Dans le hall nord bondé de visiteurs du Centre de convention de Las Vegas, c'est un peu la star du moment au Salon de l'électronique grand public (CES) qui a ouvert ses portes mardi 9 janvier. La Byton, première automobile du nom, trône dans sa livrée blanche, sur un piédestal tournant, admirée par une petite foule essentiellement asiatique qui l'immortalise avec leur smartphone. L'apparence est sobre et finalement familière. Le concept Byton rappelle ces SUV (Sport Utility Vehicles ou 4 x 4 urbains), qui de Lexus à Audi, de Nissan à Hyundai, de Ford à Peugeot, plaisent tant aux acheteurs de voitures du monde entier.
Sous des dehors un peu banals, l'engin crée pourtant la curiosité, voire l'engouement. Des capitaux chinois, un siège social à Nanjing, près de Shanghaï, un top management essentiellement issu de BMW et des talents venus des plus grands noms industriels à la fois automobiles (Audi, Infinity) et high-tech (Apple, Google). Byton est, après Tesla, la nouvelle marque créée ex-nihilo, c'est-à-dire en dehors de l'industrie auto classique, incarnant la révolution de la voiture de demain : connectée, autonome et même 100 % électrique avec une autonomie allant jusqu'à 520 kilomètres.
Il faut ouvrir la portière pour se rendre compte du saut dans un nouveau monde. L'écran principal d'abord. Immense – sur toute la largeur du pare-brise et sur un bon quart de sa hauteur. Et puis ce volant doté d'une tablette tactile qui va permettre au conducteur de pianoter pour dialoguer avec la voiture. Evidemment, les passagers arrière ont chacun leur écran. Et il y a aussi ce qu'on ne voit pas, comme ces caméras à reconnaissance faciale, à l'extérieur pour déverrouiller la voiture et à l'intérieur pour reconnaître l'occupant et charger son profil sur l'écran.
Cette batterie de capteurs permet, affirme la start-up, d'accéder à la conduite autonome de niveau 4, c'est-à-dire presque totale. D'autres capteurs intérieurs vont collecter vos données de santé (rythme cardiaque, tension, chaleur corporelle). A cela s'ajoute un système d'antennes plates qui captent la 5G. Et on en oublie… La Byton est non seulement un smartphone roulant, mais aussi un home-cinéma, un ordinateur, un compagnon parlant, un docteur monté sur roues.
" Nous avons inventé le SIV, ou Smart Interactive Vehicle ", disent les responsables du marketing de Byton.
Le plus surprenant c'est que ce rêve éveillé de voiture du futur n'est pas un concept destiné à voir le jour dans dix ou quinze ans. Il est censé entrer en production dans l'usine de Nanjing (capacité 300 000 véhicules) à la fin de 2019 pour le marché chinois puis en 2020 pour les clients américains (premier semestre) et européens (fin d'année).
Une promesseSeulement voilà : toute cette magie n'est pour le moment qu'une promesse. Et les vétérans du CES se souviennent que, en 2017, il y avait déjà une auto électrique star. C'était la Faraday, incroyable bolide à batteries, aussi rapide qu'une Ferrari, qui devait, elle aussi, bouleverser le marché. Conçue en Californie et possédée par un multimillionnaire chinois, le fondateur de Leco, Jia Yueting, la Faraday avait alimenté le buzz dans les hôtels-casinos de Vegas.
Las ! Un an après, M. Yueting est recherché par l'Etat chinois en raison de dettes mirobolantes non payées. Le projet de méga-usine qui devait voir le jour dans le Nevada a été abandonné et si l'idée initiale n'est pas morte, elle est fort mal en point.
" Faraday se positionnait sur le marché très étroit du luxe,Byton vise le segment moyen de gamme, répond Oliver Strohbach directeur des relations publiques de Byton pour l'Europe.
En Chine, la voiture sera vendue 300 000 yuans - environ 38 000 euros -
. C'est un montant acceptable pour la classe moyenne du pays. "
Pour éviter de tomber dans les errements de Faraday ou même dans les difficultés de Tesla, qui pour le moment est incapable de produire les 5 000 Model 3 par semaine promis par son fondateur Elon Musk, Byton pense avoir mis tous les moyens de son côté. Le PDG, Carsten Breitfeld, est un ancien dirigeant de BMW, qui a créé la i8, une voiture de sport hybride rechargeable. Un solide "
car guy ".
" Tesla a une plate-forme technique par voiture, souligne M. Strohbach.
Notre logique industrielle est tout autre : nous aurons une seule plate-forme pour produire trois véhicules : le SUV actuel, un monospace sept places et une berline. "
La stratégie générale est aussi de fonder une entreprise globale et de tirer le meilleur de chaque continent. La conception industrielle se fait à Munich, les logiciels et l'intelligence artificielle à Santa Clara, en Californie, et la production en Chine. Il y a même un peu d'industrie française dans la Byton puisque l'équipementier Faurecia (filiale de PSA) fabrique le spectaculaire habitacle.
Éric Béziat
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