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Vous l'attendiez...la voilà 🙂




Chronique du 11e de décembre en l’an de très très grande décrépitude vingt-deux
Où il est question d’une romance et de prévisions très prometteuses.
Le Roy souriait aux anges. Il était revenu de sa visite à son très cher ami Sir Joe du Bidon tout auréolé de gloire et d’honneurs. Dans l’empire des Amériques, on l’avait reçu une fois de plus avec une pompe et une munificence sans égales. Sir Joe – à qui l’on avait dû rappeler moult et moult fois le nom de ce petit monarc et la raison de sa fort encombrante visite en compagnie de surcroît de son épouse, une femme qui devait jeûner tout le jour et dont la dentition laissait à penser qu’elle était angloise – s'était montré fort disert et courtois jusqu'à en faire oublier Sir Donald, son prédécesseur. Cet empereur - dont on disait que son esprit s’égarait quelque peu – avait accepté que Notre Frétillant Freluquet le suivît partout, tel l’un de ces petits chiens qu’affectionnent tant les grands de ce monde. On s’était tendrement congratulé, tout en menaçant fortement l’abominable Tsar Vladimir. Sa Splendeur Nacrée avait accordé maints entretiens aux gazetiers de ce noble pays, lesquels avaient forgé un mot admirable pour nommer l’idylle qui s’était formée entre les deux souverains : « a bromance ». L’honneur en revenait à Notre Martial Chérubin. N’avait-il point parlé de Sir Joe comme d’un « frère d’armes » ?
Cependant le Roy eut quelques motifs de déconvenue. Il se fit tout d’abord quelque peu admonester par les gens de la maison de son cousin, le noble roi de l’Ukranie, Volodymir le Zélé-en-Ski, pour avoir déclaré que, lorsque la guerre serait chose finie, on aurait la bonne grâce d’accorder quelques faveurs au Tsar afin de l’amadouer. N’avait-on point de juteuses affaires financières à conclure de ce côté-là ? Les Conseillers du Château durent faire diligence pour se porter au secours de Sa Calamiteuse Bonimenterie. « Il y a méprise, susurrèrent en cœur ces Eminences Grises, les propos de Notre Divin Souverain ont été extraits de leur contexte. Sa Neigeuse Complaisance est du dernier bien avec son cousin, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. » Là-dessus, le Roy se fit transporter dans les airs pour gagner l’antique cité de Tirana, sise dans le lointain royaume de l’Albanie où se tenait un de ces grands raouts qu’il affectionnait tant, et dans lesquels il pouvait rutiler à loisir. Las ! les nouvelles provenant de la Startupenéchionne étaient mauvaises. Les Chambellans, se faisant le relais des fournisseurs de la manne de la Fée Electricité, se répandaient dans tous les salons des Gazettes pour préparer la populace aux Grandes Coupures, lesquelles consisteraient à plonger les chaumines des Riens et des Riennes dans le noir absolu, sans plus aucun moyen pour leurs occupants de faire tiédir le brouet vespéral et se chauffer un tant soit peu, lorsque toutefois les bourses à moitié vides le permettaient encore. Nul n’échapperait à ce black-out, pas même les malades et les paralytiques. Notre Irascible Foutriquet entra, dit-on, dans une grande ire. On convoqua un parterre de gazetiers afin que Sa Verbeuse Inconséquence pût tancer vertement les Cassandre. « Stop à tout ça » telles furent les fortes et nobles paroles qui tombèrent de la bouche royale. Et d’enjoindre aussitôt à tous les gazetiers-nourris-aux-croquettes des Chenils Royaux de faire savoir qu’on regorgeait des mannes de cette fabuleuse Electricité et qu’il ne convenait point de parler de « coupures » - fi que ce mot était laid ! – mais de « délestages ».
Tout allait derechef pour le mieux dans le meilleur des mondes. Après quelques agapes, on reprit les airs pour regagner les pénates élyséennes. Comme un bonheur n’arrivait jamais seul, Notre Frivole Bambin apprit que sa chère escouade de joueurs de balle au pied venait de se qualifier pour se disputer avec celle de son grand et noble cousin le Cheikh du royaume d’Al Magrib, le droit de rester seule en lice avec celle du royaume de l’Argentine ou celle de la Croatia qui sortirait vainqueur de la joute symétrique. Le Roy décida tout aussitôt qu’il ferait le voyage en aéroplane jusqu’au royaume du Quatre Quart, où se déroulaient ces olympiades de la balle au pied, afin d’assister au triomphe de ses protégés, qu’il se promettait de papouiller et de bisouiller tendrement. Les odeurs d’embrocation parvenaient déjà à ses délicates narines.
Cependant que les froidures s’installaient dans notre pays et qu’on peinait à se réchauffer, au royaume du Quatre Quart, sis au milieu des sables du désert, il fallait dépenser des fortunes pour faire descendre la température afin que les joueurs ne s’écroulassent point en courant derrière la petite balle ronde.
Ainsi en allait-il au royaume du Grand-Cul par-dessus Tête, en cet hiver précoce de l’an vingt-deux. Ce fut aussi le jour où le baron de la Chiotte prit les rênes de sa Faction, les Raipoublicains.
Illustration Bridget Jaune
"Nos Pipolesques Altesses arrivant au dîner de gala donné en leur honneur" circum 2022.