Jordan Bardella n’a visiblement pas envie de s’attarder sur le sujet. Il reprend une gorgée d’eau, répond
« Oui, Madame le juge » à la journaliste de France Info qui le questionne, explique que ce n’est pas une
« problématique essentielle pour la vie des gens » et rappelle en souriant que l’ancienne ministre
Nathalie Loiseau a, elle aussi, appartenu au Groupe Union Défense (GUD) dans sa jeunesse.
C’est ainsi que le président du Rassemblement national (RN) a voulu clore, mardi 25 octobre, la polémique ravivée depuis quelques jours autour
des liens de proximité anciens qui unissent le parti d’extrême droite avec plusieurs ex-membres de ce groupuscule aux méthodes violentes, qui ont accompagné l’ascension de Marine Le Pen et ont été au cœur des campagnes électorales du mouvement,
jusqu’à récemment.
Invité sur LCI le dimanche précédent, le député RN Jean-Philippe Tanguy avait déjà assuré,
contre les faits et l’histoire du parti qu’il a rejoint en 2020, que
« le GUD est un ennemi historique du Rassemblement, même du Front national ». Assis derrière lui, ses soutiens ne savaient même plus dans quel sens opiner du chef tant ces propos sont mensongers.
Prenant à témoin les journalistes, l’élu d’extrême droite a aussi défendu, ce jour-là, le
« combat politique » de Marine Le Pen contre l’antisémitisme :
« Vous connaissez Marine Le Pen, vous la suivez, vous l’interviewez depuis longtemps, vous savez que ses positions sur ces sujets sont extrêmement claires », a-t-il affirmé, évoquant notamment sa prétendue
« reconnaissance des tragédies de notre histoire ».
Pourtant, le temps où l’ancienne candidate à la présidentielle
qualifiait d’« erreur » la reconnaissance, par Jacques Chirac, de la responsabilité de l’État français dans la rafle du Vél’ d’Hiv, n’est pas loin – c’était en 2017. Tout comme celui où elle participait
à un bal viennois, organisé par plusieurs corporations dont l’une est interdite aux juifs.
Héritage jamais renié d’un parti créé avec
d’anciens collaborationnistes, positionnement fluctuant sur Israël,
déclarations antisémites de nombreux candidat·es aux élections intermédiaires... Depuis dix jours, les responsables du RN, et avec eux nombre de commentateurs à la mémoire courte, agissent comme si l’extrême droite n’avait aucun passé – ni présent – en la matière.
Contrairement à ce qu’il laisse entendre, le Front – devenu Rassemblement – national est loin d’en avoir fini avec l’antisémitisme, y compris de la part de ses sympathisant·es, comme en atteste
cette étude réalisée en 2015 par la sociologue Nonna Mayer, directrice de recherche émérite au CNRS, avec la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH).
La chercheuse, qui étudie l’extrême droite depuis quarante ans, y souligne que
« l’image négative de la religion juive et le sentiment que les Juifs forment un groupe à part » a continué de progresser chez les sympathisants du parti, après l’arrivée de Marine Le Pen aux commandes en 2011. Elle note en outre que les
« préjugés anti-juifs » y sont
« beaucoup plus fréquents [...]
que chez ceux des autres partis ».
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