Translate

jeudi 25 janvier 2018

Avant la visite de Macron en Corse, les nationalistes font monter la pression


25 janvier 2018

Avant la visite de Macron en Corse, les nationalistes font monter la pression

Déçus par leurs entretiens à Paris avec le premier ministre et le président du Sénat, les dirigeants de la collectivité unique appellent à " une grande manifestation populaire "

agrandir la taille du texte
diminuer la taille du texte
imprimer cet article
Les discussions engagées à Paris, lundi 22 janvier, avec le président du conseil exécutif de la collectivité unique de Corse, Gilles Simeoni, et le président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, ont essuyé mardi un brusque coup de froid. Lundi soir, ils s'étaient entretenus à Matignon pendant plus de deux heures avec le premier ministre, Edouard Philippe, entouré du ministre de l'intérieur, Gérard Collomb, et de Jacqueline Gourault, la ministre chargée du dossier corse. A la sortie, M. Simeoni avait fait part d'" une forme de déception " mais voulait néanmoins espérer que l'exécutif préciserait ses intentions " dans un calendrier resserré ".
Changement de ton, mardi, à l'issue de l'entrevue qu'ont eue les deux dirigeants nationalistes avec le président du Sénat, Gérard Larcher. " On est en train de nous demander d'aller à l'abattoir et de renoncer à tout ce qui fait le fondement même de notre engagement, déclarait à la sortie M. Simeoni, courroucé, au micro de Public Sénat. Cette discussion n'en est pas une. En conséquence, il n'y a pas en l'état de raisons de la continuer. "
Dans la foulée, les deux élus corses ont lancé un même appel sur leurs comptes Twitter : " Après nos entretiens d'hier et d'aujourd'hui, notre conviction est faite : l'Etat refuse de reconnaître et de prendre en compte la dimension politique de la question corse. Dans ces conditions, nous appelons dans les prochains jours à la tenue d'une grande manifestation populaire. " En termes plus prosaïques : ils ont le sentiment de " se faire balader " et ont décidé de faire monter la pression sur l'exécutif.
Joint par Le Monde, M. Simeoni se défend de tout " chantage "" Mais il faut comprendre que, en Corse, les attentes sont grandes, poursuit le président du conseil exécutif. Il y a une situation politique nouvelle, qui s'est concrétisée par notre large victoire aux élections territoriales - en décembre  2017 - . La première chose que nous demandons au premier ministre, c'est qu'il reconnaisse la dimension politique de la question corse, pour tourner ensemble la page. Il ne nous répond rien. Sur l'autonomie, il nous répond qu'il ne sait pas ce que ça veut dire. Quand on met bout à bout hier et aujourd'hui, c'est un entonnoir qui nous conduit à renoncer à tout. Ce n'est plus une discussion, c'est une capitulation. Ava basta - maintenant, ça suffit - ! "
Les échanges n'ont pas été plus fructueux avec M.  Larcher. Pour le président du Sénat," si la spécificité insulaire de la Corse et son identité doivent être prises en considération, la République est une et indivisible ", selon les termes de son communiqué.
Poussée d'adrénalineAussi, pour lui, " c'est autour de l'article  72 et uniquement autour de l'article  72 qu'il peut y avoir un débat, comme avec d'autres collectivités à statut particulier ". C'est-à-dire oui à un " droit à la différenciation ", comme le président de la République envisage de l'introduire à l'article  72 de la Constitution et qui consacrerait un droit général des régions mais non à une mention spécifique de la Corse, ouvrant la voie à une autonomie plus large. La tonalité de ses propos a eu pour effet immédiat de cabrer les élus corses.
" Nous allons rentrer en Corse, consulter nos instances et voir ce que nous allons décider, indiquait mardi soir M. Simeoni. Probablement, nous appellerons à une grande manifestation, avant le 6  février. " Date de l'arrivée prévue sur l'île de M.  Macron, à l'occasion du vingtième anniversaire de l'assassinat du préfet Claude Erignac. Un séjour qui devrait se prolonger le lendemain, même si le calendrier n'en est pas encore définitivement arrêté, par des entretiens politiques entre le chef de l'Etat et les dirigeants de la nouvelle collectivité unique.
Malgré cette poussée d'adrénaline, les discussions entre l'exécutif et les dirigeants nationalistes sont loin d'être rompues. Matignon fait part de sa volonté de poursuivre le dialogue. Le premier ministre a proposé une " méthode ". Il lui est cependant difficile de formuler des propositions tant que le président n'a pas arbitré. Car il est clair que, sur ce dossier, c'est M. Macron qui a la main et c'est de lui que les nationalistes attendent des réponses. " Le seul qui peut débloquer cette situation, c'est le président de la République ", a répété M.  Talamoni, mardi soir, au micro de Canal+.
" Il y a toujours une phase de tension avant une négociation au sommet, note un proche du dossier. Cela relève plus d'une sorte de scénarisation. " Destinée également à donner des gages à une frange du mouvement nationaliste et de la jeunesse corse qui commence à montrer quelques signes d'impatience. Les dirigeants de la collectivité sont, eux aussi, sous pression.
Patrick Roger
© Le Monde

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire