médecins traitants sont censés connaitre l’état de santé, à la fois physique et psychique de l’enfant. Cette décision est en outre une négation du professionnalisme des médecins traitants et une ingérence complète dans l’exercice de leur fonction. Les recommandations du HCSP et de l’OMS précisent bien que le port du masque à cet âge, doit être adapté aux difficultés spécifiques et comportementales. Comment pourrait-on respecter cette recommandation en passant outre les conseils des médecins de terrain, seules personnes habilitées à poser un diagnostic spécifique et adapté à l’enfant ?
  • L’absurdité de certaines situations conduisant des moitiés de classe mixte (GS/CP) à porter le masque quand l’autre moitié des élèves ne le portent pas. Dans ces classes non seulement la mise en place est ridicule mais elle expose les enfants à une incompréhension totale des mesures et par ricochet, de l’ensemble des recommandations qui leur sont faites.
  • Pour finir, des excès de zèle de certaines mairies, écoles, structures périscolaires sont régulièrement constatés. Ainsi, nous avons de nombreux exemples d’enfants obligés de garder leur masque pendant la pratique sportive. Les joggeurs et cyclistes en sont dispensés, et il n’a jamais été envisagé de faire porter un masque aux sportifs. Comment peut-on donc tolérer que des enfants de moins de 11 ans soient contraints de porter un masque pendant un effort physique ? Et comment pourriez-vous garantir leur sécurité, alors même que l’ensemble des recommandations convergent vers le retrait systématique du masque dans ces situations ?

Punir un enfant de 6 ans pour avoir baissé son masque quelques minutes ne semble pas digne de notre république. Tolérer les brimades, les discours culpabilisants et anxiogènes que certains tiennent aux enfants nous semblent être une insulte faite à notre démocratie bienveillante.

Nous vous demandons instamment de mettre fin à ces pratiques d’un autre âge, de faire un rappel à l’ordre salutaire de tous les personnels et de permettre, à minima, un assouplissement et une tolérance indispensable quand il s’agit d’enfants de moins de 11 ans !

Pour conclure, nous faisons donc appel à votre bon sens, votre bienveillance et votre humanité. Nous vous demandons :

  • De revoir cette mesure à la lueur des éléments portés à votre connaissance, et dans une considération exhaustive d’une balance bénéfice / risque pour les enfants
  • De nous accorder audience, de communiquer avec nous régulièrement et de faire de nous, parents et principaux intéressés, des parties prenantes de toutes les réflexions, évolutions et décisions concernant les mesures touchant à nos enfants
  • De commanditer les études adéquates et pertinentes auprès du HCSP, de l’éducation nationale et des experts de l’enfance, sur les sujets qui nous occupent, de façon à ne plus considérer le port du masque pour les enfants sous le seul prisme du principe de précaution vis-à-vis de la Covid19, mais bien sous l’angle de la santé globale des enfants
  • De mettre en place une surveillance et un suivi de la mesure. De « continuer à recueillir des données scientifiques sur l’efficacité du port du masque (y compris de différents types et marques ainsi que d’autres moyens de se couvrir le visage, par une écharpe par exemple) dans des contextes autres que les soins de santé (…) d’évaluer l’effet (positif, négatif ou neutre) du port du masque par le grand public (y compris du point de vue des sciences sociales et comportementales) », comme préconisé par l’OMS dans son avis du 5 Juin 2020
  • De mettre en place des concertations permettant d’envisager des mesures alternatives, assurant la sécurité des personnels enseignants et notamment des plus vulnérables, sans nuire ni pénaliser l’ensemble des enfants de moins de 11 ans scolarisés à l’école de la République
  • De mettre fin aux dérives constatées et listées ci-dessus.

Pour nos enfants, les adultes de demain.

 
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