Que se passe-t-il avec les Ouïghours en Chine ?
Depuis plus de deux ans, plus d’un million de Ouïghours, ethnie musulmane de la région du Xinjiang, en Chine, sont enfermés et/ou surveillés par les autorités chinoises. Explications.
La République Populaire de Chine a fêté ses 70 ans mardi 1er octobre. Des célébrations arrivées à un moment critique pour le pouvoir, notamment à cause des condamnations internationales concernant les camps secrets du gouvernement où seraient enfermés les Ouïghours, ethnie musulmane de la région du Xinjiang. Il est devenu très difficile de rentrer dans cette province du nord de la Chine et impossible d’en sortir. Le gouvernement chinois surveillerait de très près et séquestrerait cette minorité ethnique musulmane dans des camps d’internement, officiellement appelés “camps de rééducation politique”, qui serviraient à exterminer ou endoctriner cette minorité.
Des bâtiments entourés de barbelés et aux vitres bouchées dans lesquels les détenus doivent chanter l’hymne du parti communiste chinois, réciter par cœur la pensée du président Xi Jinping et regarder des vidéos de propagande, selon certains témoignages. Ils auraient également l’interdiction de parler le Ouïghour, de pratiquer leur religion et de respecter leurs traditions, sous peine de punition ou de torture. La Chine collecterait même les organes de cette minorité pour qu’ils servent de réservoir d’organe pour les hôpitaux du pays.
The China Tribunal, un organisme indépendant étudiant et reportant le respect des droits de l’homme en Chine, a avancé des preuves selon lesquelles le trafic d’organe était parfois réalisé sur des personnes encore vivantes. Une vidéo prise par un drone, récemment publiée sur Youtube, montre que des déplacements massifs de détenus ouïghours ont été secrètement effectués. On y voit des prisonniers, la tête rasée, un bandeau sur les yeux et les mains liées derrière le dos sous la surveillance d’hommes armés.
Les origines de cette oppression
Ce sont des émeutes ethniques qui ont déclenché les hostilités. En juillet 2009, à Urumqi, capitale du Xinjiang, Ouïghours et Hans (l’ethnie majoritaire en Chine à 92%) s’affrontent dans les rues et le bilan est de près de 200 morts et d’environ 2000 blessés. Depuis ce jour, le gouvernement chinois a décidé de renforcer sa politique sécuritaire dans la région autonome du Xinjiang, un véritable tournant pour les Ouïghours. Des attaques terroristes perpétrés par des Ouïghours à Pékin en 2013 puis à Kunming et Urumqi en 2014, ne font que renforcer les mesures extrêmes prises par le gouvernement pour enfermer le Xinjiang et restreindre la liberté de parole et de la mobilité de la population ouïghoure. La construction des camps aurait véritablement débuté en mars 2017.
La population harcelée
Si un dixième de la population ouïghoure serait enfermé dans ces camps, le reste de la région du Xinjiang est une vraie prison à ciel ouvert. Les autorités mettraient des moyens technologiques très importants pour surveiller les Ouïghours : caméras, logiciels espions dans les téléphones, vols des données biométriques ou encore interdiction de voyager sans autorisation. Téléphoner à l’étranger ou s’y rendre, porter une barbe, refuser de boire de l’alcool ou donner un prénom musulman à son enfant peut suffire à être emmené en prison ou condamné à mort pour “extrémisme religieux”. Récemment, Nihad Jariri, une journaliste jordanienne, est allée en vacances dans la province du Xinjiang et s’est rendue compte que des dispositifs de reconnaissance faciale étaient installés à l’entrée des mosquées, pour repérer les musulmans les plus pratiquants, comme elle l’a expliqué à nos confrères de France24. Hors des frontières de la Chine, la diaspora ouïghoure essaie de récupérer des images via l’application TikTok, pour avoir des nouvelles de leur famille mais également pour avertir le monde sur leur situation et donc dénoncer la propagande chinoise.
Que font les autres nations ?
Michelle Bachelet, ancienne présidente du Chili et désormais haute-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, a demandé à la Chine de donner un “accès total” à la région du Xinjiang. Ce à quoi Pékin a répondu : “Le Xinjiang est une région ouverte, toutes les parties sont les bienvenues, y compris des fonctionnaires de l’ONU, pourvu qu’elles respectent les lois et règlements chinois.” Avant d’ajouter que l’ONU devra “s’abstenir de toute ingérence dans les affaires intérieures de la Chine et d’empiéter sur la souveraineté chinoise.” Des visites très encadrées des “centres de formation professionnelle” pour adultes ont été organisées. Grâce à des images satellites, la BBC a démontré que les clôtures électriques et les miradors ont été démontés et des terrains de sports installés avant la visite. Au mois de juillet, 22 pays - dont la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne - ont signé une lettre envoyée à l’ONU pour dénoncer la situation. Ces pays ont appelé Pékin à “s’abstenir de toute détention arbitraire et restriction à la liberté de mouvement des Ouïghours.” Quelques jours plus tard, Pékin a répondu avec une liste de 37 pays qui soutiennent la Chine, dont de nombreux pays musulmans, qui appellent la communauté internationale à ne pas se fier à des “informations non confirmées avant de visiter le Xinjiang.”
La Chine, qui niait encore l’existence de ces lieux en octobre 2018, a changé de discours du jour au lendemain pour justifier l’enfermement d’environ un million d’Ouïghours. Le Parti communiste chinois a expliqué que ces personnes étaient incarcérées pour “lutter contre le terrorisme” et “favoriser la stabilité sociale”. Il parle même de “centres de formation professionnelle” pour “éduquer et transformer” cette minorité et leur offrir des “opportunités d’emploi.”
37 pays ont soutenu dans une lettre à l’ONU le parcage des musulmans ouïghours par le gouvernement chinois. Cette liste est celle de la honte. Opposons-lui la solidarité citoyenne, dans tous nos pays, avec les prisonniers de conscience du Xinjiang. pic.twitter.com/xqTBsq4UiO— Raphael Glucksmann (@rglucks1) September 30, 2019
La Chine, qui niait encore l’existence de ces lieux en octobre 2018, a changé de discours du jour au lendemain pour justifier l’enfermement d’environ un million d’Ouïghours. Le Parti communiste chinois a expliqué que ces personnes étaient incarcérées pour “lutter contre le terrorisme” et “favoriser la stabilité sociale”. Il parle même de “centres de formation professionnelle” pour “éduquer et transformer” cette minorité et leur offrir des “opportunités d’emploi.”
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