Le Parti communiste chinois (PCC) a fait entrer des blindés dans la ville de Zhengzhou alors que l’immense site de production d’ iPhone est toujours en proie à des grèves et à de violentes manifestations. Outre l’exaspération qui gagne les centres urbains chinois face à la politique du « zéro-Covid » du gouvernement (voir LSDJ 1758), l’attitude d’Apple est pointée du doigt. L’immense cité industrielle qui fait travailler 200 000 personnes à Zhengzhou fabrique son « smart phone » iconique depuis 2007. Le conflit qui dure avec le personnel de l’usine pourrait causer une perte de production de 6 millions d’unités d'iPhone Pro cette année. Cette crise révèle la dépendance d’Apple à la Chine où sont fabriqués 95% de ses iPhone. La direction de la firme en a conscience : les nouveaux iPhone 14 sont produits en Inde depuis septembre, et la fabrication des MacBook et AirPods a été déplacée au Vietnam. Cela reste modeste par rapport au poids de la Chine qui propose de meilleures infrastructures. Apple est la marque la plus reconnue du monde. Sa valeur est évaluée en 2022 à 355 milliards de dollars (voir pour plus de détails le classement Global 500 report), une augmentation de 35% en un an et un record absolu depuis que ce classement existe (2007). Elle est le symbole d’une Silicon Valley ingénieuse, créative et libertaire… Or les événements de Zhengzhou dévoilent la face pourrie de la célèbre pomme. L’application AirDrop aurait été bridée peu après le déclenchement des manifestations. AirDrop permet le partage de fichiers d’iPhone à iPhone directement sans avoir à passer par internet, surveillé de près par le PCC. Apple a donc décidé – ou accepté – de fermer cette fenêtre de liberté qui permettait aux manifestants de communiquer entre eux. La polémique enfle aux États-Unis alors que le PdG d’Apple, le très « woke » Tim Cook, a refusé de répondre aux questions d’une journaliste sur le sujet spécifique du bridage d’AirDrop en Chine (voir l’épisode sur Fox News questions à Tim Cook le 2 décembre). Apple courbe l’échine, voire collabore avec le Parti communiste chinois… Les grands principes affichés par la firme ne seraient donc valables que dans la mesure où ses capacités de production, donc de profits, ne sont pas affectées. La situation est d’autant plus gênante qu’elle contraste totalement avec son attitude très agressive face à Twitter. Depuis le rachat du réseau social par Elon Musk, la direction d’Apple a fait part de sa « préoccupation », allant jusqu’à envisager de ne plus héberger Twitter sur Apple Store. Sachant que près de 50% des Américains sont équipés d’ iPhone, c’était une menace majeure pour Twitter. Tim Cook a accepté de rencontrer Elon Musk pour la première fois au début de mois de décembre, et ils semblent avoir trouvé un terrain d’entente. La différence de traitement est béante avec l’application chinoise TikTok, très prisée des adolescents. Malgré les soupçons sur le transfert de données des utilisateurs de TikTok vers la Chine, Apple n’a pas jugé bon de réagir. Contre la menace de « discours de haine » libérés par « l’affreux » Elon Musk – qui représenteraient moins de 0,1% des 500 millions de tweets quotidiens – Tim Cook a sorti l’artillerie lourde… Et que dire alors de la situation en Chine ? La multinationale toute puissante et vénérée comme une pionnière du génie capitaliste collaborerait servilement avec un régime communiste ?! La « success story » d’Apple est en fait intimement liée à la montée en puissance de la Chine sur la scène internationale. Quasiment en faillite au début des années 90, la marque la plus valorisée du monde en 2022 a profité des « 30 glorieuses » de la Chine devenue rivale des États-Unis grâce à la mondialisation. L’équipe éditoriale du magazine The Week (voir l’article en lien) montre qu’Apple a été aux avant-gardes de la globalisation en profitant du système le plus profitable : des produits conçus en Californie, fabriqués à bas coûts en Chine pour être vendus à la masse montante de la classe moyenne locale. Tim Cook a réalisé le rêve d’Henry Ford pour ses automobiles dans l’URSS de Staline… De plus en plus de composants chinois ont été intégrés – à des prix toujours plus bas. Le PDG d’Apple a plusieurs fois loué le régime de Pékin (voir l’extrait de l’interview Fortune Magazine en 2017) pour avoir fait sortir des millions de Chinois de la pauvreté. Il ne fait que baiser la main d’un directeur d’usine dont ses profits dépendent. Et l’enrichissement spectaculaire (et inégalitaire) de la Chine est directement lié à la globalisation qui l’a transformée en usine mondiale. Apple est aujourd’hui sous pression pour diversifier sa production. Cela prendra du temps : les investissements étrangers en Chine ont augmenté de 14% de janvier à octobre 2022. Derrière les grands discours prônant la « bienveillance » et « l’inclusivité », la loi de profit s’impose quitte à aider le plus grand régime totalitaire de la planète à maintenir son peuple en esclavage… | 
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