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mardi 30 janvier 2018

Disparition -Jean-Claude Lattès - Editeur

30 janvier 2018

Jean-Claude Lattès

Editeur

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Journaliste, écrivain, vigneron, Jean-Claude Lattès avait de nombreux points communs avec le président de l'académie Goncourt, Bernard Pivot, qui a annoncé son décès, survenu samedi 27  janvier, à Paris. Il avait 76 ans. C'est pourtant comme éditeur que Jean-Claude Lattès s'est taillé une franche réputation, un éditeur flamboyant et pressé, dont l'ascension prodigieuse a été suivie par une chute, tout aussi remarquable.
En  1991, il est remercié de la direction d'Hachette-Livre, alors troisième groupe mondial d'édition, détenu par Jean-Luc Lagardère. L'homme quitte le secteur pour ne pas y revenir, sauf pour écrire deux livres avec son complice de toujours, Eric Deschodt, avant de publier seul la première biographie d'un oublié de l'histoire : Agrippa. Le Dernier Roi des Juifs, sera publié en  2012, chez NiL, maison dirigée par Nicole Lattès, la mère de ses deux fils. L'édition reste une affaire de famille.
Né le 3  septembre 1941, ce fils d'un marchand de tissu réputé de Nice hésite entre journalisme et édition. A l'Ecole supérieure de commerce de Paris, il crée un journal et un prix littéraire nommé Hermès, le dieu du commerce et des voleurs. Très tôt, il est critique littéraire à Combat, Arts, L'Express ou Candide, fait des stages chez Grasset et commence sa carrière aux côtés de Pierre -Belfond, en  1963.
Des débuts difficilesDeux ans plus tard, il entre chez Robert Laffont, où il dirige le service publicité et les relations publiques. C'est de cet éditeur qu'il se sent le plus proche : " Mon patron et mon maître, il m'a tout appris ", dit-il. Pourtant, c'est parce que Robert Laffont refuse de lancer une collection de livres sur l'actualité qu'il part créer en  1968 une maison nommée Edition spéciale avec Jacques Lanzmann, alors rédacteur en chef du magazineLui. Leur premier titre consacré aux événements de mai  1968 sera  Ce n'est qu'un début, de Philippe Labro. Suivent des documents sur les armes secrètes d'Israël, sur Prague, mais aussi des collections érotiques.
Alors que les débuts sont difficiles, il sauve son entreprise en rééditant tous les livres de la série " Tarzan " d'Edgar Rice Burroughs. Mais, en  1971, Jean-Claude Lattès rachète les parts de son associé et poursuit seul l'aventure en donnant son nom à la maison, comme c'est la tradition dans l'édition. Vient ensuite l'étonnante baraka de l'éditeur, liée à son flair pour dénicher des best-sellers.
Il va ainsi publier, dans la décennie, Un sac de billes, de Joseph Joffo (1973), qui sera vendu à plusieurs millions d'exemplaires, toutes éditions confondues, mais aussiL'Amour aveugle, de Patrick Cauvin (1974), Louisiane, de Maurice Denuzière (1977), sans oublier les ouvrages de Xaviera Hollander. A la recherche de diversification, il crée aussi la marque Alta, où sont édités les premiers romans traduits de Stephen King.
Au tout début des années 1980, Jean-Luc Lagardère, propriétaire de Matra et d'Hachette, propose à Jean-Claude Lattès de lui racheter sa maison et le place à la tête du département livres du groupe. L'homme y restera dix ans, mais sa chance semble l'avoir abandonné, même si, dans un temps, les succès commerciaux continuent, avecLe Nabab, d'Irène Frain (1982), Le Vent du soir, de Jean d'Ormesson (1985), et Léon L'Africain, d'Amin Maalouf (1986).
D'un caractère dominateur, Jean-Claude Lattès rencontre de fortes résistances au sein du groupe. Si Bernard Fixot préfère quitter le navire, il se trouve vite confronté à l'hostilité conjointe des patrons de Fayard et de Grasset, Claude Durand et Jean-Claude Fasquelle, qui n'apprécient pas son tempérament fougueux. Chargé de développer le groupe, il multiplie les échecs, avec le fiasco de l'opération " Succès du livre " censée entamer l'hégémonie de France Loisirs sur les clubs de livres, alors très rentables, ou avec le lancement du guide Hachette des vins, qui devait concurrencer les guides Michelin. En vain.
De même, à l'international, les rachats de l'éditeur espagnol Salvat et des encyclopédies américaines Grolier se révèlent de coûteuses opérations financières, au moment même où le groupe Lagardère joue sa survie, embourbé dans le fiasco de la Cinq. En  1991, Jean-Claude Lattès quitte alors l'édition pour voyager en Inde notamment et s'occuper de ses vignes, en Provence.
Alain Beuve-Méry
© Le Monde

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