| | Hadrien Mathoux Directeur adjoint de la rédaction L'obsession du portique de sécurité, ou la
nouvelle loi de l'emmerdement maximum
Un drame, un portique. Si elle n'accompagnait pas des tragédies humaines, cette nouvelle règle de la politique sécuritaire aurait presque quelque chose de comique. Après l'agression au couteau perpétrée par un élève dans un lycée de Nantes ce jeudi 24 avril (un mort, trois blessés), la litanie a repris. François Bayrou, et surtout Laurent Wauquiez, se sont prononcés pour la généralisation de portiques de sécurité à l'entrée des établissements scolaires. La mesure avait déjà été brandie par le second en… 2015.
Les Français en ont désormais pris l'habitude. La tendance a commencé dans les aéroports, notamment après les attentats du 11 septembre 2001. Il faut désormais arriver deux heures avant le décollage de son avion, dont une passée en contrôles de sécurité en tous genres. D'autres lieux ont suivi : les gares ferroviaires se sont ornées de portiques, les marchés sont désormais hérissés de barrières et de contrôles à l'entrée. Des « contrôles aléatoires aux abords des établissements scolaires » devraient également se généraliser. On assiste tout bonnement à une carcéralisation généralisée de l'espace public : si la mesure prônée par le Premier ministre est bien mise en place, on entrera bientôt dans une école comme on pénètre dans une prison.
Ces mesures sont-elles justifiées ? Il est à peu près certain que portiques, barrières et fouilles ont contribué à éviter plusieurs drames. Mais nul ne peut prétendre éliminer tous les risques. Si un fou, ou un terroriste, décide d'assassiner des gens à coups de couteau ou de fusil, il pourra le faire à l'entrée de l'école, et pas dans son enceinte. Surtout, quel est le prix réel de tous ces dispositifs ? Outre le coût financier pour la collectivité, le temps dépensé en contrôles de sécurité, et le poids psychologique engendré par une atmosphère de surveillance généralisée, sont considérables.
Il est illusoire de prétendre que l'État peut tout contre l'insécurité. La généralisation du port du couteau par des jeunes gens, la démultiplication de l'agressivité au quotidien, le processus de « décivilisation », pour reprendre les mots de Jérôme Fourquet, ne peuvent pas être combattus uniquement par des lois ou des mesures administratives, et dépassent de loin la responsabilité des gouvernements. Plus ennuyeux, en revanche, est le contraste entre le zèle des politiques pour appliquer des mesures extrêmement contraignantes pour le quotidien des Français, et leur impuissance affichée à neutraliser des individus à l'évidente dangerosité, tels que les étrangers visés par une obligation de quitter le territoire. Twitter @hadrienmathoux
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