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dimanche 29 mai 2022

La santé avec PureSanté - La fameuse (dernière) prise de sang

 La santé 

La fameuse (dernière) prise de sang

Chère lectrice, cher lecteur,

Dans une période où la vie est difficile pour de nombreuses personnes, le médecin qui mettra tout son art à établir un diagnostic et à proposer un traitement, devra aussi prendre en considération les difficultés financières de son patient.

En effet, le malade devra engager des dépenses nombreuses et parfois pendant une durée prolongée.

C’est pourquoi le médecin choisira avec attention les examens complémentaires dont il aura besoin pour établir son diagnostic.

Il existe malheureusement en médecine des habitudes souvent irréfléchies : pendant des années, le médecin pensant faire de son mieux rédige par exemple la même formulation sans se rendre compte qu’elle n’a ni raisons valables ni indications réelles à être établie ainsi.

J'ai mis longtemps avant de me soucier de la justesse et de la précision nécessaires des prescriptions, notamment d’examens biologiques.

Il me semble essentiel de vous parler des prises de sang, car je m’aperçois chaque jour combien ces analyses biologiques ne sont pas comprises par les patients, et pas toujours utilisées à bon escient par les médecins.

Dans cette lettre, je reviendrai notamment sur le réel intérêt de certains dosages courants, tels que ferritine, TSH, urée, cholestérol…

S’il vous plaît, ne dites pas cela à votre médecin !

À chaque fois qu’un malade prend rendez-vous, mes secrétaires demandent qu’il apporte toutes les prises de sang, même anciennes… et même sans relation avec le problème pour lequel il consulte.

Mais dans la majorité des cas, le patient me tend une seule prise de sang, c’est-à-dire une feuille de trois pages : « je vous ai apporté la dernière prise de sang ».

Il n’y a rien de plus irritable que cela.

Car qu’y a-t-il dans ces prises de sang ? C’est là où le bât blesse, parce que les patients ne savent pas ce qu’elles contiennent vraiment.

Certains patients pensent qu’il s’agit de « LA PRISE DE SANG » c’est-à-dire qu’il n’y a qu’une seule prise de sang, qu’une seule analyse, valable pour tout qui est soit normale, soit anormale.

Une patiente n’avait par exemple pas fait réaliser les analyses que j’avais demandées à la suite de sa consultation, car elle considérait que « LA » prise de sang avait déjà été faite par son médecin (elle me l’avait en effet apportée) et donc que ma prise de sang devait être faite après le traitement.

Curieux raisonnement, car cette malade était porteuse d’une maladie que son médecin n’avait même pas envisagée.

Et donc la prise de sang du médecin avait examiné des paramètres biologiques sans rapport avec les symptômes de la patiente.

La prise de sang ne révèle que ce que l’on recherche…

Cette notion de paramètres biologiques, de marqueurs sanguins, de dosages n’est pas partagée par tout le monde.

Beaucoup de patients ignorent que le laboratoire ne mesure que ce que le médecin a demandé et rien d’autre. S’il y a par exemple dans le sang des cellules cancéreuses, le laboratoire ne les verra pas si on ne lui demande pas de les chercher.

Si vous souffrez de démangeaisons et que votre médecin vous prescrit un dosage de cholestérol, vous n’aurez que le dosage du cholestérol. Pensez-vous que si ce dosage est anormal, cela sera la cause de vos démangeaisons ?

Certes non !

Ainsi, je vous invite à regarder soigneusement ce que votre médecin vous a prescrit lors de vos consultations pour des problèmes différents : mal de ventre, urticaire, infection urinaire, entorses, etc.

Vous verrez peut-être qu’il aura prescrit à chaque fois quasiment la même chose, pour ne pas dire exactement la même chose.

Et il vous dira que le bilan est normal, alors que vous êtes pourtant malade !

C’est comme si un technicien venait compter vos poignées de porte

Imaginez que vous fassiez venir un spécialiste de l’habitat dans votre maison parce que le chauffage ne fonctionne plus.

Ce technicien – qui n’a visiblement pas beaucoup d’expérience – a pris l’habitude à chaque fois qu’il entre dans une maison de compter les ampoules, les poignées de porte et les anneaux de rideau. Et ainsi vous aurez un résultat : 12 ampoules, 28 anneaux de rideau et 4 poignées de porte.

Est-ce qu’il y a matière ici à savoir pourquoi vous n’avez plus de chauffage ?

Dites-vous bien que lorsqu’une prise de sang est identique d’une fois à l'autre, c’est-à-dire que les dosages qui ont été demandés sont les mêmes, il n’y aura pas possibilité d’avancer dans votre diagnostic.

Cholestérol et sodium : quand l’analyse est utile… et quand elle ne l’est pas

Lorsque l’on regarde précisément ce qui est dosé à côté du cholestérol (le fameux cholestérol, comme si toute la médecine tournait autour du cholestérol), vous verrez sur la quasi-totalité de vos prises de sang des dosages de sodium, potassium et chlore.

Or statistiquement il n’y a quasiment aucune chance d’observer une anomalie sur ces dosages lorsque vous consultez pour les pathologies citées plus haut.

Doser le sodium chez quelqu’un qui a une hypertension artérielle ou, au contraire, est très fatigué avec une baisse de tension artérielle, peut être utile quand on recherche une anomalie de fonctionnement des glandes surrénales.

Mais cette maladie est tellement peu fréquente qu’il n’est véritablement pas rentable de faire de tels dosages.

Et encore faudrait-il que le malade n’ait pas d’autres problèmes de santé que les troubles de la pression artérielle.

Le problème avec le dosage du fer (et ce qu’il faudrait plutôt vérifier)

Jusqu’à ce que les autorités informent de l’inutilité du dosage du fer lorsque l’on recherche un manque de fer, cette analyse était régulièrement prescrite pour rechercher un déficit martial (c’est comme cela que l’on nomme le déficit en fer).

En réalité, le taux de fer ne peut pas refléter la quantité de fer présente dans l’organisme. Car en cas de carence, les taux de fer libres peuvent être normaux ou bas ou élevés.

Si l'on soupçonne un déficit en fer chez une personne adulte qui présente des manifestations comme la chute des cheveux, une irritabilité, et que la cause est établie comme étant des ménorragies (règles trop abondantes) il y a une meilleure manière de procéder.

Tout d’abord, on doit être convaincu que toute femme qui a des règles de plus de six jours deviendra déficiente en fer.

Dans ce cas, pas besoin de prise de sang pour débuter un traitement de supplémentation (sauf si l'on veut pouvoir quantifier pour comparer).

Puisque la carence en fer ne s'accompagne pas d'une anémie dès le début, mieux vaut rester pragmatique face à l'absence de fatigue, d’essoufflements, de pâleurs des muqueuses écartant l’éventualité d’une anémie surajoutée.

Si votre médecin opte pour des dosages biologiques, il devra se refuser de doser des marqueurs inutiles et coûteux, comme le dosage du fer sérique, comme on vient de le voir.

Ferritine : méfiez-vous des valeurs « normales »

Dans la grande majorité des cas, la Haute Autorité de Santé ne recommande qu’un seul et unique dosage, celui de la ferritine (sauf circonstances particulières, population particulière, jeune enfant ou personne âgée, et en l’absence de syndrome inflammatoire).

Combien d’économies pour les malades et pour les caisses si on supprimait les dosages systématiques non justifiés pour se focaliser sur ceux qui sont vraiment importants.

Quant aux valeurs de la ferritine, méfiez-vous des valeurs dites « normales » : ce n’est pas parce que votre taux se trouve entre la valeur la plus basse et celle la plus élevée qu’il est normal pour autant.

Ce sont des valeurs indicatives, qui semblent plutôt être celles trouvées dans une population que celles normalement attendues chez une personne en bonne santé.

Pour la ferritine, il est clair maintenant que des valeurs autour de 10 ng/ml (valeur basse de référence) sont de loin insuffisantes, et qu’il faudrait atteindre des taux aux environs de 60 ng/ml.

Dosage de l’urée : 15 euros de trop ?

Intéressons-nous maintenant à la fonction rénale.

On voit sur toutes les prises de sang le dosage de l’urée. Je ne sais pas combien coûtent ces dosages, probablement autour des 15 €.

Or il s’agit là d’un dosage souvent inutile.

L’urée est un déchet azoté provenant de la dégradation des protéines par le foie. Le taux d’urée ne dépend pas seulement de la fonction rénale puisqu’il est aussi lié aux apports alimentaires, à l'âge, à l’état de déshydratation de la personne et au degré de catabolisme de cette personne.

L’urée ne devrait être dosée que si le médecin a toutes les bonnes raisons de penser que son malade a une insuffisance rénale. Et lorsqu'il y a insuffisance rénale, c'est le rapport urée sanguine sur urée urinaire qui peut permettre d'en identifier la cause.

Or qui dose l'urée urinaire dans la pratique courante ?

Si le dosage de l'urée était soigneusement pris en compte, après avoir fait l'objet d’une lecture attentionnée, alors oui, il pourrait être utile de le faire dans certaines conditions (en sachant que ce ne sont pas seulement les taux élevés d’urée qui intéresseront le médecin, mais aussi des valeurs basses qui peuvent révéler une insuffisance hépatique, un état d’alcoolisme, de malnutrition ou toute autre hépatopathies).

Mais il faut garder à l’esprit que la quantité d’urée produite chaque jour varie en fonction de l'alimentation. Sauf dans de rares cas, ce dosage n’est donc pas justifié et il est préférable de s'en tenir aux taux de créatinine.

Cela fera faire une économie aux patients, aux caisses de remboursement sans pénaliser le malade. Nul besoin d’associer le dosage de l'urée à celui de la créatinine sauf si celui-ci est demandé par un médecin néphrologue.

TSH : gare aux abus !

On voit également souvent dans les bilans de santé le dosage de la TSH, qui est utilisé pour découvrir une hypothyroïdie, c’est-à-dire un fonctionnement ralenti de la glande thyroïde.

Or du moment où la glande thyroïde fonctionne moins bien, les symptômes cliniques sont souvent là.

Et donc s’il n’y a pas véritablement de signes en faveur d’une hypothyroïdie, pourquoi doser systématiquement la TSH chez tous les malades qui consultent ?

Il serait beaucoup plus judicieux, selon moi, de doser les anticorps anti-thyroïde, puisque ceux-ci seront positifs chez une personne sur 10 au-delà de 50 ans.

Ainsi, j’aimerais que chaque patient soit acteur de sa santé et soit curieux des examens biologiques qu’on lui fait réaliser.

Êtes-vous un « bon » patient ?

Le patient doit toujours avoir avec lui les prises de sang précédentes.

Ainsi, s’il voit dans les trois mois, même dans les six mois ou même dans l’année, que le médecin dose à chaque fois les mêmes paramètres, par exemple le bilan lipidique, il serait bon que le patient le questionne :

  • À quoi bon doser le cholestérol ?
  • Est-ce qu’il y a des maladies du cholestérol qui pourraient expliquer que j’ai mal au ventre ?
  • Est-ce qu’il y a des maladies du cholestérol qui expliquent que j’ai de l’urticaire ?

Certes non !

Ainsi on pourrait faire des économies. Et surtout, cela va conduire le médecin à réfléchir, à se concentrer, à envisager des causes particulières et donc à demander des analyses particulières.

Car le médecin est souvent soulagé d’avoir rempli une feuille qui n’est pas restée blanche, même s’il sait pertinemment qu’il vient de prescrire exactement la même chose au malade qui précédait et encore la même chose au malade du début d’après-midi, à celui de la matinée etc.

La suite dans ma prochaine lettre

Non, la médecine ne se résume pas à une douzaine de dosages. Il y a des milliers de dosages que les laboratoires sont prêts à faire.

Bien entendu de telles analyses ne peuvent se faire que si le médecin a une parfaite connaissance de la physiologie humaine.

Dans ma prochaine lettre, je vous présenterai la suite de ce vaste dossier sur les prises de sang et reviendrai en détail sur d’autres analyses courantes et moins courantes.

Vous verrez notamment comment interpréter les données correctement et ce que signifie vraiment un résultat « normal ».

À bientôt !

Bien à vous,

Pr Philippe Humbert

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Je m’appelle Philippe Humbert et je suis médecin (dermatologie, médecine interne, allergologie et oncologie), Professeur à la faculté de Besançon et chercheur. Je suis ce que l’on appelle un clinicien, c'est-à-dire un médecin très proche de ses malades.

Dans mon livre Avez-vous un bon médecin ? je pointe du doigt les erreurs que font les patients. Il faut apprendre à être un bon malade, pour être sûr que le médecin va véritablement prêter attention à vos problèmes. Je montre au travers d’histoires parfois dramatiques, comment des solutions auraient pu être trouvées si le médecin avait pratiqué sa médecine comme il le fallait.

Après avoir lu ce livre, vous ne direz plus «  mon docteur me connaît », vous n’accepterez plus qu’on vous affirme que tout va bien, alors que vous vous tordez de douleurs, vous irez à l'encontre de certaines idées reçues (par exemple : la consommation de vitamine C le soir peut être une bonne idée)...

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