Lu dans le Dauphiné Libéré du mardi 3 janvier 2017
LE BILLET
PAR GILLES DEBERNARDI
“Biens mal acquis”,
et les émirs alors ?
Le procès qui s’est ouvert hier à Paris marque un tournant symbolique.
On juge le fils du président de Guinée Équatoriale, coupable d’avoir
placé en France, à son propre profit, l’argent public détourné chez lui.
Tandis que ses compatriotes crèvent la dalle, ce fringant play-boy
flambe hardiment sur les bords de Seine. Notre industrie du luxe y
trouve son compte, pas la morale. Hôtel particulier avenue Foch, achat
de la collection Yves Saint-Laurent, valises de billets à gogo, Teodorin
Obiang joue les nababs.
Le voici rattrapé par l’opération “Biens mal
acquis” lancée par deux ONG dont la plainte, contre toute attente, a fini
par aboutir. Des procédures semblables visent les familles du chef
d’État congolais Sassou-Nguesso et de son ex-homologue gabonais
Omar Bongo.
En attendant mieux.
Veut-on vraiment s’attaquer aux dirigeants peu scrupuleux qui
captent les fonds de leur pays déshérité pour se constituer un
patrimoine au soleil occidental ? Intention louable, mais il faudrait alors
ne pas se contenter de regarder vers l’Afrique.
Les capitaux « volés aux
peuples » et dont profite l’Hexagone proviennent aussi d’Amérique du
Sud, des oligarques de l’ex-bloc soviétique ou des nouvelles fortunes
asiatiques. Sans oublier les monarchies du Golfe pour qui le tapis rouge
reste toujours tendu. On n’imagine pas le président du PSG, que tout le
monde appelle déjà « Nasser », avoir à s’expliquer devant la brigade
financière. Dans la patrie de Voltaire, courbettes garanties, l’émir doit se
sentir comme à la maison.
Nul n’ira contester son droit à s’approprier la
rente pétrolière nationale.
Aucun Saoudien ni Qatarien, aux dernières
nouvelles, ne risquent d’être inquiétés par la justice française.
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