Gattaz pense trop ! Ça le fatigue de penser !
Le Parisien du 1er décembre 2015
On aura tout vu, tout entendu. Gattaz compare le programme de Marine le Pen à celui de l’Union de la Gauche en 1981 ! Bêtise si c’est pour dissuader de voter FN. Car c’est un très bon souvenir pour tous ceux qui ont, à l’époque, bénéficié du passage de la retraite à 60 ans, de l’augmentation du Smic et des minima sociaux ! Puis vient le double outrage. Le premier asséné par Valls qui soutien Gattaz et le laisse comparer une victoire de Le Pen à celle du Programme Commun et de François Mitterrand. Puis celui commis par Gattaz sous l’habituelle antienne des importants « Mélenchon – Le Pen : même combat ». Comme c’est neuf et subtil !
Bon, reprenons les faits. En réalité, Mme Le Pen ne propose ni la retraite à 60 ans ni la hausse du SMIC ! Le Front National l’a même redit après l’interview de Gattaz aussi clairement dans un communiqué : « Dans notre programme, il n’y a pas de retour de la retraite à 60 ans (…). Il n’y a pas non plus de hausse de 200 euros du SMIC » ! Ce n’est pas une nouveauté. En 2012, Mme Le Pen disait déjà être contre la hausse du SMIC. « Augmenter le SMIC est une mauvaise mesure » a-t-elle répété le 31 mars dernier sur Public Sénat. La proposition de Le Pen pour les bas salaires est un jeu de dupe. Baisser les cotisations sociales payées par les salariés pour faire augmenter le salaire net, sans faire augmenter le salaire brut. C’est « donne-moi ta montre et je te dirai l’heure ». Car le salaire brut, c’est du salaire. Les cotisations appartiennent déjà aux salariés et servent à payer l’assurance retraite, chômage, maladie, etc. François Hollande a même repris cette idée en 2014. Il a été censuré par le Conseil constitutionnel qui a jugé l’exonération de cotisations sociales contraire au principe d’égalité entre salariés.
Quant à la retraite, le FN n’a jamais défendu la retraite à 60 ans. En 2012, Marine Le Pen s’était pris les pieds dans le tapis en disant être à la fois pour la retraite à 60 ans et pour la « retraite à la carte » qui en est le contraire. Le 18 mai dernier, le secrétaire-général du FN, Nicolas Bay, avait dit clairement «Nous n’avons jamais défendu la retraite à 60 ans. Nous avons défendu le principe des 40 annuités, ce qui est un peu différent ». Et sur ce point de la durée de cotisation, la position du FN est bien fragile. Ainsi, le Monde du 6 novembre dernier, Joëlle Melin, responsable du programme du FN disait « Nous aurons du mal à rester sur les 40 ans de travail, il faut tenir compte de l’allongement de la vie, il va falloir être inventifs » !
Gattaz sait très bien tout cela. Alors pourquoi fait-il à Mme Le Pen le cadeau de la repeindre en défenseure des travailleurs ? Pierre Gattaz panique : le FN est en train de progresser chez les patrons comme jamais. J’espère que les médias l’interrogeront aussi souvent sur le vote patronal pour le FN que nous l’avons été sur le vote ouvrier. Pierre Gattaz agit en service commandé pour aider la droite et le PS. D’ailleurs, Manuel Valls l’a félicité ce mardi matin sitôt l’interview paru. L’oligarchie serre les rangs.
Le Pen est une complice active du MEDEF contre les salariés. Ainsi en 2014, Mme Le Pen s’est abstenue au Parlement européen sur la directive sur les travailleurs détachés. Elle a ainsi validé ce dumping légal qui met les salariés en concurrence entre eux en autorisant les employeurs à payer des cotisations sociales différentes selon le pays d’origine des salariés. De même, le FN défend l’allongement du temps de travail. Bernard Monot, conseiller économique de Marine Le Pen l’a dit : « Nous voulons être plus ambitieux sur les 35 heures : nous souhaitons revaloriser le travail, organiser un retour aux 39 heures ». De même, en 2012 Mme Le Pen s’opposait à la limitation des salaires des grands patrons. Pour elle, notre proposition de « salaire maximum autorisé » était « une fausse bonne idée version soviétique ».
Rappelons pour finir qu’elle communie avec le MEDEF pour exiger le retour de l’apprentissage à 14 ans. Voilà le portrait de celle que Gattaz présente comme mon double… Je me demande si en voulant ramener au bercail ses ouailles patronales, Pierre Gattaz n’est pas plutôt en train de remplumer le vote Le Pen. Car dans notre pays monsieur Gattaz reste un repoussoir et lui déplaire en votant contre son avis est toujours un plaisir dans les milieux ouvriers.
Pour aller plus loin, voir aussi la note d’Alexis Corbière : Taisez-vous, Monsieur Gattaz !
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