lu dans le DL du 31.01.2018
LE BILLET
PAR GILLES DEBERNARDI
Entendez-vous
dans nos Ehpad ?
On les appelle « seniors », maintenant, en signe supposé de respect.
Moyennant quoi, l’institution peine à les traiter de manière digne. Plus
personne n’a le temps d’écouter ce que « leurs pauvres mains
racontent », comme chantait Brel.
Ça ne se passe pas partout,
d’accord, mais dans nombre d’établissements.
La grève d’hier avait le
mérite de nous forcer à regarder ce qu’on s’applique à ne pas voir.
Entendez-vous dans nos Ehpad l’humanité qui s’effiloche ?
Une chape
de culpabilité pèse sur les familles contraintes de placer là-bas leurs
aînés, au prix souvent d’un lourd sacrifice.
Sur les personnels, aussi,
« usés, épuisés », qui lancent un cri de désespoir. Infirmières et
aides-soignantes n’y arrivent plus, le manque de moyens les pousse à
l’abattage.
Les voici à s’accuser de « maltraitance », avec des maux
pour le dire.
La toilette quotidienne qui devient hebdomadaire, les
repas servis froids, les soins bâclés et, surtout, l’immense solitude qui
gagne les résidents.
Pour combler ce déficit de tendresse, il faudrait,
grosso modo, doubler les effectifs d’encadrement.
Les comptables du
Trésor ne seront pas contents ?
Tant pis, c’est le prix à payer pour ne
plus avoir honte et sauver l’essentiel : l’honneur d’une civilisation.
Les
arguments budgétaires, à côté, ne pèsent pas lourd.
Faire des
économies sur les personnes âgées, vulnérables et dépendantes ne
saurait relever d’une « bonne politique ».
Aidons massivement les
maisons de retraite !
Il ne s’agit pas que d’altruisme, mais de se
garantir un avenir pas trop moche.
Parce que le tour de chacun
viendra. « J’aime les vieux », écrivait Giraudoux, « ils sont si bons
qu’ils ont l’air sûrs que nous deviendrons aussi vieux qu’eux. »
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